Intervention de Roland Courteau

Réunion du 16 février 2011 à 14h30
Panneaux d'agglomération en langue régionale — Discussion d'une proposition de loi

Photo de Roland CourteauRoland Courteau, auteur de la proposition de loi :

On peut également s’interroger sur la deuxième raison invoquée par le juge et plus particulièrement sur la portée de la référence à des circonstances particulières ou à l’intérêt général.

On doit surtout s’interroger sur les conséquences d’une telle condition mise en avant par le juge, condition qui ne manquerait pas d’entraîner nombre de contentieux.

Je ferai d’ailleurs remarquer que nous ne faisons pas la même lecture de la décision du Conseil constitutionnel du 29 juillet 1994. En effet, l’analyse des considérants nous permet d’indiquer que rien, dans cette décision, ne subordonne à l’existence de « circonstances particulières » ou d’un « intérêt général », la mise en œuvre de la faculté d’installer, sur la voie publique, des inscriptions en langue régionale.

Au contraire, les considérants 11 et 12 de la décision laissent entendre que, sur la voie publique, il ne peut être imposé, sous peine de sanctions, l’usage réglementaire de certains mots « en tant qu’ils s’appliquent à des personnes autres que les personnes morales de droit public et les personnes privées dans l’accomplissement d’un service public. »

Quant à l’absence de fondement historique évoquée par le tribunal administratif, je précise que les formes correctes de toponymie sont attestées par l’usage des locuteurs dont témoignent les pratiques courantes et les atlas linguistiques. On les trouve dans les cartes, les chartes, la littérature et les cadastres. Ainsi, la forme Vilanòva de Magalona est attestée dès 1419. Dès lors, comment peut-on dire que cet usage n’est pas assez ancien ?

Mais passons ! D’une façon plus générale, aucun cadre juridique restreignant l’utilisation de traductions, tel que celui qui a été évoqué par le tribunal administratif, n’est, à notre avis, mentionné dans la décision du Conseil constitutionnel du 29 juillet 1994.

En fait, si un tel jugement a pu être rendu par le juge administratif, c’est en raison d’une loi peu précise sur le point qui nous préoccupe ou, si l’on préfère, en raison de l’absence d’un cadre législatif strict ne laissant aucune place à une interprétation controversée.

Pour être plus précis, je dirai que si, selon les termes de l’article 3 de la loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française, « Toute inscription ou annonce apposée ou faite sur la voie publique, dans un lieu ouvert au public ou dans un moyen de transport en commun et destinée à l’information du public doit être formulée en langue française », l’article 21 de la même loi précise, en revanche, que les dispositions du texte « s’appliquent sans préjudice de la législation et de la réglementation relatives aux langues régionales de France et ne s’opposent pas à leur usage. »

L’interprétation de cette combinaison de textes semble a priori impliquer la possibilité, pour les communes, d’installer des panneaux d’entrée d’agglomération en langue régionale.

Remarquons, toutefois, que, faute de textes législatifs plus précis, nous en sommes, nous-mêmes, réduits à interpréter la loi. En effet, ni la loi du 4 août 1994 ni aucun autre texte législatif ne mentionnent clairement la possibilité, pour les communes, de choisir d’installer des panneaux d’entrée ou de sortie d’agglomération bilingues.

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