Encore une fois, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, je crains que vous ne mesuriez pas l'intérêt de l'enregistrement pour la suite de l'instruction.
L'on est obsédé par l'idée qu'il s'agit d'un moyen de contrôle et de suspicion à l'égard des officiers de police judiciaire. Or il est très important de pouvoir consulter l'enregistrement, notamment dans le cadre d'instructions qui durent, comme en matière de terrorisme, quatre, cinq, voire six ans, et qui voient se succéder plusieurs magistrats instructeurs.
Il va de soi que les juges doivent y avoir accès. Mais vous savez comme moi que la règle du jeu, en matière d'instruction, c'est que tous les éléments mis à la disposition du juge soient également mis à la disposition des parties : ce sont des droits élémentaires de la défense.
Le juge d'instruction, pas plus que le ministère public, d'ailleurs, ne peut se forger une conviction à partir d'éléments que la défense pourrait ignorer. Nous ne proposons rien de plus !
Vous semblez ne pas comprendre l'intérêt qui peut s'attacher au visionnage de l'enregistrement lui-même, quelques années après sa réalisation.
Nous ne sommes plus dans le cadre spécifique de l'enregistrement d'un mineur victime de violences que l'on ne veut pas traumatiser par une nouvelle audition. Il s'agit d'une instruction. Un enregistrement a eu lieu dans une unité de police. Le magistrat instructeur l'a visionné. Un autre magistrat lui succède et veut le visionner également. Il est normal que la défense y ait accès.
Vous ne pouvez pas affirmer que, dès l'instant qu'un avocat a communication d'une pièce, celle-ci est rendue publique, au mépris des devoirs de ce dernier et des règles de déontologie du code de procédure pénale ! Vous ne pouvez pas non plus instaurer un système dans lequel des pièces ne seraient pas accessibles à la défense dès l'instant que le magistrat instructeur en a connaissance.
Nous sommes tous d'accord sur ce point. Nous devons donc en tirer les conséquences, en tenant compte des progrès techniques réalisés.