Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 12 mai 2010 à 14h45
Transposition de la directive « services » — Discussion d'une question orale européenne avec débat

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Ce principe doit devenir une réalité dans la construction européenne et inspirer aujourd’hui le secteur des services. Le défi de l’année 2010 consiste à instaurer un véritable marché intérieur des services, sans niveler par le bas l’espace social européen.

C’était là une priorité de la présidence tchèque. Par ailleurs, le président de la commission des affaires européennes, Jean Bizet, suit attentivement ce dossier depuis des années.

Il faut avoir à l’esprit le paradoxe suivant : les échanges de services entre États membres ne représentent que 5 % du PIB global et 20 % des échanges totaux, et pourtant ce secteur est la principale force économique de l’Europe, puisque 70 % de son PIB et 68 % de ses emplois en proviennent. Il faut donc le dynamiser.

Dans notre pays, le secteur des services est le premier employeur et, sans doute, le principal gisement d’emplois. Favoriser l’installation d’entreprises étrangères et lever les obstacles protectionnistes faciliteront les échanges de services entre ressortissants des États membres.

Cela a été dit, cette directive a pour objet de favoriser la liberté d’établissement des prestataires de services, leur libre-circulation, mais aussi de procurer la garantie d’un niveau de qualité élevée pour les utilisateurs.

Le guichet unique, qui simplifie considérablement les formalités incombant aux entreprises, est en place, non seulement par voie électronique, mais aussi physiquement par le biais des centres de formalités des entreprises, lesquels sont au nombre de sept en France. N’est-ce pas trop ?

Enfin, la coopération administrative entre États membres vise, certes, à contrôler les activités de services, mais aussi à éviter la multiplication des contrôles, en échangeant efficacement les informations. Là encore, la voie électronique devient une priorité.

Le principe d’une directive repose sur l’obligation de résultat, tout en laissant chaque État libre du choix des moyens de transposition. Heureusement, la France n’a pas choisi de transposer cette directive fondamentale en catimini, par la voie des ordonnances prévue à l’article 38 de la Constitution.

Elle n’a pourtant pas choisi non plus une loi-cadre, solution par ailleurs retenue par l’ensemble des États européens, hormis l’Allemagne. Une telle loi aurait permis un débat pédagogique et constructif sur l’Europe.

La France a donc préféré la transposition pragmatique et graduelle par secteurs, induisant une négociation spécifique à chaque type de service. Cette solution permet aussi, il faut le souligner, d’éviter de relancer la polémique sur la libéralisation des services, dont le mythe du « plombier polonais » a tant marqué les esprits, à l’approche des élections européennes.

La directive fixe aussi une échéance pour la transposition intégrale, en l’espèce, le 28 décembre 2009. Nous sommes le 12 mai : avons-nous rempli nos obligations européennes ?

Avec une inquiétude modérée et contenue, à son image, notre collègue Jean Bizet prévoyait, dans son rapport d’information du mois de juin 2009, que la directive ne pourrait être complètement transposée dans les délais. Il avait vu juste, hélas !

Certes, la France a avancé dans la voie de la transposition, comme l’indique le rapport de synthèse du secrétariat général des affaires européennes du 10 janvier dernier, puisque le dispositif des guichets uniques est créé, des secteurs clés sont ouverts, parmi lesquels celui du tourisme, activité essentielle pour l’économie française.

De plus, des mesures ont été adoptées, dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie, relatives aux sociétés d’exercice libéral, à l’urbanisme commercial ou à la suppression de l’autorisation d’ouverture pour les établissements hôteliers.

De même, la coopération entre États membres, au sens de l’article 39 de la directive, a débuté, notamment par la remise des différents rapports et fiches.

Pourtant, le processus n’est toujours pas achevé. Madame la secrétaire d'État, combien reste-t-il de dispositions à transposer ? Combien sont en cours de transposition ? Quels sont les moyens de transposition choisis par le Gouvernement ? Quelle en sera la communication?

Les membres du groupe du RDSE regrettent que cette forme de transposition, qui donne lieu à l’élaboration d’une multitude de textes d’application, vienne amoindrir le rôle qui aurait pu être celui du Parlement lors d’un débat sur une loi-cadre de transposition À cet égard, je reprendrai à mon compte l’argumentation développée par notre collègue Roland Ries. Ce débat aurait pu être l’occasion de promouvoir l’idée européenne, car, comme vous le savez, « entreprendre vaut mieux que se résigner, et l’attente de la perfection est une piètre excuse pour l’inaction ».

Je ne voudrais pas radoter, madame la secrétaire d’État, mais permettez-moi d’évoquer, une fois encore dans cet hémicycle, la proposition de loi constitutionnelle que j’avais déposée en 2001 et que plusieurs de mes collègues ont cosignée, notamment Hubert Haenel, alors président de la délégation pour l’Union européenne : elle visait à accélérer la transposition des directives en prévoyant qu’une séance mensuelle dans chaque assemblée est réservée à cette fin. Du reste, l’actuelle Constitution le permet, dans la mesure où le Parlement maîtrise désormais une partie de l’ordre du jour. La proposition de loi susvisée a été discutée et votée au Sénat, mais n’est jamais parvenue sur le bureau de l’Assemblée nationale. Ce texte me semble pourtant toujours pertinent.

Madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, l’avenir de notre pays, dont le poids politique est reconnu par tous, se confond avec celui de l’Europe. Européen de toujours, je suis convaincu, comme l’écrivait Robert Schuman voilà déjà soixante ans, que cette « idée Europe […] sera la force contre laquelle se briseront tous les obstacles » !

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