Que constatons nous à l'examen des données fournies par la loi de règlement ? En grande partie, ce que nous critiquions et annoncions à l'époque. Oui, il y a eu dérapage des finances publiques, puisque le montant du déficit de la loi de finances initiale - environ 46 milliards d'euros - s'est trouvé majoré de 9, 5 milliards d'euros dans le collectif de fin d'année 2003, et que la présente loi de règlement porte d'ailleurs ce déficit à un niveau encore plus élevé, proche de 57 milliards d'euros, soit 12, 3 milliards de plus que la prévision, niveau jamais atteint dans l'histoire budgétaire de ce pays.
Oui, il y a eu poursuite du mouvement de baisse des impôts en direction des entreprises et des ménages les plus aisés. Il y a eu régulation budgétaire, annulation de crédits dans des domaines essentiels de l'intervention de l'Etat - mon collègue Jean-Pierre Demerliat en a cités quelques-uns - ou glissement organisé vers l'année suivante, une forme totalement organisée de non-dépense, deux points qui touchent à la sincérité même du budget et réduisent notre rôle de parlementaires.
Ainsi, selon les données mêmes fournies par les services du ministère des finances, les dépenses de l'Etat se sont accrues de 0, 1 % : environ 360 millions d'euros, soit un montant inférieur à celui qui avait été autorisé en loi de finances initiale.
Dans le même temps, les recettes de l'Etat ont diminué de 2, 6 %, une réduction qui affecte notamment les impôts prélevés sur la consommation : ainsi, les recettes de TVA et de TIPP ont respectivement chuté de 2, 7 milliards d'euros et de 1, 5 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale.
Le même processus s'observe pour l'impôt sur les sociétés qui, par rapport aux prévisions, est en baisse de 2, 7 milliards d'euros.
Déperdition de recettes, choix fiscaux sans portée réelle sur le développement de l'activité économique : ainsi, la baisse de l'impôt sur le revenu n'a manifestement pas relancé l'activité, pas plus que la consommation populaire.
C'est aussi par la rigueur budgétaire qu'ont été affectées lourdement les dépenses d'intervention, conduisant au gel de la dépense publique, et ce dès le vote du budget. Tous les critères d'une mauvaise allocation de la ressource publique ont été au rendez-vous de l'exécution budgétaire 2003.
Le problème, chacun le sait pertinemment, c'est que, dans ces cas-là, les choix budgétaires ultérieurs prolongent les conséquences de cette exécution de la loi de finances.
En ce sens, les orientations de la loi de finances de 2004, comme celles du projet de loi de finances pour 2005, dont nous débattrons très prochainement, accusent encore les traits caractéristiques de ces choix politiques. On persiste et on signe dans la réduction de la dépense publique, on organise, dans la foulée de la loi sur les responsabilités locales, le transfert de compétences, sans moyens, sur les collectivités locales, on supprime massivement des postes dans l'éducation nationale, dans les services fiscaux, dans les services de l'équipement, pour n'en citer que quelques-uns, ce qui, comme le disait tout à l'heure l'un de nos collègues, pose des problèmes en matière d'aménagement du territoire.
Le Gouvernement poursuit dans les cadeaux fiscaux aux plus aisés, aux entreprises, qu'il s'agisse des droits de succession, des donations ou encore de l'impôt sur le revenu.
Le vote sur une loi de règlement, qu'on le veuille ou non, présente toujours un caractère relativement formel et purement technique. Ce serait presque une sorte de simple apurement des comptes, et l'on donnerait quitus au comptable public de l'utilisation de l'argent de l'Etat.
Pour autant, nous étions clairement opposés aux choix budgétaires de 2003 et nous avons indiqué à quel point l'exécution avait recouvré une bonne partie de nos analyses. C'est donc tout naturellement que, prolongeant notre vision initiale de la loi de finances de 2003, nous ne pourrons que voter contre ce projet de loi de règlement.