Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 10 novembre 2004 à 15h00
Prélèvements obligatoires — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

Un pourcentage de prélèvements rapporté au produit intérieur brut, en tant que tel, n'a pas de sens. Les vraies questions sont plutôt celles de savoir qui prélève, pour quoi faire, et si cela a ou non un impact positif sur la redistribution sociale et la qualité de vie de nos concitoyens.

Quel est l'impact réel des prélèvements sur le financement des dépenses de l'Etat, des organismes de sécurité sociale ou encore des collectivités locales ?

Pourquoi considérer la progression des dépenses de santé uniquement comme un problème ? Ne vaudrait-il pas mieux vérifier si les conditions d'une amélioration de la situation sanitaire de la population ont été effectivement réalisées ?

Je ne rappelle pas nos propositions pour financer autrement les dépenses de santé, car nous les avons présentées lors de l'examen du projet de loi relatif à l'assurance maladie, au mois de juillet dernier.

En proposant réduire les prélèvements obligatoires, c'est bel et bien la réduction de la part des prélèvements fiscaux directs de l'Etat - avec, pour corollaire, l'accroissement de la part des prélèvements sociaux sur le pouvoir d'achat des salariés - et l'affaiblissement des capacités financières des collectivités territoriales - confrontées depuis plus de vingt ans à la mise en oeuvre de la décentralisation, puis demain à la loi relative aux responsabilités locales, sans ressources suffisantes - qui sont à l'ordre du jour.

Monsieur le rapporteur général, quand vous vous offusquez des augmentations des prélèvements sociaux, nous nous inquiétons, nous, du fait que le financement de la protection sociale par l'impôt est de plus en plus important, et qu'il va d'ailleurs de pair avec une aggravation de la situation comptable de ladite protection sociale.

Nous nous inquiétons du fait que les collectivités sont amenées à prendre une place toujours plus importante dans la sphère de l'intervention publique, avec des compétences élargies, mais sans que les moyens qui leur sont dévolus correspondent aux besoins à satisfaire.

On pourrait d'ailleurs se demander, même si la commission d'évaluation des transferts de charges est en partie là pour le faire, quelle est la part des prélèvements fiscaux locaux imputable aux seules insuffisances de transferts de ressources de l'Etat aux collectivités territoriales.

Vous préférez un système fiscal accordant la primauté à la fiscalité indirecte, au détriment de l'impôt direct et, singulièrement, de l'impôt progressif, et cela de manière durable.

Depuis vingt ans, le niveau d'imposition des entreprises au titre de l'impôt sur les sociétés a été réduit dans d'importantes proportions, à la fois par la baisse du taux d'imposition et sa différenciation, mais aussi par le biais de mesures d'assiette, portant notamment sur le crédit d'impôt.

Dans le même temps, le poids relatif de l'impôt sur le revenu progressif s'est réduit, sous les effets conjugués des mesures de taux, de plus en plus prégnantes, et des mesures d'assiette. Nous pensons ainsi aux multiples niches fiscales qui existent désormais dans la fiscalité des revenus.

La taxe sur la valeur ajoutée, attachée à la consommation populaire, constitue une ponction sensible sur le pouvoir d'achat des salariés et des ménages modestes.

On pourrait y ajouter les multiples taxes, qui pèsent plus lourdement sur ces mêmes ménages. Je pense à la TIPP ou aux taxes qui touchent toutes les énergies. Elles permettent d'alimenter des budgets publics et elles sont porteuses, elles aussi, de recettes pour le budget de l'Etat au travers de la TVA qu'elles supportent.

Certains se plaignent d'une faible consommation populaire. Mais qui peut s'en étonner dans de telles conditions ? Les ponctions sur les ressources sont telles que le pouvoir d'achat des ménages est durement atteint. Or on sait bien que c'est un formidable atout, un élément essentiel pour dynamiser l'économie et l'emploi.

Pour faire face à cette situation, vous nous proposez d'assurer l'attractivité de notre territoire en participant à la course au moins-disant fiscal, qui semble désormais consubstantielle à la construction européenne.

En vertu de quoi, on continuerait de baisser l'impôt sur les sociétés, de réduire la fiscalité du patrimoine et du capital, de diminuer l'impôt de solidarité sur la fortune, d'instaurer une TVA sociale venant se substituer aux cotisations actuelles et de développer les alternatives aux prélèvements obligatoires en matière de santé ou de retraite.

Or vous persistez, monsieur le rapporteur général, malgré les simulations qui montrent que cette TVA sociale n'est pas une solution. Vous allez même, aux pages 97 et 98 de votre rapport, jusqu'à estimer que les hypothèses sur lesquelles on se fonde demanderaient à être relativisées par une réflexion économique réellement pluraliste.

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