Monsieur le président, mes chers collègues, je sollicite une grâce de votre part : n’ayez pas un instant la tentation de penser que, parce que je présente un amendement tendant à la suppression de la variable d’ajustement s’agissant du fonds de compensation de la taxe professionnelle de la Corse, je siègerais uniquement pour défendre les intérêts de mon île. J’hérite en fait d’une situation que je n’ai pas personnellement à assumer.
Le problème est complexe, et un simple rappel vous fera comprendre le bien-fondé de cet amendement.
Le statut fiscal de la Corse fut voté en 1994. À cette époque, M. Philippe Marini expliquait que la collectivité ne pourrait plus fixer, dès lors, les taux de la taxe professionnelle. Le Président de la République, quant à lui, alors secrétaire d’État au budget, justifiait ce statut fiscal particulier par la nécessité de redynamiser l’investissement et l’emploi dans l’île. Il faut bien comprendre que, à ce stade, les collectivités départementales et régionale sont totalement neutres à l’égard du dispositif qui vient d’être créé.
Il n’avait pas échappé à M. Paul Girod, qui était rapporteur du texte, que l’on ne manquerait pas de rencontrer des difficultés en matière de compensations. Si l’assiette de la taxe professionnelle devait évoluer de manière sensible, certaines situations imprévues pourraient apparaître.
Or, aujourd’hui, on nous explique que la taxe professionnelle constitue une variable d’ajustement, dont l’incidence est bien plus importante sur les collectivités territoriales corses que sur les autres collectivités.
Par exemple, la recette de taxe professionnelle atteint, pour la Corse-du-Sud, 22 millions d’euros. Demain, le département sera privé de 3 millions ou de 4 millions d’euros pour établir son budget. Il en va de même pour les autres collectivités corses.
Le problème qui se pose est le suivant. Je comprends parfaitement la position du Gouvernement qui souhaite contenir dans une limite de 2 % l’augmentation de ses dépenses au profit des collectivités territoriales. Toutefois, comment intégrer un statut fiscal particulier dans une disposition générale de droit commun ? Cela n’a pas lieu d’être.
Je conclurai mon propos sur une autre question.
Voilà deux ou trois ans, M. le président de la commission des finances et M. le rapporteur général s’en souviendront, au terme d’un débat nocturne avait été votée la possibilité, pour la collectivité territoriale, d’augmenter le taux de réversion de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP. J’invoque cette circonstance avec précaution, car je ne voudrais pas que cela se retourne contre mon argumentation !
Quelle cohérence pourrons-nous attribuer à la politique du Gouvernement si cette disposition, deux ans après avoir été adoptée, se trouvait ruinée par une disposition contraire ? Je laisse l’assemblée juge de cette situation.
Pour ma part, je considère qu’inclure dans le champ d’une disposition générale les variables d’ajustement relatives à un statut fiscal particulier souhaité par le Président de la République, alors secrétaire d’État au budget, et dont l’adoption a privé les collectivités locales corses de la possibilité d’accroître les taux de la taxe professionnelle conduira immanquablement ces dernières à alourdir les autres taxes. Cela engendrera une situation totalement déséquilibrée par rapport à celle des autres collectivités.