Intervention de René-Pierre Signé

Réunion du 16 février 2011 à 14h30
Panneaux d'agglomération en langue régionale — Article unique

Photo de René-Pierre SignéRené-Pierre Signé :

Et ce ne sont pas trois cents langues qui sont en train de disparaître, mais trois mille !

Il y a en effet très peu de langues écrites – environ quatre cents, me semble-t-il –, et les autres sont en train de s’éteindre.

C’est ainsi qu’il existe, en France, des langues qui n’ont jamais été écrites.

Vous n’êtes pas sans savoir que les druides gaulois parlaient, mais n’écrivaient pas. Ils pensaient qu’une langue écrite était une langue morte.

Le morvandiau, par exemple, ne s’écrit pas : cette langue n’a pas de grammaire ; personne ne sait l’écrire, et il sera donc difficile de placer des panneaux en morvandiau à l’entrée des villes !

Le patrimoine français est aussi riche de ses danses, de ses coutumes et de ses traditions, autant d’éléments qui débordent largement le cadre des langues. Savez-vous, par exemple, que la bourrée auvergnate a été fortement influencée par le fandango espagnol, introduit par des muletiers qui voyageaient d’Espagne jusqu’en Auvergne ?

Étant né à quelques kilomètres du château de Ventadour, je ne peux m’empêcher de rappeler, après Bernadette Bourzai, que la langue d’oc limousine fut celle de nos plus grands troubadours – Bernard de Ventadour, mais aussi Gaulcem Faidit, Bertrand de Born, les quatre d’Ussel, ou encore Peire Vidal –, et qu’elle fut parlée jusqu’aux îles de Majorque et de Minorque.

Je n’oublie pas non plus la langue d’oc provençale, dont le félibre le plus illustre fut Frédéric Mistral.

Je suis heureux également que Bernadette Bourzai ait rappelé que le repli identitaire n’avait rien à voir avec la langue. Il faut insister sur ce point. Les adversaires de ce texte, ou ceux qui s’en méfient, prétendent qu’il marque un repli identitaire, et soulignent que la mode est actuellement à la partition des États. Et de citer l’exemple de la Belgique. Or cela n’a rien à voir !

Mais ce ne sont pas des raisons linguistiques qui peuvent expliquer l’éclatement de la Yougoslavie, pas plus d’ailleurs que la situation de la Catalogne ou du Pays Basque vis-à-vis de l’Espagne ou encore de l’Écosse vis-à-vis de l’Angleterre. Dans chacun de ces cas, bien d’autres causes pourraient être avancées, qu’elles soient politiques, ethniques, ou historiques.

Dans cette grande nébuleuse qu’est la mondialisation, les gens ont perdu leurs repères, et l’on comprend qu’ils aient envie de retrouver leurs origines.

En mettant en exergue les langues régionales sur les panneaux d’agglomération, la France montrera qu’elle est riche d’un long passé et de fortes traditions culturelles. Mais n’oublions pas, notamment pour nos amis du Morvan, que certaines langues ne s’écrivent pas !

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