Intervention de Hugues Portelli

Réunion du 13 janvier 2010 à 21h10
Évaluation de la loi sur le service minimum dans les transports — Débat d'initiative sénatoriale

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli :

Deux excellentes citations ouvriront mon propos.

La première est de vous, monsieur le secrétaire d’État : à l’occasion de l’une des grèves les plus suivies que nous ayons connues ces derniers temps dans le secteur des transports, vous avez déclaré qu’ « il y a en effet un problème, c’est que la loi sur le service minimum ne fonctionne pas lorsque tout le monde est en grève ». Votre collègue Éric Woerth, ministre chargé du budget, mais aussi de la fonction publique, a quant à lui tenu les propos suivants : « Le service minimum a très bien fonctionné jusqu’à présent, notamment à la SNCF. Maintenant, quand il y a un conflit de cette nature et quand tous les conducteurs sont en grève, il est difficile de l’appliquer car il n’y a pas de réquisition. » Tout est dit !

Mme Procaccia a très bien expliqué l’objet de la loi du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs. Il s’agit non pas d’un texte sur le service minimum, dont nous étions quatre-vingts sénateurs à demander l’instauration, malgré l’opposition du gouvernement de l’époque, clairement exprimée par M. Bertrand, mais d’une loi au champ restreint, portant sur le dialogue social dans les entreprises publiques de transport terrestre.

Cette loi impose la tenue d’une négociation avant tout dépôt d’un préavis de grève, d’une part, et la mise en œuvre d’un service garanti en cas de grève ou de perturbation prévisible des transports publics, d’autre part.

Cependant, le texte ne comporte pas une définition uniforme du service minimum, laissant aux autorités organisatrices de transport le soin de désigner les dessertes prioritaires en fonction des spécificités locales. Il prévoit par ailleurs l’obligation, pour les salariés, de déclarer, deux jours avant le début de la grève, s’ils entendent ou non y participer. En outre, la loi dispose que, après huit jours de grève, une consultation à bulletin secret des salariés sur la poursuite ou la cessation de celle-ci pourra être organisée, sur l’initiative de l’employeur ou à la demande d’une organisation syndicale représentative.

Quel bilan peut-on faire de l’application de ces dispositions ?

Le problème est, pour l’essentiel, celui du dialogue social. À l’instar de nombre de mes collègues, je m’interroge sur le sens que peut revêtir cette notion à la SNCF ou à la RATP : quel dialogue social peut-il y avoir lorsque la représentation syndicale est balkanisée entre de multiples organisations, divisées par des considérations idéologiques ou par des oppositions catégorielles ?

Quel dialogue social peut-il y avoir lorsque certains responsables syndicaux avouent benoîtement que la prolongation de la récente grève ayant affecté le RER A était en partie motivée par une surenchère syndicale à la veille d’élections professionnelles ? Quel dialogue social peut-il y avoir lorsque des trains sont retardés ou même supprimés, en dehors de tout mouvement social collectif déclaré, en raison, selon la formule que les usagers entendent de plus en plus souvent quand ils attendent sur le quai un hypothétique train, d’ « équipages non complets », comme s’il s’agissait d’avions ? Un tel message signifie tout simplement qu’une partie du personnel ne s’est pas présentée à son travail à l’heure prévue ! Cela arrive régulièrement, et n’a rien à voir avec un quelconque fait de grève.

Enfin, quel dialogue social peut-il y avoir si la bonne foi n’est pas partagée ? Les événements récemment survenus à la gare Saint-Lazare ont montré que le droit de grève pouvait être manipulé en observant des arrêts de travail de moins d’une heure. En l’occurrence, la bonne foi élémentaire a été bafouée. Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, plusieurs de mes collègues et moi-même avons déposé, voilà quelque temps déjà, une proposition de loi visant à mettre fin aux grèves de cinquante-neuf minutes en modifiant les modalités de calcul de l’arrêt de travail. Nous souhaiterions savoir si un tel texte est susceptible d’être un jour examiné avec bienveillance par le Gouvernement, dans le cadre de son dialogue social avec sa majorité parlementaire !

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