Madame la ministre, vous connaissez les réticences de mon groupe – c’est un euphémisme – sur la possibilité ouverte par la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, que votre majorité a adoptée, de déléguer des missions de service public à des opérateurs privés.
Avec mes amis, nous avions souligné, à l’époque où cette loi fut discutée au Parlement, les risques multiples que comportaient ces délégations : risque de « vente à la découpe » des missions de service public, risque de marchandisation de la santé publique, risque de fragilisation des hôpitaux publics, même s’ils sont regroupés en communautés hospitalières de territoire. Les Français pourraient en être les premières victimes.
Nous ne pouvions laisser croire à nos concitoyens que les cliniques commerciales allaient accepter de manière pérenne de prendre en charge « à perte », sur le plan financier, les situations les plus complexes et les plus coûteuses, qui sont le lot commun des hôpitaux publics.
Nous insistions sur le maintien d’une garantie fondamentale, qui fait l’honneur de l’hospitalisation publique française : l’égal accès aux soins pour tous, des plus pauvres comme des plus riches.
Or, depuis plusieurs mois, des campagnes de presse se développent dans les médias, orchestrées par l’hospitalisation privée à but lucratif. Elles obéissent à une logique de dénigrement caricatural des hôpitaux publics ou s’inscrivent dans une stratégie plus insidieuse, qui tend à banaliser le service public hospitalier en laissant entendre que tous les acteurs de santé exercent peu ou prou de la même manière, qu’il s’agisse ou non de missions de service public, mais que les cliniques à but lucratif le font à un moindre coût.
Ces campagnes répétitives aident, selon nous, le Gouvernement à justifier auprès de l’opinion publique le démantèlement des missions du service public de santé ainsi que sa politique sans précédent de suppressions massives d’emplois médicaux et non médicaux dans les hôpitaux publics. En ce qui concerne l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, l’AP-HP, par exemple, 3 500 suppressions d’emplois sont prévues d’ici à 2012. Cette politique est totalement inacceptable pour les malades, pour le personnel et pour la grande majorité de la population.
Il n’est pas possible de laisser prospérer ce discours insidieux.
Je vous demande donc, madame la ministre, de bien vouloir nous apporter des explications précises sur ces plans de suppressions massives d’emplois dans les hôpitaux publics, et de nous confirmer que vous n’autoriserez la délégation des missions de service public à des opérateurs privés que dans les cas de carence dûment constatés de l’hospitalisation publique.