Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, selon nous, le projet de loi de modernisation de l’économie acte un projet de société dans lequel tout devient marchand et toutes les formes de solidarité, de gratuité et de partage sont bannies.
Sur le plan tant social qu’économique ou culturel, ce texte prévoit un modèle stérile, qui ne manquera pas d’avoir des effets pervers, notamment parce qu’il renforcera les inégalités entre les plus forts et les plus démunis.
Sous couvert de modernité, c’est une politique rétrograde qui est mise en œuvre ; sous couvert d’égalité, c’est l’écrasement de certains professionnels et des salariés qui est organisé ; sous couvert de liberté, c’est l’installation de monopoles économiques et financiers qui est confortée.
Depuis des mois maintenant, le Gouvernement et le Président de la République promettent aux Français d’augmenter leur pouvoir d’achat. Les lois successives n’ont montré aucun effet positif allant dans ce sens. Les prix des produits alimentaires, de l’énergie, les montants des loyers pèsent toujours plus lourds sur les ménages, et les salaires, comme les retraites, n’augmentent pas.
Au contraire, les politiques que vous avez conduites ont aggravé les difficultés des Françaises et des Français. Puisque vous niez toujours l’impact négatif de vos politiques, prenons un exemple concret et récent : le secteur de l’énergie.
Au moment de la privatisation de Gaz de France, le 16 juillet dernier – jour funeste ! –, le Gouvernement se voulait rassurant : la concurrence devait jouer et faire baisser les prix. Pourtant, à peine cette fusion réalisée, Jean-François Cirelli, ancien P-DG de Gaz de France, rétrogradé futur numéro 2 du nouveau groupe, explique qu’il faudra, à l’automne, augmenter une nouvelle fois les tarifs du gaz pour tenir compte de l’évolution du prix du pétrole, et ce alors même que les tarifs ont déjà crû de 4, 4 % et de 5 % – soit près de 10 % – depuis le 1er janvier dernier.
Qu’a fait le Gouvernement face à ces augmentations ? Qu’a fait Mme la ministre de l’économie pour préserver le pouvoir d’achat de nos concitoyens ? Elle s’est contentée d’acquiescer.
À l’heure où il est urgent de défendre un droit pour tous à l’énergie, la privatisation de GDF correspond en réalité à la mise en œuvre d’une nouvelle politique d’entreprise tournée vers la réalisation de profits toujours plus importants pour les actionnaires.
Avant-hier, la valeur boursière de GDF et Suez atteignait 96 milliards d’euros ! Les consommateurs paient toujours plus chers, tandis que, comme on pouvait le lire dans la presse : « Pour l’instant, ils [les investisseurs] ont repris confiance dans une hausse tarifaire cet été après les dernières déclarations de la ministre de l’économie, Christine Lagarde, ... »
Au titre des augmentations prévues cet été, le SMIC n’est, lui, revalorisé que de 0, 9 % au 1er juillet. Tout est dit !
Le projet de loi de modernisation de l’économie s’inscrit dans la droite ligne de vos politiques de dérégulation des relations commerciales comme de démantèlement et de casse des services publics. Il n’apportera pas de réponse aux difficultés que rencontrent nos concitoyens pour se nourrir, se loger, se déplacer, se soigner, se vêtir. Car, en réalité, la volonté politique de les aider n’existe pas !
Les débats sur le projet de loi de modernisation de l’économie ont montré à quel point la valeur travail a peu d’importance à vos yeux.
Fonder une ligne politique en faveur du pouvoir d’achat sur une éventuelle baisse des prix, en rejetant la question de la faiblesse des salaires et des retraites ou celle de l’absence d’une juste rémunération du travail, est un non-sens, à moins que le but recherché ne soit l’exploitation croissante des travailleurs, ceux qui créent la richesse, comme vous l’oubliez trop souvent, au profit d’un capitalisme financier stérile et dévorant.
Fonder une politique en faveur du pouvoir d’achat sur la baisse des prix, sans se soucier de la qualité des produits et de l’égalité dans l’accès aux produits, c’est oublier que la croissance n’a de sens que si ses fruits sont justement redistribués au bénéfice du plus grand nombre. C’est le problème d’une répartition plus égalitaire des richesses produites.
Dès lors, vous comprendrez, monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, que les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront contre ce texte, qui montre une fois encore combien les inégalités et les luttes d’hier restent celles d’aujourd’hui.