Intervention de Roland Ries

Réunion du 12 mai 2010 à 14h45
Transposition de la directive « services » — Discussion d'une question orale européenne avec débat

Photo de Roland RiesRoland Ries :

Madame la secrétaire d'État, je m’étonne que le Gouvernement refuse l’idée même d’une loi-cadre pour transposer cette directive, notre pays se distinguant en cela de la quasi-totalité des États membres de l’Union européenne. La France est, avec l’Allemagne, le seul pays à avoir préféré la transposition sectorielle. Si le choix du gouvernement allemand peut se justifier par la structure fédérale de l’État, les arguments avancés par le gouvernement français sont en revanche beaucoup plus surprenants.

Lors de l’examen de ma proposition de loi, Mme Nora Berra a expliqué que les autres États s’étaient « simplement contentés de copier la directive » tout en ajoutant que « le vote d’une loi-cadre ne constitue pas, en soi, un gage de sécurité juridique ».

Cette remarque est tout de même étonnante dans la mesure où l’objet premier d’une loi-cadre est, pour moi et sans doute aussi pour mon collègue Jean Bizet, de définir avant tout une orientation politique précise, claire et surtout lisible, tant pour le Parlement que pour les citoyens et les acteurs concernés.

Une loi-cadre présente l’avantage d’appréhender le sujet dans sa globalité, en laissant le moins de zones d’ombre possible. La directive « Services » ayant suscité tant de controverses – elle en suscite encore ! –, il me paraissait normal et même salutaire de voir notre pays adopter cette législation dans la plus grande clarté et la plus grande transparence.

Au lieu de cela, comme je le soulignais à l’instant, le Parlement a transposé par voie législative les dispositions relatives à certains secteurs, notamment dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie ou encore dans celui de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires ».

En revanche, tous les secteurs d’activités entrant dans le périmètre de la directive n’ont pas été logés à la même enseigne.

Le Parlement s’est vu, en particulier, privé d’un débat et d’un arbitrage politique sur les services sociaux d’intérêt général. Pour ces derniers, le Gouvernement a négocié seul la transposition avec la Commission européenne, sans y associer le Parlement. Il a préféré confier cette tâche à une mission interministérielle, justifiant le choix de cette méthode par l’encombrement du calendrier parlementaire et la contrainte des délais.

En somme, on peut dire que le Parlement n’a été associé au travail de transposition de la directive que sur les éléments les moins polémiques et les moins difficiles, ce qui me paraît très regrettable !

Permettez-moi de dire que les membres du groupe socialiste ne partagent nullement cette façon de voir les choses. Le Parlement n’est ni une chambre d’enregistrement ni une variable d’ajustement sur laquelle le Gouvernement pourrait se défausser quand il l’estime nécessaire. Il revient légitimement à la représentation nationale de traduire dans notre droit les directives communautaires, et de le faire globalement.

Le Parlement est le lieu par excellence d’expression du débat public et des choix opérés au nom du peuple français. Encore faut-il pour cela lui en donner les moyens et adapter le calendrier parlementaire aux exigences communautaires, qui laissaient pourtant trois ans, rappelons-le, soit de 2006 à 2009, pour transposer cette directive.

Mais il est vrai que, aux débats de fond engageant la pérennité de notre modèle social et de notre pacte républicain, le Gouvernement a trop souvent préféré le fait d’engorger dans l’urgence l’ordre du jour des assemblées parlementaires de projets de loi rédigés sous le coup de l’émotion produite par tel ou tel fait divers.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion