Intervention de Bariza Khiari

Réunion du 5 mars 2006 à 21h30
Égalité des chances — Vote sur l'ensemble

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne vous cacherai pas ma déception après l'examen de ce texte qui a occupé le Sénat tout au long de ces nuits et de ces jours derniers.

Le titre, pourtant, ne pouvait que nous réjouir, nous laissant imaginer que nous avions, peut-être, une ambition commune. Égalité des chances, cohésion sociale : voilà des termes qui sont chers aux socialistes et qui fondent largement notre engagement.

Malheureusement, l'intitulé ne parvient pas à cacher le contenu d'un texte qui ne tient pas les promesses dont il était porteur. Le projet de loi ne répond pas, dans sa globalité, au défi de l'égalité des chances.

J'espère, comme M. Bel, que les quelques mesures qui ont été adoptées, et que nous avons soutenues, passeront la barrière de la commission mixte paritaire : je pense, notamment, à l'inscription du testing dans la loi, au renforcement des pouvoirs de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et au curriculum vitae anonyme.

Cependant, malgré ces mesures, le projet de loi que vous nous demandez d'adopter ne pourra que renforcer la précarité et les inégalités.

Ce texte ne porte pas bien son nom, monsieur le ministre, ni par ce qu'il propose, ni par ce qu'il ne propose pas.

Vous proposez le contrat première embauche, qui n'a pas tardé à être rebaptisé par certains « contrat précarité exclusion », et pour cause, puisqu'il s'agit ni plus ni moins que de revenir au travail journalier du xixe siècle.

Vous proposez l'apprentissage à quatorze ans. C'est l'abandon de l'ambition républicaine de l'éducation ! Et pourquoi pas à douze ans ? Personne ne nie que l'école a également pour rôle d'amener les jeunes à s'insérer dans la vie professionnelle, mais en instaurant l'apprentissage à quatorze ans, vous ne faites qu'exclure du système scolaire les enfants en difficulté

Ce que vous ne proposez pas, non par oubli mais par un refus déterminé, est tout aussi significatif. Mes collègues et moi-même avons ardemment travaillé pour modifier ce texte, pour obtenir la suppression des mesures régressives que vous vouliez imposer à nos concitoyens, mais aussi pour que quelques avancées soient réalisées.

C'est ainsi que nous avons proposé un certain nombre d'amendements que vous avez refusé d'adopter. Deux exemples, parmi d'autres, montrent bien que l'égalité n'est pas votre priorité.

D'abord, vous ne voulez pas débattre du droit de vote des étrangers aux élections municipales ; ensuite, vous refusez de reconnaître la qualification des médecins étrangers non communautaires. Sur ces deux thèmes, vous avez fait la preuve d'une discrimination d'État.

Vous nous avez présenté ce texte comme étant celui qui devait répondre à la crise des banlieues. J'ai l'impression, monsieur le ministre, que vous n'avez pas bien saisi l'ampleur ni perçu les enjeux de cette crise majeure.

Aux signes de détresse sociale, vous répondez par une précarisation accrue. Au désir d'une égalité qui permettrait d'accéder à la promotion sociale, vous répondez par l'abandon de l'ambition éducative de la République, au risque de renforcer encore le désespoir, la misère et leurs compagnons d'infortune que sont les communautarismes, les intolérances, et les violences.

Comme le disait justement le président Mitterrand, l'égalité des droits est toujours un combat. Ce combat, nous continuerons à le mener.

Je ne saurais conclure sans tout de même exprimer ma satisfaction du retrait des amendements présentés par MM. About et Lecerf, relatifs aux questions du phénotype et des statistiques. Si je partage leur objectif de lutte contre les discriminations, ma conviction est en effet que ces amendements auraient contribué à ethniciser la question sociale.

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