Monsieur le rapporteur, l'argument que vous m'avez opposé et selon lequel notre proposition ne figure pas dans le rapport de la commission d'enquête ne tient pas. En effet, si cette commission a formulé quatre-vingts propositions, elles n'ont pas toutes été reprises. Pour ma part, je vous propose une mesure qui vise à renforcer les droits de la défense. Ne me rétorquez pas, pour vous y opposer, qu'elle n'a pas été suggérée par la commission d'enquête ! Pour des raisons qui vous concernent, vous ne souhaitez pas l'adoption d'une telle mesure, c'est tout !
Avec l'amendement n° 71 rectifié, nous abordons, une nouvelle fois, la question de la présence de l'avocat.
Les avocats ne sont admis, pendant la garde à vue, que depuis 1993. Mais leur rôle a été limité par les textes, tout autant que le moment de leur arrivée, qui a fait l'objet de nombreuses modifications législatives, comme chacun le sait.
En 1993, les avocats ne sont admis qu'à partir de la vingtième heure. Il n'était donc pas rare de voir des gardes à vue prendre fin au bout de la dix-neuvième heure.
La loi du 15 juin 2000 a institué un bouleversement en permettant à l'avocat d'être présent dès le début de la garde à vue ainsi qu'à l'issue de la vingtième heure.
Hélas ! - et c'est désormais une habitude - si la loi Perben II a bien conservé la présence de l'avocat dès le début de la garde à vue, elle a non seulement supprimé son intervention à la vingtième heure, mais aussi retardé cette assistance dans les affaires de terrorisme, de blanchiment d'argent ou de grande criminalité. Dans ces derniers cas, la première intervention de l'avocat ne peut avoir lieu qu'à l'issue de la trente-sixième heure de garde à vue.
Par conséquent, compte tenu des amendements que nous avons déjà défendus et qui tendent à renforcer les droits de la défense, vous comprendrez pourquoi nous avons tenu à réécrire l'article 63-4 du code de procédure pénale, afin de supprimer les dispositions introduites par la loi Perben II.
Selon nous, ce dernier texte traduit une défiance à l'égard de l'avocat, suspecté de nuire à la spontanéité de l'enquête et à la manifestation de la vérité. L'avocat peut, par exemple, rappeler à son client que celui-ci a le droit de garder le silence. Il a d'ailleurs tout intérêt à le faire puisque les policiers ne sont plus soumis à l'obligation d'informer de ce droit la personne gardée à vue. Il est donc important que l'avocat soit présent pour l'en informer. Ou alors, il aurait fallu adopter notre amendement précédent.
Il convient de rappeler les conditions de la garde à vue, qui ne visent souvent qu'à déstabiliser la personne afin de lui extorquer des aveux. La pression est telle que certaines personnes mises en cause avouent des faits qu'elles n'ont pourtant pas commis.
L'enregistrement audiovisuel prévu à l'article 6 est certes une mesure intéressante, mais elle ne peut remplacer la présence de l'avocat. Cette présence permet, incontestablement, de renforcer les droits de la défense et le caractère contradictoire de la procédure pénale, ce qui est précisément l'objet du chapitre III du projet de loi.
Plus l'intervention de l'avocat sera fréquente, plus tôt la défense pourra agir sur l'orientation initiale de l'enquête, qui a bien évidemment des conséquences sur l'instruction.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous voulons rétablir ce droit fondamental pour la personne placée en garde à vue, quoi qu'elle ait fait.