Intervention de Dominique Bussereau

Réunion du 10 novembre 2004 à 15h00
Règlement définitif du budget de 2003 — Adoption définitive d'un projet de loi

Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat :

Quelle est la photographie de l'exécution budgétaire en 2003 ?

Tout d'abord, nous avons une raison de nous réjouir : la maîtrise des dépenses de l'Etat. Pas un euro de plus n'a été dépensé au regard du plafond voté par votre assemblée de 273, 8 milliards d'euros.

Je veux rendre hommage à la détermination d'Alain Lambert et de Francis Mer qui ont été capables, par leur énergie, par leur force de persuasion et par le respect qu'ils ont su imposer à leurs pairs, tenir vaille que vaille ce plafond de dépenses.

Nous mesurons combien il était capital d'atteindre cet objectif.

Nous devons d'abord respecter le Parlement, ce qui veut dire respecter strictement l'autorisation parlementaire

Ensuite, nous devons prouver aux Français que les finances de l'Etat, dans un contexte difficile, sont tenues ; nous y sommes parvenus.

Enfin, pour que notre parole conserve une force en Europe, il nous fallait respecter les engagements pris devant nos partenaires européens.

La stabilisation des dépenses a été permise par la constitution précoce d'une réserve de précaution, portant d'abord sur 4 milliards d'euros de crédits initiaux et sur près de 7 milliards d'euros de crédits reportés.

Des besoins nouveaux et les aléas de gestion ont pu ainsi être financés en puisant dans cette réserve, ce qui s'est traduit par trois mesures d'annulation qui ont été conduites dans la plus totale transparence à l'égard du Parlement

S'agissant des recettes, la conjoncture a pesé sur l'exécution.

Les recettes de l'Etat se sont repliées, pour la seconde année consécutive, à un rythme de 2, 8 %.

Les recouvrements de recettes fiscales ont traduit les effets de la chute de croissance, qui a été amorcée à la fin de 2001 et a prolongé ses effets jusqu'à la fin de 2003.

Nous tablions pour 2003 sur une croissance économique de 2, 5 %. Cette prévision était corroborée par l'ensemble des économistes. Nous nous sommes tous trompés, la croissance s'établissant in fine à seulement 0, 5 %.

La langueur de l'activité économique a eu un effet mécanique sur le produit des recettes fiscales, en moins-values, principalement au titre de l'impôt sur les sociétés, de la TVA et de la TIPP, la taxe intérieure sur les produits pétroliers.

Les recettes fiscales tendancielles, c'est-à-dire avant toutes mesures nouvelles, se sont fortement réduites.

L'atonie des recettes a été particulièrement marquée s'agissant de l'impôt sur les sociétés, en recul de plus de 15 % par rapport au produit de l'année 2001 et revenant à un niveau tout juste supérieur à celui de 1999.

Dans ce contexte difficile, le Gouvernement a clairement tenu le cap de sa politique économique. Comme les économistes aiment à le rappeler, le Gouvernement a tenu à laisser jouer les « stabilisateurs automatiques », c'est-à-dire qu'il n'a pas cherché à compenser les pertes de recettes fiscales en augmentant les impôts ou en coupant dans les crédits.

En agissant de la sorte, nous n'aurions fait que conforter les effets du cycle économique et nous aurions précipité notre économie, qui n'en avait pas besoin, dans la récession. Comme M. Philippe Marini l'indique dans son rapport écrit, il ne fallait pas « rajouter la crise à la crise ». Le contre-exemple des Pays-Bas aujourd'hui illustre les dangers d'une telle politique.

Il apparaît donc que le Gouvernement a fait les bons choix.

Il a fait un choix de raison : c'est vrai, le déficit s'est creusé, pour s'établir en fin d'année à 57 milliards d'euros, mais l'écart par rapport à la loi de finances initiale s'explique intégralement et exclusivement par des moins-values de recettes.

Il a également fait un choix d'efficacité : la France a renoué avec une croissance économique forte et se trouve aujourd'hui dans le peloton de tête en Europe.

Au-delà de cette photographie, quels enseignements peut-on tirer de l'exécution de la loi de finances de 2003 ?

Avant 2003, nos finances publiques étaient structurellement dégradées ; nous en payons encore l'addition. Nous agissons donc pour ne pas répéter ces erreurs de politique économique.

Quelle est l'origine des difficultés rencontrées par notre pays en matière de finances publiques depuis le début des années 2000 ?

La France a connu, à l'occasion de la bulle Internet, la phase d'expansion la plus forte depuis la fin des « Trente glorieuses » puisque la croissance s'est établie à 3, 5 % en 1998, et 4, 2 % en 2000.

Durant cette période, les recettes fiscales de l'Etat ont augmenté deux fois plus vite que le PIB, engendrant une manne exceptionnelle de recettes fiscales.

Ces recettes exceptionnelles et volatiles auraient dû être affectées à la réduction des déficits ; elles ont en réalité servi à financer des baisses d'impôt permanentes ou des dépenses récurrentes.

Si je prends l'exemple de l'année 2001, la précédente majorité a dépensé l'intégralité de la marge de manoeuvre à sa disposition, soit 20, 5 milliards d'euros, par des hausses de dépenses et des baisses d'impôts.

Nos comptes publics étaient donc dégradés au moment où s'est amorcé le retournement conjoncturel de l'hiver 2001-2002 : le passage au-dessus de 3 % de notre PIB était devenu quasi inévitable.

Nous avons donc mis en place - la commission des finances de la Haute Assemblée et vous-même le savez bien, mesdames, messieurs les sénateurs -, depuis plus de deux ans, une politique budgétaire en nette rupture avec celle qui a été conduite sous la législature précédente.

Au-delà de l'exercice formel de constatation comptable, cet examen du projet de loi de règlement nous donne l'occasion de mettre en perspective la politique budgétaire du Gouvernement.

Sans entrer dans les débats que nous aurons à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2005, je tiens à rappeler que notre priorité va à l'assainissement de nos finances publiques pour réconcilier nos concitoyens avec la confiance qu'ils doivent avoir en les gestionnaires de l'Etat.

Ce sont les raisons qui ont conduit Nicolas Sarkozy et moi-même à consolider la stabilisation des dépenses de l'Etat, qui constitue l'axe fondamental de notre politique budgétaire -nous stabiliserons les dépenses en volume pour la troisième année consécutive -, mais également, contrairement à ce qui s'est fait dans le passé, à consacrer les plus-values fiscales, que nous estimons à 5 milliards d'euros en 2004, au service du désendettement.

A la différence de nos prédécesseurs qui avaient imprudemment converti toutes ces plus-values conjoncturelles en dépenses pérennes, nous consolidons l'avenir en nous donnant des marges de manoeuvre.

Mais je vous le dis en toute franchise : il n'y a pas de trésor caché que nous aurions pu éventuellement dilapider.

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