Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, je voudrais évoquer le contexte juridique et historique dans lequel se situe la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui.
Ce contexte permet d’expliquer de multiples initiatives parlementaires prises aujourd’hui, aussi bien par des députés que par des sénateurs, pour légiférer sur les langues régionales. Je suis d’ailleurs coauteur de l’une de ces propositions de loi.
La question des langues régionales est très ancienne et suscite toujours un vif débat.
Depuis la Révolution, et surtout à partir du xixe siècle, les pouvoirs publics ont voulu apprendre le français à tous les citoyens. La langue française était garante de l’unité de notre pays ; elle permettait une République égalitaire offrant à chacun l’accès à l’instruction publique et la possibilité d’une progression sociale.
Les moyens employés par l’école pour parvenir à cette unicité de la langue ont été douloureusement ressentis, ce qui explique en partie que le sujet soit si sensible.
La première génération, après avoir difficilement acquis le français sur les bancs de l’école, a voulu épargner cette épreuve à ses enfants en les éduquant en français.
Les langues régionales ont commencé leur déclin. Voilà cent cinquante ans, au moins 90 % des communes du Var ou du Finistère étaient déclarées non francophones. Les enquêtes dont nous disposons aujourd’hui ont révélé des taux de locuteurs de langue régionale atteignant en moyenne 10 %, auxquels il faut ajouter les 40 % des personnes qui la comprennent mais ne la parlent pas.
La transmission familiale des langues régionales n’est guère plus assurée aujourd’hui avec la disparition des dernières générations de locuteurs naturels.
La transmission dépend donc aujourd’hui d’abord de l’enseignement des langues régionales, de la vitalité de ces langues dans le domaine de la création culturelle et de leur présence dans les médias.
Plus de 400 000 élèves reçoivent aujourd’hui un enseignement de langues régionales et ces effectifs sont en constante augmentation.
Aujourd’hui, on peut dire que notre pays est fortement attaché à deux principes : d’une part, le principe de l’unité de la République avec le français comme langue commune – en 1992, il a été inséré un alinéa dans la Constitution disposant que « la langue de la République est le français » – ; d’autre part, un principe de préservation de notre patrimoine, dont font partie les langues régionales.
Le 21 juillet 2008, le Parlement a modifié la Constitution en y insérant un article 75-1 qui dispose que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».
Le Président de la République, montrant tout l’intérêt qu’il porte aux langues régionales, avait promis, lors de sa campagne, d’élaborer un texte de loi pour les sécuriser.
Monsieur le ministre, votre prédécesseur, Christine Albanel, s’était exprimée en ce sens lors d’un débat au sein de la Haute Assemblée, en mai 2008. Il était alors envisagé de donner une forme institutionnelle au patrimoine linguistique de la nation par un projet de loi qui récapitulerait les dispositions existantes et d’adopter des mesures concrètes « dans les domaines de l’enseignement, des médias, des services publics, de la signalisation et de la toponymie ».
Pourriez-vous nous dire, monsieur le ministre, ce que vous envisagez maintenant ?
Certes, les langues régionales ont été reconnues comme patrimoine de la France en 2008, mais ne faudrait-il pas rassembler au sein d’un même texte les diverses dispositions existantes ?
J’en viens à la proposition de loi qui nous réunit aujourd’hui, relative à la traduction en langue régionale des noms de communes sur les panneaux d’entrée et de sortie de ville. Je partage le propos des auteurs de ce texte et la position de notre collègue rapporteur Colette Mélot, que je félicite de la qualité de son travail et son sens de l’écoute.