Sûrement pas nous ! Nous, nous nous sommes battus pendant des années pour que cette loi soit votée ; puisqu'elle a été rapportée, nous recommencerons !
À peine la droite était-elle revenue au pouvoir que ce principe démocratique acquis grâce à la loi du 10 juillet 2000 a été remis en cause ! La loi du 30 juillet 2003 réformant l'élection des sénateurs a en effet opéré, de notre point de vue, un important recul.
En effet, l'instauration de la proportionnelle - mode de scrutin selon nous plus juste à tous égards - dans les départements comprenant trois sénateurs a permis l'élection d'un certain nombre de femmes. La proportionnelle garantit la parité et permet de briser les vieilles résistances qui nous n'aboutissent qu'à nous maintenir dans l'inertie. Elle favorise également le renouvellement de la classe politique en empêchant la réélection systématique de personnalités masculines.
Rien dans mon propos n'est tourné contre les hommes, au contraire ! Cet acte solennel de reconnaissance de la parité permet de déployer la dualité et la complémentarité, stimulantes et riches, qui fondent une société d'hommes et de femmes que nous voulons libres, associés et égaux.
Monsieur Gélard, contrairement à vos affirmations, les effets de la proportionnelle se sont immédiatement fait ressentir. Le groupe CRC a ainsi accueilli en 2001 plusieurs sénatrices émanant de départements où le scrutin majoritaire prévalait auparavant : c'est le cas de l'Isère. Dans deux autres départements, la Moselle et la Loire, nous avons été aidés parce que les deux hommes sénateurs sortants se présentaient chacun sur une liste pour contourner la loi sur la parité ; ils ont perdu des voix, et notre groupe en a gagné.
De manière générale, cette avancée de la proportionnelle a permis au Sénat de se féminiser davantage : ainsi vingt-deux sénatrices furent élues en septembre 2001 sur les cent deux sièges renouvelés, alors qu'il n'y avait que cinq sénatrices sortantes.
Les élections sénatoriales de 2001 et 2004 se sont traduites par une augmentation de 20 % du nombre de femmes élues en moyenne dans les départements où le scrutin à la proportionnelle s'est appliqué. En 1992, il y avait seulement 7, 1 % de femmes élues au Sénat et en 2004, 34, 39 %. On estime à cinq le nombre de sièges supplémentaires qui seraient revenus à des femmes si nous étions restés à la proportionnelle dans les départements à trois sénateurs.
Voilà pourquoi il est urgent de revenir à la situation qui prévalait naguère. Je prendrai l'exemple de ma collègue et amie Annie David, qui a été la plus jeune sénatrice : elle risque de ne pas être réélue, après un mandat, en raison de ce retour à la proportionnelle dans les départements élisant au moins quatre sénateurs.
Monsieur Gélard, si le système que nous préconisons ne permet pas d'élire plus de sénatrices, alors, je n'y comprends plus rien !
Nous progressons en réalité à rebours. La majorité des partis politiques traînent les pieds pour présenter des femmes. Il n'est pas plus difficile de les faire élire : il y a longtemps que les femmes n'ont plus à prouver leurs compétences. Mais encore faut-il leur permettre de les exercer !
Il y a quelques jours, un responsable de l'UMP rappelait dans un journal du soir qu'il faut donner la priorité aux députés sortants puis, à leur départ, garder la circonscription, tout en prenant en compte l'avis des militants. À ce compte-là, la parité n'est pas près d'exister !
C'est bien la preuve que la parité n'est pas ressentie comme naturelle, comme consubstantielle à la démocratie, au moins aujourd'hui, alors qu'elle est un droit qu'on croyait acquis depuis l'an 2000 grâce à son inscription dans la Constitution.
Notre groupe, qui est le plus féminisé - nous sommes neuf sur vingt-trois -, le doit à la volonté du parti communiste de promouvoir les femmes. Il le doit aussi à la proportionnelle : toutes, sauf deux, ont été élues grâce au scrutin proportionnel. Monsieur le ministre, vous avez vous-même dit devant la délégation aux droits des femmes que vous en étiez impressionné !