Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 26 novembre 2008 à 10h00
Loi de finances pour 2009 — Article 15, amendements 62 347 17

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Monsieur le président, je vous remercie d’avoir eu la patience d’attendre l’arrivée d’un membre du Gouvernement !

L’amendement n° I-62 vise à revenir sur la réduction des compensations d’exonérations de fiscalité locale versées par l’État aux collectivités territoriales, réduction qui, à l’issue de l'examen du texte par l’Assemblée nationale, s’élève à plus de 347 millions d’euros, soit une baisse de 17 %.

Nous l’avons suffisamment souligné la nuit dernière, l’intégration au sein de l’enveloppe des dotations non seulement du FCTVA, le fonds de compensation pour la TVA, mais aussi du prélèvement opéré au titre des amendes forfaitaires de la police de la circulation et des radars automatiques, de la nouvelle dotation de développement urbain et du fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées nouvellement créé est de nature à exercer une contrainte plus forte que jamais sur cette enveloppe.

D’ailleurs, monsieur le rapporteur général, vous avez indiqué hier qu’il convenait de parler non plus d’enveloppe « normée », mais d’enveloppe « fermée ». C’est un concept que nous reprenons volontiers à notre compte, tant il est parlant.

Les changements que j’ai évoqués auront des répercussions sur les compensations d’exonérations de fiscalité locale. Ces créations ou suppressions ne coûteront, une nouvelle fois, pas un euro à l’État, dans la mesure où les montants correspondants seront prélevés sur l’accroissement de l’enveloppe des dotations en 2009. L’argent mobilisé par ces nouvelles dotations viendra s’imputer sur les autres concours financiers. Par conséquent, ce sont bien les collectivités territoriales qui financeront, sur leurs dotations, les mesures prévues dans le plan Banlieue et les conséquences de la réforme de la carte militaire, décidées, je le rappelle, par l’État.

Outre la dotation de compensation de la taxe professionnelle, de nouvelles compensations avaient déjà été intégrées l’année dernière en tant que variables d’ajustement. La pression sera encore plus forte cette année, le Gouvernement ayant dû une nouvelle fois élargir le champ des variables d’ajustement, à la quasi-totalité des compensations d’exonérations fiscales.

Au regard des 347 millions d’euros que j’ai évoqués au début de mon propos, le prétendu cadeau de 275 millions d’euros du Gouvernement ne fait pas illusion.

Il faut le souligner, à aucun moment les collectivités territoriales qui subiront cette baisse de recettes n’ont demandé ces exonérations fiscales. Pourtant, elles seront bientôt seules à en supporter le coût.

Monsieur le rapporteur général, vous nous proposez, comme l’année dernière, un certain nombre d’aménagements destinés à réduire cette baisse des compensations pour les collectivités.

Vous souhaitez ainsi réintégrer les 32 millions d’euros prévus au titre de la dotation spéciale instituteurs, que le Gouvernement a honteusement pillée l’année dernière. Nous sommes favorables à cette mesure.

Vous entendez également réduire de 20 % à 10 % le taux de l’exonération des parts communale et intercommunale de taxe foncière sur les propriétés non bâties agricoles. À la différence de la majorité sénatoriale, nous nous étions à l’époque farouchement opposés à cette exonération, mise en place de manière autoritaire sans prise en compte de l’avis des collectivités, en vue de faire plaisir au chef de l’État d’alors.

En revanche, vous proposez de réduire de 25 millions d’euros le montant de la dotation de compensation de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle, versée par l’État aux fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle. Selon vos dires, ce non-versement de l’État ne fera pas diminuer le montant perçu par ces fonds. Monsieur le rapporteur général, nous ne vous croyons pas !

En 2009, les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle verraient leurs ressources non pas diminuer, mais stagner. Ces 25 millions d’euros en moins, c’est autant d’argent que les départements ne pourront pas consacrer à la péréquation sur leurs territoires, et nous contestons fortement une telle évolution.

Les collectivités ont déjà suffisamment subi la réduction des dépenses publiques et la baisse de leurs recettes pour que l’on ne commence pas, cette fois-ci – mais c’est bien ce que vous faites ! –, à s’attaquer à la péréquation. C’est une voie dangereuse, qu’il ne faut en aucun cas emprunter.

Si les compensations d’exonérations fiscales continuent d’être soumises à une telle pression, leur disparition sera inéluctable à l’horizon des années 2012 et 2013. Que se passera-t-il ensuite ? À quelles dotations s’attaquera l’État ?

Mes chers collègues de la majorité, je m’arrête là. Nous vous laisserons le loisir de gérer entre vous la pénurie financière qui est organisée par le Gouvernement et que vous soutenez de facto, et de jure si la loi est votée en l’état. Cependant, n’oubliez pas que les collectivités territoriales que nous représentons sur ces travées – les élus de nombre d’entre elles sont d’ailleurs présents dans la capitale, aujourd’hui, pour assister au congrès de l’Association des maires de France – seront les premières victimes du budget que vous vous apprêtez à voter !

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