Intervention de Nicolas About

Réunion du 8 novembre 2007 à 15h00
Prélèvements obligatoires — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Nicolas AboutNicolas About, président de la commission des affaires sociales :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, il me revient l'honneur de clore la première partie de notre discussion, avant de laisser la parole aux orateurs des groupes.

Je ne voudrais pas répéter ce qu'ont excellemment dit le président et le rapporteur général de la commission des finances, ainsi qu'Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres généraux des lois de financement de la sécurité sociale. Je vous ferai donc simplement part d'un certain nombre d'observations, en débutant par un point de méthode.

Le rapport sur les prélèvements obligatoires présenté l'an dernier par le Gouvernement juxtaposait de manière artificielle, d'une part, des analyses relatives à la politique fiscale de l'État, d'autre part, des réflexions sur les évolutions à long terme du financement de la sécurité sociale. Il n'offrait pas de présentation synthétique qui aurait témoigné d'une vision consolidée des ressources publiques.

Le document qui nous est soumis cette année procède, pour la première fois, à cette approche d'ensemble des deux sphères, État et sécurité sociale. C'est une évolution bienvenue, que nous saluons.

Cette façon de faire devrait, en effet, aller de soi : les finances publiques sont « unes » et les prélèvements obligatoires, qu'ils s'appellent impôts, contributions, taxes ou cotisations sont acquittés par les mêmes payeurs. Il n'y a, bien sûr, pas de fonds publics sans poches privées.

Ce décloisonnement a été à l'origine de la création d'un ministère des comptes publics, à moins qu'il n'en soit la conséquence. Nous nous en félicitons, monsieur le ministre, car cette création a eu des effets immédiatement bénéfiques sur les relations entre l'État et la sécurité sociale. Le remboursement de la dette de 5, 1 milliards d'euros en est sans doute la preuve la plus symbolique.

La mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, a fait de ce point un axe fort de son dernier rapport : les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale n'ont pas besoin d'être fusionnées. En revanche, il est nécessaire de mieux les articuler si l'on souhaite parvenir à un pilotage plus efficace de nos finances publiques. Dans ce cas, il faut à la barre un seul pilote, qui dispose d'une vision globale en ce qui concerne la fiscalité et les dépenses.

À ce sujet, nous saluons également l'initiative qui a été prise cette année de créer un nouveau « bleu » consacré à la dépense publique dans son ensemble et à son évolution, qui fait pendant au « bleu » sur les prélèvements obligatoires.

Si, en outre, au mois de juin prochain, le rapport préparatoire au débat d'orientation budgétaire donne enfin toute leur place aux finances sociales, nous aurons alors fait un grand pas, me semble-t-il, dans le sens de cette vision consolidée et équilibrée des finances publiques que nous appelons de nos voeux.

Ma deuxième observation portera sur le pilotage de la sécurité sociale.

L'un des arguments les plus convaincants qui militent contre la fusion ou contre la budgétisation, même partielle, de la sécurité sociale est le suivant : nous y perdrions les avantages tirés du pilotage de la sécurité sociale, qui permet d'établir des soldes individualisés pour chaque branche.

Prenons l'exemple de la branche famille, celle qui est le plus souvent choisie lorsqu'on envisage un rapatriement vers le budget de l'État. Je pense qu'après l'épisode de la PAJE, la prestation d'accueil du jeune enfant, qui a durablement pesé sur ses comptes, on hésitera désormais à prendre le risque de dégrader le solde de la Caisse nationale des allocations familiales par de nouvelles mesures. À l'inverse, j'en suis persuadé, le financement d'une réforme coûteuse dans le domaine de la famille pourrait se faire sans trop d'états d'âme si elle était « noyée » dans le budget de l'État et dans son déficit, dont les raisons sont multiples, et qui ne pourrait dès lors pas plus être imputé à cette réforme qu'à d'autres causes.

Ainsi, la gestion par les soldes non seulement facilite le repérage des origines du déficit, mais encore assure une fonction pédagogique essentielle.

D'abord, elle confronte des recettes et des dépenses, ce qui rend plus acceptable par le cotisant ou le contribuable l'effort qui lui est demandé.

Ensuite, elle donne aux gestionnaires, un instrument essentiel de négociation avec les acteurs concernés, par exemple les professionnels de santé s'agissant de l'assurance maladie, en montrant les limites de la ressource face à une dépense potentiellement dynamique.

Ma troisième observation est en fait une plaidoirie pour vous convaincre de l'importance qu'il y aurait à accorder une plus grande autonomie aux lois de financement de la sécurité sociale en matière de recettes.

Le rapport établi par la MECSS pour préparer le débat d'aujourd'hui en fait longuement état. Une meilleure maîtrise des recettes de la sécurité sociale par la loi de financement de la sécurité sociale offrirait plus de transparence et de clarté aux relations entre le budget de l'État et celui de la sécurité sociale.

Voici quelles sont nos principales propositions.

En premier lieu, nous considérons qu'il est tout à fait légitime d'instaurer le monopole des lois de financement de la sécurité sociale concernant l'autorisation des exonérations de cotisations et de contributions sociales ; à défaut, le minimum serait de prévoir un examen obligatoire, au moment de la discussion du projet de loi de financement de l'année, des décisions d'exonération qui auraient été adoptées en cours d'exercice. Trop de dispositions de ce genre, en effet, sont prises sans que la commission des affaires sociales en soit saisie, ni même officiellement informée ; nous le constatons encore cette année.

En second lieu, il existe une asymétrie singulière, qu'il convient de supprimer : actuellement - on le dit chaque année ! -, la loi de finances conserve une compétence de principe, dès lors qu'une fraction, même minime, d'une ressource reste attribuée au budget de l'État. En revanche, la loi de financement de la sécurité sociale ne permet d'examiner une recette que si celle-ci est intégralement affectée à la sécurité sociale. Ainsi, les droits sur les tabacs et la taxe sur les salaires, dont plus de 95 % abondent les recettes de la sécurité sociale et moins de 5 % celles de l'État, restent traités dans le projet de loi de finances et échappent à l'examen de la commission des affaires sociales !

Certes, l'intégralité de ces deux taxes sera affectée l'an prochain à la sécurité sociale et entrera donc dans le champ de la loi de financement, mais d'autres ressources, notamment au sein du panier de compensation des allégements « Fillon », restent partagées, et cette asymétrie demeure choquante dans son principe. La logique voudrait que l'une ou l'autre loi soit compétente dès lors que plus de 50 % de la ressource revient soit à l'État, soit à la sécurité sociale. J'aimerais donc connaître votre sentiment sur ce point, monsieur le ministre.

Enfin, je voudrais à mon tour dire un mot de la TVA sociale. Après tout, il n'y a pas de raison que je n'en parle pas, moi aussi !

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