Intervention de David Assouline

Réunion du 4 mai 2006 à 9h30
Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information — Discussion générale

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la discussion que le Sénat ouvre aujourd'hui aurait dû, dans l'esprit du Gouvernement, être close depuis longtemps, dans les premiers jours de l'année 2006 exactement.

En effet, après avoir fait délibérer l'Assemblée nationale à la veille de Noël, M. le ministre pensait pouvoir faire enregistrer le texte par le Sénat au tout début du mois de janvier et, ainsi, avoir adapté le droit d'auteur et ses droits voisins à la société de l'information à peine la trêve des confiseurs achevée.

Mais vu la confusion qui régnait dans les rangs de la majorité au moment où le débat aurait dû être clos, le Premier ministre s'est résigné à suspendre l'examen du texte par les députés. Celui-ci n'a pu reprendre qu'après trois mois de tergiversations de votre part, monsieur le ministre, période qui ne vous a même pas donné l'occasion d'organiser quelque concertation que ce soit, ni avec les professionnels du secteur ni avec les parlementaires. Étiez-vous donc si sûr de votre fait ?

Certes, ce gouvernement a tenté d'imposer au pays et à sa jeunesse le CPE sans chercher à comprendre comment il a pu soulever une telle contestation à l'égard de son action. Dès lors, on voyait mal comment ce même gouvernement aurait pu concevoir qu'un projet qui touche à la vie quotidienne de millions d'internautes et de milliers d'artistes puisse susciter des discussions aussi passionnées que celles qui ont émergé à l'Assemblée nationale au mois de décembre dernier.

Pourtant, en France, le droit d'auteur conserve une dimension historique et révolutionnaire indéniable. Comme l'affirmait Lakanal lors des débats qui aboutiront aux lois fondatrices de 1791 et de 1793 consacrant le droit de représentation et le droit de reproduction, « si quelque chose doit étonner, [...] c'est qu'une si grande révolution que la nôtre ait été nécessaire pour reconnaître le droit d'auteur ».

En tout état de cause, si nos prédécesseurs de 1789 doivent nous apprendre un principe dans l'art de gouverner, c'est que les textes longuement délibérés sont souvent les plus stables car les moins contestés. Ainsi, les lois de 1791 et de 1793 n'ont-elles été profondément modifiées qu'en 1957, puis en 1985. Et souvenons-nous que la réforme de 1957 a été préparée dès 1944 et que celle de 1985 a fait l'objet de trois ans de concertation préalable avant d'être adoptée à l'unanimité durant une législature pendant laquelle les sujets de consensus furent pourtant peu nombreux.

Ce que les révolutionnaires, la IVe République et le gouvernement d'Union de la gauche avaient su faire, ce gouvernement, qui dispose de tous les leviers de commande institutionnels, n'a pas su ou pas voulu le réaliser, contribuant, une fois de plus, à créer les conditions du conflit dans une société qui a décidément besoin de cohésion.

Pourtant, votre prédécesseur et vous-même, monsieur le ministre, avez disposé du temps nécessaire pour ne pas légiférer dans l'improvisation.

Faut-il rappeler que le texte qui nous est soumis aujourd'hui a pour principal objet de transposer une directive européenne relative à l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information qui date du 22 mai 2001 et que le projet de loi initial du Gouvernement a été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 12 novembre 2003 ?

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