Intervention de Marc Massion

Réunion du 8 novembre 2007 à 15h00
Prélèvements obligatoires — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Marc MassionMarc Massion :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat sur les prélèvements obligatoires constitue chaque année un moment intéressant. Sur ce sujet, comme sur d'autres d'ailleurs, nous avons des divergences fortes.

En effet, la question est la suivante : devons-nous prôner la baisse des prélèvements obligatoires comme un objectif ultime ? Le Président de la République a fait de leur baisse un objectif chiffré, avec une volonté d'affichage électoraliste.

Pour ma part, je plaide tous les ans pour leur « désacralisation », au motif que l'étude de leur seul niveau ne suffit pas à déterminer si une politique fiscale est juste et efficace pour la nation. Je reviendrai sur ce point tout à l'heure, souhaitant dans un premier temps m'intéresser à vos promesses.

En effet, M. Nicolas Sarkozy avait fait de la baisse des prélèvements obligatoires un des thèmes privilégiés de sa campagne. Dans une interview accordée au journal Le Monde le 23 janvier 2007, il annonçait une « véritable révolution économique » destinée à réduire de 4 points de PIB le taux des prélèvements obligatoires. Puis, constatant certainement l'absence de crédibilité de cette promesse électorale, il est revenu sur ses déclarations en précisant, le 13 février 2007, qu'il s'agissait en réalité d'un objectif à l'horizon de dix ans.

Cependant, la réalité est tout autre, comme l'indique le rapport d'information élaboré par Philippe Marini, au nom de la commission des finances, en s'appuyant d'ailleurs sur les documents fournis par le Gouvernement, notamment sur le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2008.

Quel est donc le scénario prévu par le Gouvernement concernant le taux des prélèvements obligatoires ?

Selon le rapport de M. Marini, « le Gouvernement distingue deux scénarios : un scénario où la croissance du PIB à compter de 2009 serait de 2, 5 % par an, et où l'équilibre serait atteint en 2012 », auquel cas « le taux de prélèvements obligatoires baisserait bien jusqu'à 43, 4 % ». Il s'agit donc d'une baisse de 0, 8 point seulement en cinq ans.

Madame la ministre, vous avez fait un rappel du passé en citant le taux de prélèvements obligatoires enregistré en 1999. Permettez-moi de rappeler à mon tour que ce taux s'élevait à 43, 1 % en 2002, date où vos amis sont revenus au pouvoir, et qu'il n'a cessé de monter depuis.

Selon l'autre scénario, « la croissance serait de 3 % par an, et l'équilibre des comptes publics atteint dès 2010 ». Dans ce cas, « la diminution du taux de prélèvements obligatoires serait encore plus faible. » Ne croyant pas lui-même à l'hypothèse d'un retour à l'équilibre dès 2010, le Gouvernement n'a pas pris le soin de fournir une estimation chiffrée.

De ces deux scénarios, je ne retiens, pour vous être agréable, madame la ministre, que le plus favorable : selon une hypothèse d'élasticité des prélèvements obligatoires égale à 1, autrement dit si ces derniers évoluent au même rythme que la croissance, la baisse des prélèvements obligatoires ne serait, je le répète, que de 0, 8 point en cinq ans. Vous le remarquerez comme moi, nous sommes très loin des 4 points promis par le candidat Sarkozy, même si l'on tient compte de l'ajustement qu'il a effectué quelques jours plus tard.

Si je me reporte à l'excellent graphique figurant à la page 25 du rapport de Philippe Marini, je constate un miracle : dès 2012, comme par enchantement, le taux des prélèvements obligatoires se met à baisser, jusqu'à tomber à 40 % en 2018. C'est un véritable prodige, tant l'absence de justification est criante et les hypothèses prises en compte sont loin d'être réalistes. Pourriez-vous, madame la ministre, nous éclairer sur ce spectaculaire tour de magie ?

J'ignore s'il en est de même pour notre rapporteur général, mais le Président de la République, lui, semble croire aux miracles. La preuve, c'est qu'il pense encore que la libération de la croissance se décrète et qu'il peut, sur simple demande, d'un claquement de doigts, ramener le point de croissance qui nous fait tant défaut. Mais les méandres de l'économie semblent moins faciles à maîtriser que les techniques de la magie !

Pourquoi cette introduction, dont je vous prie d'excuser la longueur ? Tout simplement pour démystifier les promesses, plus qu'aventureuses, du Président de la République et dénoncer les mensonges. Les Français doivent maintenant savoir que, derrière son slogan selon lequel « Il faut que les Français en aient pour leur argent », la tromperie avançait masquée !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion