Lors de la discussion générale, vous posiez la question suivante, madame la ministre : « Comment résoudre la crise du logement, qui s’aggravera si l’ensemble des forces vives de ce pays, au-delà des clivages politiques, économiques ou sociaux, ne se mobilisent pas pour faire du logement une priorité effective, non pas seulement à l’échelon national, mais aussi dans chaque commune ? » Et vous ajoutiez : « C’est une question de solidarité nationale » !
À l’évidence, ces propos éminemment pertinents ne se traduisent pas en actes, ce projet de loi démontrant s’il en était besoin que les convictions du Gouvernement ne l’inclinent pas à renforcer le logement social !
La disposition qui vise à changer la règle des 20 % de logements sociaux est présentée abusivement dans l’exposé des motifs comme complétant les obligations des communes.
De qui se moque-t-on ? En réalité, une fois encore, vous attaquez cette règle posée par la loi SRU : après avoir compté au nombre des logements sociaux les prêts locatifs sociaux, vous continuez de vider la mesure de sa substance.
M. le rapporteur a demandé la suppression de l’article 17. C’est une bonne chose, mais nous ne sommes pas dupes : ce faisant, il ne fait qu’agiter un chiffon rouge, si vous me permettez l’expression, car cet article, même s’il constitue sûrement la preuve la plus visible du désintérêt de l’État pour le logement social et pour nos concitoyens qui souffrent de la crise du logement, ne reste qu’une mesure parmi d’autres de ce projet de loi.
La semaine dernière, vous avez affirmé, monsieur le rapporteur, en concluant l’une de vos interventions, que tous les moyens seraient utilisés pour combattre cette crise du logement. Nous espérons que vous traduirez ces belles paroles en actes, et que vous voterez notre amendement sur l’inéligibilité des maires qui ne respectent pas la loi.
Il faut bien en être conscient, le projet de loi entend remettre en cause une règle qui n’est pas appliquée par certains élus de la République. En pleine pénurie de logements, alors que nos concitoyens sont appauvris par les politiques menées par le Gouvernement, à l’heure où il serait plus que nécessaire de revoir à la hausse le pourcentage de logements sociaux fixé par la loi, vous n’avez qu’une seule réponse : puisque les maires ne respectent pas cette obligation légale, alors changeons la loi !
Un tel changement est d’ailleurs bien inutile puisque les maires dans l’illégalité restent déjà impunis !
Si nous voulons vraiment apporter des réponses rapides aux besoins urgents de la population, au lieu de remettre la loi en question, appliquons-la !
Un autre exemple aurait eu toute sa place dans ce chapitre consacré à l’offre nouvelle de logements, la réquisition des immeubles vacants appartenant à l’État. La loi existe pourtant, mais elle n’est toujours pas appliquée.
Madame la ministre, vous avez déclaré dans un récent entretien accordé à l’association Jeudi-Noir que vous n’excluiez pas de recourir à la réquisition. Encore une fois, c’est une bonne chose puisque c’est la loi ! Toujours dans le même entretien, vous ajoutiez, madame la ministre : « Je suis prête à écorner le droit de propriété » !
Qu’en est-il alors de la demande que vous deviez faire au ministre du budget Éric Woerth afin de dénicher des immeubles à réquisitionner ? Je crois que l’association devant laquelle vous teniez ces propos vous a elle-même signalé l’existence d’un bâtiment vide en face de votre ministère ! Et, en tant qu’élue de la Seine-Saint-Denis, je peux moi-même vous dresser une liste dès ce soir, si nécessaire.
Comment allez-vous faire pour répondre aux recours déposés au titre du droit au logement opposable ? Comment allez-vous faire pour mettre les gens à l’abri du froid mortel, cet hiver ? Comment allez-vous faire pour donner un toit aux familles fragilisées, aux retraités exsangues, aux travailleurs pauvres, à toutes les personnes frappées par la misère ?
Inscrire l’opposabilité du droit au logement dans les tables de la loi française, c’était entendre leur appel et reconnaître la légitimité de leur combat. Mais aujourd’hui, qu’en est-il de la parole donnée ? À l’évidence, l’article 17 ne constitue que la cime de l’iceberg des mesures mises en œuvre pour détruire le logement social !