Intervention de Guy Fischer

Réunion du 8 novembre 2007 à 15h00
Prélèvements obligatoires — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Je sais gré à notre collègue Alain Vasselle de pointer dans son rapport d'information que nombre de revenus échappent, notamment, à toute prise en compte au titre des prélèvements sociaux.

Le véritable pactole que constituent les stock-options, parachutes dorés et indemnités variées dont bénéficie une infime minorité de hauts cadres de l'industrie et des affaires est d'autant plus généreux qu'il déroge aujourd'hui au droit commun de la contribution au financement de la sécurité sociale.

La remarque vaut également pour l'impôt sur le revenu, où la multiplication des prélèvements libératoires, des traitements de faveur accordés aux revenus issus du capital et du patrimoine, fait supporter l'essentiel de l'effort aux couches salariées modestes et moyennes, déjà largement mises à contribution pour les prélèvements sociaux puisque ce sont actuellement ces catégories sociales qui voient leur pouvoir d'achat se dégrader le plus rapidement.

Avant que de s'interroger sur le devenir de nos prélèvements obligatoires, peut-être conviendrait-il de se poser des questions sur la pertinence absolue du droit existant, luxuriante végétation d'exceptions au droit commun dès qu'il s'agit des privilèges de la fortune !

La fiscalité incitative, elle existe déjà, monsieur le rapporteur général, quand les placements en assurance vie sont exonérés de droits de succession ou que les plus-values sont destinées à être, à l'échéance de 2014, totalement exonérées de la moindre imposition !

Le problème, c'est que les cadeaux faits à quelques-uns, quelques ménages fortunés ou quelques grands groupes, sont facturés en retour à la grande majorité, qu'il s'agisse des retraités, des salariés, de nos commerçants et artisans ou de nos PME.

Évidemment, on nous annonce à l'occasion de ce débat la mise en oeuvre d'une révision générale des prélèvements obligatoires, celle-ci, il va de soi, allant de pair, dans l'esprit de ses concepteurs, avec une révision tout aussi générale des politiques publiques.

En juin dernier, au détour d'une soirée électorale, un ministre des finances avait été pris sur le fait : il envisageait d'instaurer une TVA dite « sociale » en lieu et place de prélèvements existants. Le même ministre, aujourd'hui investi d'autres fonctions, semble avoir gardé la même orientation.

Les conclusions du récent Grenelle de l'environnement, quoi qu'on en dise pour le moment, semblent bien vouloir concourir à cette mission délicate. Il s'agirait de teindre de vert les habits passablement défraîchis de la TVA sociale, d'autant qu'une querelle - mais vous en avez largement discuté entre vous, mes chers collègues - semble opposer les élus de la majorité sur cette question. Ainsi, on justifierait par la protection de l'environnement de nouveaux cadeaux fiscaux et sociaux destinés aux entreprises.

On parle de taxe carbone, de taxe sur les voitures polluantes... Et on oublie soigneusement de rappeler que la fiscalité sur les produits pétroliers pourrait d'ores et déjà constituer un moyen de financer objectivement certains choix de développement économique plus respectueux de l'environnement.

Les prélèvements obligatoires n'auraient donc de qualités que lorsqu'ils frappent les salaires et la consommation, celle-ci étant d'ailleurs d'abord et avant tout le fait des salariés !

J'imagine que le Gouvernement relancera après les élections municipales et cantonales le débat sur la TVA sociale et que nous serons amenés à rediscuter cette question. Ce qui est certain, mes chers collègues, c'est qu'il faut concevoir enfin, et de manière définitive, un système de prélèvements obligatoires cohérent, juste et efficace. Nous sommes loin, très loin du compte en ces matières !

Puisqu'il me reste trop peu de temps pour exposer en détail des propositions alternatives, je me contenterai d'évoquer quelques points.

Oui, tous les revenus, quelle que soit leur nature, doivent contribuer de manière équitable au financement de la protection sociale comme de l'action de l'État !

Assez des niches fiscales et sociales et des exemptions qui profitent aux revenus du capital et du patrimoine et qui mettent à mal les principes d'égalité devant l'impôt et de justice fiscale ! Nous sommes prêts à débattre de ce dossier.

Oui, nous devons nous poser la question de la pertinence des compétences respectives de l'État, de la sécurité sociale et des collectivités territoriales dans chacun des domaines d'intervention de la dépense publique !

Les interventions que nous avons entendues, que ce soit celle de M. Gérard Longuet, des rapporteurs ou des présidents des commissions concernées, montrent que le coeur du débat est bien de savoir quelle société nous voulons pour demain. Que ce soit en Allemagne, au Japon ou en Grande-Bretagne, bref, dans tous les grands pays industrialisés, nous assistons à l'institutionnalisation de la précarité, à une véritable explosion de la pauvreté, qui font voler en éclats les solidarités intergénérationnelles : est-ce la société que nous voulons ?

L'action en direction des plus démunis, la solidarité nationale, la couverture du risque dépendance, doivent être pleinement du ressort de la sécurité sociale afin que soit mis un terme à l'enchevêtrement fiscal que nous connaissons aujourd'hui, mais surtout pour que soit assurée la véritable solidarité.

Oui, nous devons revoir l'assiette des prélèvements fiscaux locaux, notamment en matière de taxe professionnelle, pour les rendre plus opératoires et socialement efficaces. Mais j'ai l'impression d'être là vraiment à contre-courant, quand j'entends prôner la suppression, notamment, de la taxe professionnelle.

Ce ne sont là, mes chers collègues, que quelques pistes de réflexion et, au nom de mon groupe, je me devais de vous les proposer.

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