Intervention de Jean-René Lecerf

Réunion du 5 mars 2006 à 21h30
Égalité des chances — Articles additionnels après l'article 22

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf, rapporteur pour avis :

À considérer tant les travaux du professeur Amadieu que ceux qui ont été récemment réalisés au sujet de l'apprentissage, ou encore le rapport que M. Fauroux a remis dernièrement à Jean-Louis Borloo, nous constatons l'importance de la discrimination. Et, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, mes chers collègues, nous avons tous l'intention de lutter, le plus efficacement possible, contre ces discriminations. Ce qui va nous opposer, c'est non pas un problème d'objectifs, mais un problème de méthode et de moyens.

La commission des lois et la commission des affaires sociales se sont accordées à reconnaître que nous manquions d'un outil statistique d'évaluation des minorités visibles. Comme l'écrit Roger Fauroux dans le rapport que je viens de citer, « l'une des principales faiblesses du modèle français d'intégration est la cécité qu'il s'impose vis-à-vis de l'origine ethnique et même géographique des individus dont il ne veut connaître que la nationalité. Cet aveuglement volontaire rend en partie caduque, faute de repères chiffrés, une bonne partie de ce qui s'écrit sur les progrès ou les reculs de la diversité dans les entreprises et fournit un prétexte commode à tous ceux qui nient l'existence même d'un problème. »

Je citerai encore Patrick Simon, chercheur à l'Institut national d'études démographiques : « L'invisibilité, qu'elle soit politique ou statistique, ne sert qu'à maintenir tous les plafonds de verre qui défendent la suprématie des majoritaires et s'opposent à une véritable égalité. »

La CNIL n'est pas loin de partager cette opinion, puisque, constatant « l'absence de définition d'un référentiel national de typologies ethno-raciales », elle a estimé que « le principe même de la création d'un tel référentiel devrait être approuvé par le législateur ».

C'est la raison pour laquelle la commission des lois et la commission des affaires sociales proposent de confier à des autorités incontestables telles que la HALDE, l'INSEE et l'INED l'élaboration d'un cadre de référence pour la définition de groupes de personnes à partir de données permettant d'identifier leur appartenance aux minorités dites visibles, tout en s'entourant de garanties : la procédure d'anonymisation définie par la CNIL et l'exclusion des entreprises de moins de 150 personnes dans la mesure où nous ne sommes pas certains du respect de l'anonymisation en dessous de ce seuil.

Je vois bien les objections qui vont m'être opposées et, là encore, je les accepte. Je comprends qu'un certain nombre d'entre vous, mes chers collègues, pour lesquels j'ai de l'estime et de l'affection, craignent que nous ne nous engagions ici sur la voie du communautarisme. C'est leur conviction, ...

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