Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, j'ai souhaité intervenir dans ce débat afin d'exposer clairement les raisons pour lesquelles la commission des affaires sociales a rendu des conclusions négatives sur la proposition de loi de notre collègue Michel Dreyfus-Schmidt.
Cette position est en effet suffisamment rare - elle est même inédite pour la commission des affaires sociales - pour justifier qu'elle soit expliquée.
Je ne reviendrai pas sur les nombreux arguments techniques présentés par le rapporteur, André Lardeux, qui sont, me semble-t-il, imparables. On ne peut en tirer qu'une seule conclusion : sur le strict plan de leur mise en oeuvre, les propositions qui nous sont faites sont réellement inapplicables en l'état.
Il se trouve que je préside le conseil de surveillance de la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF. À ce titre, en prévision de notre débat de ce soir, j'ai interrogé ses responsables pour connaître leur sentiment sur l'éventualité du partage de toutes les prestations familiales légales que sert la Caisse. Ils m'ont exprimé leurs plus vives réserves.
Pour mémoire, il existe neuf prestations différentes, qui, pour certaines d'entre elles, viennent d'ailleurs d'être évoquées : la prestation d'accueil du jeune enfant, les allocations familiales, le complément familial, l'allocation de logement, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, l'allocation de soutien familial, l'allocation de rentrée scolaire, l'allocation de parent isolé et l'allocation journalière de présence parentale.
Cette énumération montre bien qu'à l'évidence certaines de ces prestations sont par nature « non partageables ».
De plus - je conviens que ce n'est pas un argument décisif, mais le législateur se doit d'en tenir compte -, la gestion des prestations familiales par les caisses d'allocations familiales se trouverait grandement complexifiée si elle devait intégrer le calcul supplémentaire du partage des sommes entre les parents, le contrôle du bien-fondé de leur attribution et le dédoublement des procédures de versement, assortis des frais qui en découleraient forcément.
Cette charge, de surcroît, s'alourdirait au fil des ans avec l'augmentation constatée du taux des divorces et, parallèlement, l'accroissement du nombre des familles recomposées, lequel rendrait encore plus ardu le calcul des droits.
Je vous rappelle que, chaque année, environ 12 000 enfants supplémentaires entrent dans le champ de la garde alternée. On peut aussi évoquer le cas de ceux qui, au bout de quelque temps, retrouvent un mode de résidence plus classique auprès d'un seul parent, au profit duquel il faudrait alors rétablir le paiement intégral des prestations familiales.