Intervention de Claude Biwer

Réunion du 5 décembre 2006 à 15h00
Loi de finances pour 2007 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Claude BiwerClaude Biwer :

Monsieur le ministre, dans le temps qui m'est imparti, je souhaite attirer votre attention sur trois sujets : le revenu des agriculteurs et des retraités, la filière bois et l'aménagement rural.

Auparavant, vous me permettrez de vous féliciter pour votre action. J'ai ainsi particulièrement apprécié les résultats obtenus en matière de biocarburant, tant pour notre pays que pour mon département.

S'agissant du revenu des agriculteurs, chacun sait que ceux-ci vivent de moins en moins du fruit de leur travail et de la vente de leurs productions, et de plus en plus d'aides financières émanant de l'Union européenne. Or qui dit aides dit contrôles. À cet égard, la mise en oeuvre des droits à paiement unique, les DPU, n'a évidemment pas arrangé les choses.

Lors de l'examen du projet de loi d'orientation agricole, j'avais suggéré de mettre en place, au lieu des contrôles tatillons et coercitifs que nous connaissons souvent et qui pénalisent parfois des exploitants agricoles n'ayant pas forcément la fibre administrative, des contrôles et des inspections un peu plus intelligents, par le biais d'une évaluation effectuée par des pairs. Ce système, tout en maintenant le principe de contrôles aléatoires, serait bien plus acceptable pour les exploitants.

Par ailleurs, dans mon département, la Meuse, des hectares peuvent se retrouver, pour des raisons diverses, sans DPU. Pourquoi ne pas transférer au niveau départemental la compétence et les moyens permettant de régler de telles situations ?

À ce stade de mon intervention, je souhaite vous faire part des préoccupations plus spécifiques des agriculteurs de la Meuse concernant leur revenu, et ce problème se pose aussi dans d'autres départements.

Les agriculteurs de mon département ont connu cette année une récolte de céréales et de colza moyenne, voire médiocre, une campagne fourragère difficile pour les pâtures, et tout particulièrement pour les maïs, une récolte de mirabelles contrariée par une pluviométrie trop importante courant août, et bien entendu les conséquences des mesures sanitaires prises dans le cadre de la lutte contre la grippe aviaire ou la fièvre catarrhale, qui limitent la commercialisation des viandes.

Jeudi dernier, lors de la séance des questions d'actualité, je vous ai interrogé sur ce dernier point, monsieur le ministre, et vous m'avez alors apporté quelques précisions. La situation n'en demeure pas moins difficile dans mon département.

En Meuse, on considère désormais qu'une exploitation sur cinq est en situation fragile, ce qui peut s'expliquer aisément puisque les gains de productivité ne permettent plus de compenser la baisse des prix et l'augmentation structurelle des charges. Ainsi, depuis 2001, le montant moyen des aides par exploitation dépasse le niveau de leur résultat courant.

Cette très grande dépendance des agriculteurs meusiens aux aides communautaires les rend d'autant plus sensibles à la réforme des aides : 4 % de modulation sur toutes les aides en 2006, puis 5 % à partir de 2007, auxquels s'ajoute 3 % de prélèvement annoncés sur la valeur initiale des DPU, c'est autant de revenu en moins pour les agriculteurs.

S'agissant du plan de modernisation des bâtiments agricoles, 21 dossiers restent à engager d'ici à la fin 2006 en Meuse, lesquels nécessitent une aide financière de l'État d'autant plus urgente qu'ils ont été déposés en 2005 : les travaux ont démarré, mais ils pourraient perdre leur éligibilité, faute d'enveloppe suffisante.

Par ailleurs, ma région n'est malheureusement pas épargnée par la fièvre catarrhale. Il a donc fallu mettre en place de grands périmètres au sein desquels les animaux sont bloqués. Quant aux marchés à l'export, ils sont durablement inaccessibles.

Je sais, monsieur le ministre, que vous n'êtes pas insensible à ce problème. Vous m'avez d'ailleurs fait part, jeudi dernier, des difficultés rencontrées pour le régler mais aussi des mesures nationales prises en faveur des éleveurs. Face à cette crise, il serait bon que la solidarité européenne puisse jouer, afin que les pertes des éleveurs soient prises en charge et qu'un statut particulier de « zone de fièvre catarrhale » soit reconnu. Dans ce contexte, je vous ai demandé d'envisager la mise en place d'une assurance élevage, à l'instar de l'assurance récolte. Monsieur le ministre, quelles mesures envisagez-vous de prendre à cet égard ?

S'agissant des retraites agricoles, force est de reconnaître que des progrès ont été réalisés au cours des dernières années : la mensualisation de leur versement, la mise en place de la retraite complémentaire obligatoire, les départs à la retraite facilités au terme de carrières longues. Mais il subsistait encore un certain nombre d'injustices. Cependant, au cours de l'examen de votre budget à l'Assemblée nationale, un effort a été fait en faveur des « petites » retraites, et je vous en félicite.

Monsieur le ministre, il faudra sans doute aller plus loin, notamment veiller à la montée en puissance de la retraite complémentaire obligatoire et se préoccuper de l'extension de celle-ci aux conjoints et aux aides familiaux.

En ce qui concerne la filière bois, il ne vous aura pas échappé, au cours de votre récente visite en Meuse, dont je vous remercie de nouveau, qu'il s'agit d'un département forestier et il a beaucoup souffert des conséquences de la terrible tempête de 1999.

La situation s'améliore progressivement, mais des efforts sont encore nécessaires afin d'effacer totalement les séquelles de ce traumatisme. À cet égard, pouvez-vous me confirmer que les objectifs et le calendrier du Programme forestier national, le PFN, seront bien respectés et que les dossiers présentés par les propriétaires sylviculteurs pourront être honorés en temps et en heure ?

Je voudrais enfin évoquer, en quelques phrases, l'aménagement rural, qui n'est pas une notion neutre dans un département comme le mien, encore très rural et dont la densité de population est relativement faible, moins de 30 habitants au kilomètre carré. Vous avez bien voulu, et je vous en remercie, y labelliser deux pôles d'excellence rurale dès la première désignation, ce qui constitue une marque de confiance à laquelle nous avons été très sensibles : d'autres devraient suivre.

Certains secteurs du département de la Meuse sont, par ailleurs, classés en zone de revitalisation rurale, ZRR, ce qui prouve à quel point ils méritent attention, aide et soutien. Mais force est de reconnaître qu'il est toujours aussi difficile, malgré ces classements et nos efforts soutenus, de convaincre des chefs d'entreprise de venir développer leur activité dans notre région, d'autant qu'elle est directement concurrencée par le Luxembourg, pays très accueillant pour les entreprises.

Fort de ce constat, j'ai déposé récemment sur le bureau du Sénat une proposition de loi autorisant la création, dans les ZRR, de « zones franches rurales ». Les entreprises commerciales, artisanales ou industrielles qui s'y installeraient pourraient ainsi bénéficier des exonérations fiscales déjà en vigueur dans les ZRR, auxquelles s'ajouteraient les exonérations de charges sociales s'appliquant dans les zones franches urbaines. Ce serait le meilleur moyen de redynamiser les ZRR, qui en ont grand besoin.

Enfin, je suis très étonné de constater que les pôles d'excellence ruraux ne figureront pas dans les futurs contrats de projets État-régions pour la période 2007-2013. Je vous ai récemment écrit à ce sujet, monsieur le ministre, souhaitant que le Gouvernement revienne sur cette décision, qui ne va pas dans le sens de la prise en compte du nécessaire développement des zones rurales.

Monsieur le ministre, la politique menée par le Gouvernement dans votre domaine de compétence va incontestablement dans le bon sens. Vous avez, par ailleurs, toujours été à l'écoute des parlementaires et particulièrement respectueux à leur égard, et je vous en remercie. Bien évidemment, je soutiendrai, avec mes collègues du groupe de l'Union centriste-UDF, votre budget.

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