Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 17 décembre 2010 à 9h30
Loi de finances rectificative pour 2010 — Article 20

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Monsieur le président, il s’agit de demander qu’un bilan financier de l’opération soit fourni au Parlement un an après la mise en œuvre complète du dispositif.

S’agissant de la mise en place de l’écotaxe poids lourds, nous avons trois inquiétudes, auxquelles j’ai d’ailleurs fait référence lors de la discussion générale.

La première est relative à la date d’entrée en vigueur. En effet, l’expérimentation prévue par la loi pour une durée de deux ans en Alsace n’a pas vraiment commencé, et le Gouvernement a déjà annoncé le report de la généralisation à l’ensemble du territoire de la mesure. La date demeure floue. Je n’ai pas de réponse : les professionnels parlent de 2013, alors que les dernières déclarations gouvernementales évoquaient plutôt la mi-2012.

Nous aurions vraiment tort de nous priver de cette innovation fiscale. En effet, après quelques « ratés », nos voisins allemands l’ont mise en place. Il est beaucoup question de l’harmonisation fiscale avec l’Allemagne : je peux donc vous indiquer que cette taxe a rapporté 4 milliards d’euros en Allemagne, ce qui n’est pas négligeable.

Notre deuxième crainte réside dans l’utilisation des recettes issues de l’application de cette écotaxe. Si le produit de cette dernière devrait, d’après les estimations, se situer à un niveau bien inférieur à celui qui est constaté en Allemagne, il devrait néanmoins être d’environ 500 millions d’euros en 2012, puis d’1, 3 milliard en année pleine. Une partie de cette ressource devait être affectée à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, en remplacement de la subvention de quelque 974 millions d’euros, actuellement versée par l’État.

Ainsi, le produit qui reviendrait à l’AFITF devrait être proche de 880 millions d’euros. L’AFITF disposerait donc paradoxalement de moyens financiers inférieurs à ceux qu’elle détient actuellement. Par conséquent, l’écotaxe ne permettrait nullement de renforcer les infrastructures, notamment routières !

Si le produit dont devrait bénéficier l’AFITF est inférieur à la dotation actuelle, il y a bien un problème.

Enfin, le troisième problème est directement abordé par notre amendement : il s’agit de la question de la rémunération du prestataire qui sera chargé de la réalisation, de l’exploitation et de la maintenance du dispositif.

Les dispositions prévues – elles doivent être sécurisées par l’article 20 – permettent en effet d’alléger le travail qui revient à l’administration des douanes. Le dispositif mérite à ce titre une rémunération par l’État, dès lors que la réalisation, l’exploitation et la maintenance sont confiés au secteur privé. Mais il ne faudrait pas que la rémunération du prestataire entraîne une perte de ressources pour les départements, qui bénéficient du solde du produit de l’écotaxe.

Voilà quel est notre problème.

Les collectivités territoriales gèrent et maintiennent les conditions opérationnelles de près de 400 000.kilomètres d’infrastructures routières – dont une grande partie est empruntée par les poids lourds, soucieux d’éviter les péages autoroutiers – depuis la décentralisation, en 2004, de quelque 18 000 kilomètres de voirie nationale.

En conséquence, nous demandons que, quelle que soit la date de mise en œuvre de la taxe poids lourds, un bilan financier soit dressé de manière que le Parlement dispose d’une bonne information afin de pouvoir évaluer l’efficacité de ce dispositif. Nous demandons ainsi, en quelque sorte, une clause de rendez-vous.

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