Intervention de Éric Woerth

Réunion du 8 novembre 2007 à 15h00
Prélèvements obligatoires — Débat sur une déclaration du gouvernement

Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les prélèvements obligatoires mesurent la solidarité qui unit nos concitoyens. Au-delà des chiffres, ils renvoient donc à la cohésion de notre société et à son projet collectif. C'est pourquoi je remercie le Sénat d'avoir organisé ce débat qui concerne très directement l'avenir de notre pays.

Christine Lagarde a abordé l'ensemble des enjeux qui sont au coeur de la révision générale des prélèvements obligatoires. Je voudrais, quant à moi, revenir plus précisément sur la question des prélèvements sociaux.

C'est une question essentielle puisque les prélèvements sociaux représentent la moitié des prélèvements obligatoires.

C'est également une question essentielle étant donné les contraintes très fortes auxquels ces prélèvements sont soumis aujourd'hui, contraintes qui tiennent à la situation dégradée de nos comptes sociaux, dont nous parlerons abondamment lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, ainsi qu'au vieillissement de la population, lequel accroît les dépenses de retraite, de santé et de prise en charge de la dépendance.

Que voulons-nous exactement s'agissant des prélèvements sociaux ? Nous voulons tout simplement qu'ils soient efficaces et justes, c'est-à-dire qu'ils soient répartis de façon équitable, qu'ils soient le moins élevés possible tout en assurant un haut niveau de protection sociale et qu'ils nuisent le moins possible à l'emploi et à la compétitivité.

Au cours des vingt dernières années, nous avons considérablement réformé le mode de financement de notre protection sociale pour favoriser l'emploi et la compétitivité. Je pense notamment à l'effort réalisé en matière de cotisations patronales pesant sur les bas salaires, qui représentent désormais moins de 4 % du coût du travail pour les salaires au niveau du SMIC. Ce fait, peu connu, mérite d'être souligné, car l'effort de l'État dans ce domaine est considérable.

Les études économiques convergent pour montrer que les allégements généraux de charges sont les mesures les plus efficaces pour soutenir l'emploi. Ces allégements ont joué un rôle non négligeable dans la stabilisation de l'emploi peu qualifié dans notre pays. Le coût du travail non qualifié n'est donc plus un obstacle à l'emploi comme il pouvait l'être il y a encore vingt ans.

Ce sujet demeure néanmoins pendant. Tout à l'heure, lors de la séance des questions d'actualité au Gouvernement, le Premier ministre a d'ailleurs fixé un certain nombre d'orientations pour 2008 en matière d'allégements de cotisations sociales.

Pour traiter de la question de l'efficacité de nos prélèvements sociaux, je vous propose de les examiner sous quatre angles : leur type, tout d'abord, c'est-à-dire en fait, essentiellement, la question de leur assiette ; leur affectation, c'est-à-dire le point de savoir ce qu'ils financent ; leur limitation, c'est-à-dire l'enjeu de la maîtrise des dépenses ; leur respect, enfin, et c'est tout le problème de la fraude.

L'évolution de l'assiette doit être examinée sans tabou ; c'est d'ailleurs le parti qu'ont pris Philippe Marini et Alain Vasselle dans leurs rapports respectifs. Ainsi que l'a dit Christine Lagarde, tout doit être passé en revue, aussi bien la TVA sociale et la fiscalité écologique que la pertinence des niches sociales.

Je n'ignore pas que ces questions, sensibles et controversées, font débat, y compris au sein même de la majorité, car elles sont au coeur de notre pacte républicain. Je ne les trancherai pas aujourd'hui, d'autant que la réflexion continue dans d'autres enceintes, notamment au Conseil économique et social. Je formulerai néanmoins un certain nombre de remarques.

Tout d'abord, une réforme de l'assiette doit être conforme aux qualités attendues du prélèvement social. Quelles sont-elles ?

Le prélèvement doit être dynamique, afin de permettre de faire face durablement aux dépenses futures. Il doit être compatible avec la compétitivité de notre économie et avec l'emploi. Enfin, il doit être lisible pour que l'assuré puisse facilement identifier la dépense sociale qu'il finance.

Malheureusement, comme le rappelle Alain Vasselle, il n'y a pas d'assiette idéale. Sinon, on l'aurait inventée ! Chaque taxe a ses avantages et ses inconvénients et les choix doivent être faits en fonction des priorités que nous nous assignons. Pour moi, en tant que ministre des comptes, la priorité est évidemment la résorption des déficits sociaux. Pour cela, nous devons explorer toutes les pistes, sans exclusive.

La TVA sociale, ou « TVA anti-délocalisation », ou « TVA-compétitivité », est l'une de ces pistes. Christine Lagarde vient de résumer parfaitement les enjeux la question, au coeur de laquelle se trouvent bien l'éventualité et l'ampleur de son effet inflationniste et, le cas échéant, ses répercussions via les mécanismes d'indexation.

Les taxes dites « comportementales » constituent une autre piste. Le lien entre certains comportements et les dépenses d'assurance maladie est parfaitement établi. L'affectation à la sécurité sociale des droits sur le tabac et de droits sur les alcools semble, en conséquence, tout à fait légitime.

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