Intervention de Dominique Bussereau

Réunion du 5 décembre 2006 à 21h45
Loi de finances pour 2007 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Dominique Bussereau, ministre :

Vous aurez saisi mon allusion à une région que nous connaissons bien !

J'en viens aux pôles d'excellence rurale, qui fonctionnent bien.

Une première vague de 176 pôles ont été labellisés. J'indique pour M. Mouly que la commission qui choisira la deuxième liste des pôles d'excellence rurale se réunira jeudi matin et que nous avons obtenu du Premier ministre la possibilité de créer des pôles supplémentaires. Nous devions en avoir 300 ; nous en avons labellisé 176 ; il en restait 124. Le Premier ministre nous a autorisés à en labelliser 200, avec un objectif de participation de l'État inchangé. Ces pôles seront donc choisis jeudi par une commission dont de nombreux élus font partie.

J'indique à M. Biwer que, même s'ils ne sont pas dans les contrats de projets État-régions, ces pôles d'excellence rurale seront soutenus.

Toujours au titre des mesures de modernisation, j'ai indiqué tout à l'heure que les aides à la mécanisation en montagne seraient bien inscrites dans le plan de développement rural.

De même, dans le cadre du plan de modernisation des bâtiments d'élevage, les spécificités des zones de montagne seront maintenues.

Le soutien au pastoralisme est renforcé, et nous avons établi un plan spécifique pour le massif pyrénéen.

La politique d'installation a été évoquée par plusieurs d'entre vous, en particulier par MM. Pastor et de Montesquiou.

Nous allons poursuivre l'effort particulier engagé en faveur des jeunes agriculteurs. En première partie du projet de loi de finances, a été proposée une mesure visant à exonérer totalement d'impôt sur le revenu la « dotation jeune agriculteur ». Nous avons d'ailleurs fait en sorte, vous le savez, monsieur Piras, que cette dotation soit versée en une seule fois.

S'agissant des prêts bonifiés aux jeunes agriculteurs, j'aurai l'occasion d'y revenir, puisque M. Bourdin a l'intention de présenter, au nom de la commission des finances, un amendement sur ce sujet, qui nous permettra d'en débattre. C'est un outil auquel nous croyons beaucoup et, à la demande d'ailleurs des jeunes agriculteurs, nous avons diminué les taux, maintenant de 1 % en zone défavorisée et de 2, 5 % en zone de plaine.

Je précise à l'attention de M. de Montesquiou, qui a évoqué le FICIA, que les mesures d'accompagnement à l'installation sont rendues éligibles aux contrats de plan État-régions.

Il est exact qu'au vu de la moindre attractivité des prêts bonifiés nous avons décidé une mise en extinction progressive de ces prêts, avec une période de transition. Toutefois, monsieur Bourdin, cela ne remet pas en cause les « prêts calamités ».

Le dispositif de cautionnement, qui a été évoqué par M. de Montesquiou, continue de fonctionner. Nous travaillons sur le « stage six mois ».

Plusieurs d'entre vous ont évoqué les crédits de l'enseignement agricole, dont il a déjà été question au sein de la Haute Assemblée. Ils constituent une priorité pour l'action du Gouvernement. Le décret que vous attendez, monsieur Doublet, est actuellement dans le circuit interministériel des signatures.

Plusieurs d'entre vous, notamment MM. Gaillard et Bailly, ont évoqué la forêt et le nouveau contrat entre l'État et l'Office national des forêts.

Nous avons décidé de dégager des moyens supplémentaires afin de moderniser la filière forêt-bois, pour laquelle une hausse sensible des crédits est prévue.

J'indique à Mme Didier que les aides aux propriétaires forestiers et aux professionnels sont maintenues compte tenu de la faible rentabilité de ce secteur.

J'ajoute que, mises bout à bout, les mesures votées dans le cadre de la loi d'orientation agricole sur l'abaissement de la TVA pour l'utilisation du bois-énergie, et la disposition concernant les réseaux de chaleur, qui a été introduite dans la loi Borloo sur le logement à la suite de l'adoption d'un amendement présenté par M. Claude Belot, forment un ensemble cohérent qui rend de plus en plus intéressant pour les collectivités et pour les particuliers l'utilisation du bois comme énergie.

Nous évoquerons tout à l'heure la politique en faveur du cheval lors de l'examen d'un amendement présenté par M. Joël Bourdin, au nom de la commission des finances.

J'en viens maintenant à la pêche.

Je remercie MM. Gérard Delfau et Joël Bourdin d'avoir souligné que nous accordions à la pêche une place importante dans ce projet de budget. Mmes Yolande Boyer et Evelyne Didier s'en sont également fait l'écho.

Les crédits sont presque doublés par rapport à 2006, afin, comme vous l'avez indiqué, madame Boyer, de financer le plan d'avenir pour la pêche.

Ce plan fixe le cap : nous souhaitons maintenir une pêche performante en France ; d'autres pays européens ont fait le choix inverse.

La question est difficile, et chacun ici connaît les problèmes de gestion de la ressource ou les problèmes d'énergie. Cela implique de mener des réformes de structure. L'objet du plan d'avenir pour la pêche est de supprimer les surcapacités et de nous permettre d'atteindre nos objectifs internationaux en termes de protection de la ressource.

J'en viens aux questions de M. Delfau et à celles de Mme Boyer.

Le fonds européen pour la pêche, le FEP, vous l'avez à juste raison noté, est moins intéressant aujourd'hui que ne l'était l'instrument financier d'orientation de la pêche, l'IFOP, mais le contexte européen a évolué avec l'arrivée de nouveaux États membres, qui ont pris une part importante de ces crédits.

Si l'on exclut les aides à la construction, interdites depuis 2005, la baisse n'est plus que de 12 %. En outre, nous avons obtenu que les besoins des DOM, encore très importants, puissent continuer à être pris en compte pendant la période 2007-2013.

Pour absorber cette baisse, nous aurons à mieux gérer nos dossiers et à réserver les aides à la sortie de flotte en cas de nécessité absolue.

S'agissant des contrôles, la France avait été condamnée, pour une politique menée il y a quinze ou vingt ans, à payer une astreinte. Je confirme à la Haute Assemblée que, le 23 novembre dernier, la Commission européenne a notifié à la France la levée de cette astreinte de 57, 7 millions d'euros. Les efforts entrepris par les pouvoirs publics, mais aussi et surtout par les pêcheurs, ont ainsi été reconnus.

Je tiens à remercier les pêcheurs, qui ont joué le jeu, malgré les difficultés que les contrôles ont suscitées dans leur vie quotidienne. Je remercie aussi tous les services qui ont contribué à créer un dispositif de contrôle équitable.

La charte de contrôle a en effet permis de trouver une manière de travailler juste et équitable, sous l'autorité des CROSS, les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage, évitant ainsi aux équipages l'acharnement administratif qui aurait pu résulter d'une succession de contrôles, d'abord des affaires maritimes, puis de la gendarmerie maritime et enfin des douanes. Les contrôles effectués, tant les nôtres que ceux qui ont été diligentés par l'Union européenne, ont montré que les taux d'infraction à la pêche dans notre pays étaient très faibles et que la quasi-totalité des professionnels respectaient les règles.

Vous trouverez donc dans ce budget des crédits destinés au contrôle, mais, sachez-le, nous ferons en sorte que tout continue de se dérouler dans un esprit de justice et d'équité.

À la suite de la conférence de Dubrovnik, une négociation très difficile sur la répartition des quotas du thon rouge nous attend à Kobe, au Japon, en février. Je l'ai déjà dit, monsieur Delfau, l'accord accepté par la Commission à Dubrovnik n'est pas juste : outre qu'il touche beaucoup la pêche française, notamment les petits métiers méditerranéens - je pense aux senneurs -, il ne va pas assez loin dans la lutte contre la pêche illégale. Dans quelques jours, je m'entretiendrai avec les professionnels pour voir comment gérer ces nouvelles règles.

Je m'attends à un conseil des ministres de la pêche difficile, compte tenu des propositions annoncées aujourd'hui par la Commission sur l'anchois, sur le cabillaud, sur la sole, sur la langoustine. Les négociations de fin d'année menacent d'être particulièrement délicates.

J'en viens à l'ostréiculture, en ce jour où, sur l'initiative de leur président, vos collègues de l'Assemblée nationale ont participé à une dégustation d'huîtres de tous les bassins. Y étaient présents, naturellement, les ostréiculteurs d'Arcachon, ceux d'Étel, touchés cet été, ceux de l'étang de Thau, souvent touchés, hélas, eux aussi.

Nous avons débloqué des aides d'urgence importantes. Les ostréiculteurs ont accepté notre proposition de lancer, avant les fêtes, une campagne nationale télévisée d'un budget de plus de 1 350 000 euros sur l'intérêt de la consommation des huîtres.

À l'échelon international, nous aurons d'abord à faire en sorte de consolider la réforme de la politique agricole commune de 2002-2003. De temps en temps, j'entends en effet certains à la Commission prétendre que le rendez-vous pour 2008-2009 serait un moment, non pas simplement d'appréciation, mais bien de remise en cause de la PAC.

Non, mesdames, messieurs les sénateurs, tout cela n'est que divagation, il n'est pas question d'imposer à nos agriculteurs, qui viennent à peine de commencer à se familiariser avec la mise en oeuvre de la PAC 2002-2003, de repartir, en 2008-2009, dans une autre réforme ! Si réflexion il doit y avoir, commençons à nous intéresser au financement, au chèque britannique, en particulier ! Mais, rappelons-le, la date butoir pour la PAC, c'est en 2013, et aucune inflexion ne peut être acceptée par aucun gouvernement avant cette échéance !

J'en viens à l'OMC, affaire difficile, puisque les négociations sont suspendues depuis la fin du mois de juillet. Pascal Lamy se donne beaucoup de mal pour qu'elles reprennent. Après tout, pourquoi pas, en effet, une négociation multilatérale ?

Quel est l'état des lieux ? Aux États-Unis, la situation politique est particulière, avec une administration républicaine et un Congrès démocrate. Il faut donc voir d'abord comment les États-Unis parviennent à se mettre d'accord entre eux pour nous faire des propositions. Pour l'instant, ils demandent à l'Europe de baisser la garde, sans accepter eux-mêmes la moindre mesure nouvelle sur l'accès aux marchés.

Donc, nous verrons bien comment les choses évoluent, mais la France n'a pas l'intention de changer de position.

Je rappelle à la Haute Assemblée qu'au sein de l'Union européenne une majorité très nette se rallie à la position française, refusant de nouvelles concessions unilatérales et considérant que l'agriculture n'a pas à être une variable d'ajustement de l'OMC. Pour que nous acceptions de moduler nos propositions sur l'agriculture, encore faudrait-il que d'autres fassent évoluer les leurs sur les services, sur l'industrie.

J'ajoute enfin que le cycle de Doha, tel qu'il a été conçu en 2001, est fait pour le développement, c'est-à-dire pour aider les plus pauvres à accéder à nos marchés. L'esprit des accords de Doha, ce n'est ni d'ouvrir nos marchés aux latifundiaires brésiliens ou argentins, ni de réserver les avantages aux plus développés.

Rassurez-vous, monsieur Raoult, sur ce sujet, nous resterons très vigilants, très mobilisés. L'agriculture, ce n'est pas l'ultralibéralisme, et j'en appelle d'ailleurs à tous les socialistes qui, au-delà de la France, exercent en Europe des responsabilités importantes, pour qu'ils manifestent plus de solidarité envers la position du Gouvernement.

S'agissant du FEADER, le programme de développement rural hexagonal 2007-2013 vient d'être finalisé et transmis à la Commission européenne. Il est conforme aux souhaits de M. Pastor en matière de développement rural.

Mais on ne saurait anticiper sans moderniser le ministère lui-même et sans rechercher la simplification administrative.

La modernisation de ce ministère au service des agriculteurs passe par la réforme des offices d'intervention, que M. Girod a évoquée tout à l'heure. L'efficacité dont nous avons fait preuve dans le paiement des DPU montre que les fonctionnaires de nos offices ont fait, avec ceux du ministère de l'agriculture, un excellent travail. Nous poursuivons, dans huit départements, l'expérimentation de la fusion des DDA avec les DDE, mais nous en sommes encore au stade de l'expérimentation et il ne s'agit pas aujourd'hui d'imposer cette fusion partout.

MM. Doublet et de Montesquiou m'ont interrogé sur la simplification. Dans certains départements, les téléprocédures ont connu un succès extraordinaire. Nous devons poursuivre sur la voie de la simplification, notamment pour essayer de diminuer « l'impôt paperasse ».

S'agissant des contrôles dans les exploitations, évoqués par MM. Biwer, Girod, Le Cam et Vasselle, j'ai souhaité que, sous l'autorité des préfets, ils se déroulent dans de bien meilleures conditions.

Le dispositif de diagnostic accompagné, qui a pris son envol, permet une sorte d'autodiagnostic des exploitants pour mieux appréhender un éventuel contrôle, voire pour le rendre inutile.

Nous mettrons en place la conditionnalité 2006-2007 avec la même souplesse que pour la conditionnalité 2005, afin que les agriculteurs ne soient pas sanctionnés dès la première erreur.

Ce budget traduit un effort sur la masse salariale du ministère. Monsieur Bourdin, le niveau des crédits me paraît bon. Nous n'avons pas été confrontés en 2006 à une insuffisance de nos crédits de titre 2 en 2006 ; nous avons parfois eu des problèmes de répartition entre programmes. Nous avons fait en sorte que cette répartition soit réajustée en 2007 pour éviter le risque de sous-budgétisation.

Le ministère et ses personnels font tous les efforts nécessaires pour être à la disposition des agriculteurs et des pêcheurs.

Ce budget est un outil important dans la conduite de nos politiques agricoles et de la pêche. Ce n'est pas le seul instrument que nous devons mobiliser, mais j'espère qu'il contribuera de façon efficace à la réussite de l'agriculture et de la pêche françaises, et je demande à la Haute Assemblée de bien vouloir l'adopter.

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