Il me semble nécessaire d'établir un indicateur de l'évolution réelle de l'APD, qui exclurait les annulations de dettes, les frais d'écolage qui ne correspondent pas à des formations d'étudiants pour le développement, les dépenses liées au traitement des demandes d'asile et l'aide en direction des territoires d'outre-mer.
La deuxième faiblesse de ce projet de budget est que l'APD française ne profite pas assez aux pays les plus pauvres.
En effet, seuls quatre pays, sur les dix premiers bénéficiaires de l'APD bilatérale française, font partie des pays les moins avancés, contre cinq pays à revenu intermédiaire ou territoires d'outre-mer. Et si les chiffres sont en augmentation, ils sont là aussi faussés par les annulations de dettes.
La diversification des prêts en faveur des pays émergents, conforme aux orientations stratégiques des CICID - les comités interministériels de la coopération internationale et du développement - de 2005 et de 2006 se fait au détriment de l'aide aux pays les moins avancés, particulièrement en Afrique subsaharienne, et entre en contradiction avec les Objectifs du Millénaire pour le développement. Une réorientation s'impose donc.
Permettez-moi de faire quelques suggestions.
Pour anticiper la fin de l'initiative pays pauvres très endettés et donc la baisse prévisible de l'APD française à ces pays, l'aide publique au développement sous forme de dons à destination des pays les moins avancés et des pays à faible revenu devrait augmenter fortement.
La France devrait également augmenter la proportion de son APD bilatérale affectée aux services sociaux de base, afin de rejoindre la moyenne de l'OCDE et de respecter l'objectif de Copenhague, qui est de consacrer 20 % de l'APD à ces secteurs.
Enfin, la troisième faiblesse de ce projet de budget est que l'aide aux organisations non gouvernementales, les ONG, sur laquelle j'avais attiré votre attention l'an dernier, madame la ministre, reste insuffisante.
Les ONG, acteurs majeurs de la solidarité internationale, ne sont toujours pas considérées à leur juste place dans votre projet de budget. Dans les situations de crises internationales, de plus en plus nombreuses, l'action interétatique est loin d'être toujours suffisante. Elle est parfois inadaptée, trop éloignée du terrain. Le rôle des ONG est alors déterminant.
On ne saurait non plus se passer de la coopération décentralisée des collectivités territoriales, qui est en constante expansion. Je rappelle que seulement 1, 45 % du budget de l'aide publique au développement est géré par les ONG françaises. Ce taux était de 1, 05 % en 2006 et de 1, 09 % en 2005. Si cet effort est appréciable, il est néanmoins normal compte tenu du retard accumulé ces dernières années. Nous demeurons parmi les derniers en Europe et nous sommes encore loin d'atteindre l'objectif de 2, 2 % de l'aide publique transitant par les ONG pour 2009, objectif sur lequel le Président de la République s'est pourtant engagé lors du CICID du 18 mai 2005.
Le soutien aux ONG, qui avait disparu l'année dernière de la présentation comptable des projets annuels de performance, réapparaît cette année, et c'est heureux. Néanmoins, les indicateurs concernant les ONG ne portent que sur des objectifs de rapidité de traitement des dossiers et d'évaluation des dossiers financés, qui peuvent nous renseigner sur les performances de l'administration, mais en aucun cas sur l'objectif de partenariat de l'État avec les ONG en matière d'aide au développement. Je propose donc la création d'un véritable indicateur qui permettrait de mesurer tous les ans la proportion des crédits de l'aide publique au développement transitant par les ONG comme un des objectifs stratégiques.
En conclusion, madame la ministre, une clarification de la présentation du budget de l'APD et une réorientation stratégique vers quelques priorités nous semblent indispensables : aide aux pays les plus pauvres, soutiens aux ONG, partenariat avec les collectivités locales.
Compte tenu de l'absence de garanties sur ces différents points, le groupe socialiste votera contre votre projet de budget.