Intervention de Serge Lepeltier

Réunion du 10 décembre 2004 à 10h30
Loi de finances pour 2005 — Ecologie et développement durable

Serge Lepeltier, ministre :

Madame la sénatrice, vous venez d'évoquer des sujets très importants, qui dépassent largement le cadre de la discussion du projet de budget de mon ministère. Mais vous avez raison : nous devons ouvrir - je l'ai fait moi-même tout à l'heure - le débat sur la politique de l'écologie.

Vous avez évoqué la lutte contre les changements climatiques, à laquelle est consacrée la convention des Nations unies qui se tient à Buenos Aires.

Par ailleurs, vous avez semblé dire que le plan national d'allocation de quotas, le PNAQ, pourrait être moins efficace que les accords volontaires. Or l'adjectif « volontaire » est explicite : bien que les industriels se soient beaucoup impliqués dans ces accords, aucune sanction n'est prévue si les engagements pris ne sont pas respectés.

A l'inverse, dans le cadre du PNAQ, les allocations de quotas qui sont maintenant mises en place à l'échelon européen et, plus largement, dans tous les pays qui ont ratifié le protocole de Kyoto sont accompagnées de sanctions en cas de non-respect des quotas.

Selon vous, madame la sénatrice, le PNAQ aurait été élaboré en prenant l'hypothèse d'une croissance faible. Or nous avons tenté de fonder notre étude sur une analyse équilibrée qui prenne en compte la croissance.

Cependant, si certains secteurs connaissent une croissance supérieure à celle que nous avons envisagée et que leurs émissions de gaz à effet de serre sont plus importantes que prévu, ils seront obligés soit de mettre en place des technologies propices à diminuer les émissions par unité produite, c'est-à-dire des technologies performantes en matière d'efficience énergétique, soit d'acheter des quotas sur le marché, ce qui les pénalisera financièrement.

Ce principe est bon puisque la réduction des émissions de gaz à effet de serre sera réalisée lorsqu'elle pénalise le moins l'économie.

Madame la sénatrice, vous avez également affirmé que le PNAQ n'exonère pas la France de mener une véritable politique dans ce domaine. Vous avez raison ! Le PNAQ n'est pas le seul élément de notre action, dont je vous souhaite vous rappeler quelques aspects.

D'abord, le plan « climat », que j'ai annoncé au mois de juillet dernier, permettra d'économiser 72 millions de tonnes d'émissions de gaz carbonique. Or, à ce titre, le plan national de lutte contre le changement climatique qui avait été présenté par Mme Voynet, ancienne ministre de l'environnement qui siège aujourd'hui à vos côtés, ne permettait d'économiser que 17 millions à 18 millions de tonnes. L'échelle était donc tout à fait différente ! De plus, ce plan a échoué parce sa mesure phare, la taxe « carbone », qui en constituait quasiment la seule disposition efficace, a été annulée par le Conseil constitutionnel.

A l'inverse, le plan que nous vous présentons va réellement aboutir à des résultats : économiser 72 millions de tonnes de gaz à effet de serre par an, c'est plus que ce qui nous est demandé par le protocole de Kyoto, et cela représente environ 13 % de nos émissions actuelles. Nous prévoyons ainsi le triplement de la production de biocarburants dans les trois prochaines années, et je rappelle que, quand nous consommons une tonne de biocarburants, nous émettons trois fois moins de gaz à effet de serre que lorsque nous consommons une tonne de pétrole.

Ensuite, la loi d'orientation sur l'énergie contient un grand nombre de mesures, dont les certificats d'économie d'énergie.

J'ai aussi évoqué tout à l'heure le crédit d'impôt de 40 % pour l'achat d'équipements utilisant des énergies renouvelables, ce qui est considérable.

Toutes ces mesures correspondent, dans la loi de finances, à environ 300 millions d'euros.

Vous avez évoqué la fiscalité écologique. Il s'agit d'un sujet essentiel et nous devons faire en sorte que, à moyen ou à long terme, les produits moins polluants soient moins chers que les autres produits plus polluants. Ainsi, nous réconcilierons économie et écologie.

Le débat sur la fiscalité écologique, je l'ai dit tout à l'heure à M. Demuynck, doit avoir pour objectif de changer les comportements de nos concitoyens. Cela doit aboutir non pas à un accroissement des charges qui pèsent déjà beaucoup trop lourdement sur les entreprises, mais au contraire à des incitations sous forme d'allégements, à budgets globalement constants.

Cela passe par une refonte progressive de la TGAP. A ce sujet, vous le savez, sur l'initiative du Parlement, une TGAP sur les imprimés non sollicités sera créée à compter du 1er janvier 2005, et une réflexion sur l'évolution des taux de TGAP « air » et de TGAP « installations classées » est engagée.

Quant à la mise en place d'exonérations ciblées, les crédits correspondants ont été inscrits dans la loi de finances.

Nous devons en tout cas, je le répète, engager avec le Parlement une vraie réflexion sur la modulation environnementale des taxes existantes pour rendre les produits écologiques moins chers que les produits non écologiques.

Il existe d'autres outils, dont le PNAQ, mais sachez que la France ne s'exonère pas de mener, au-delà de ce plan, une véritable politique écologique.

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