... j'ai froid dans le dos.
Parce que nous ne pouvons accueillir toute la misère du monde, doit-on mépriser tous ceux qui aspirent à nos conditions de vie ?
Qui sont ces gens dont personne ne veut ? Sont-ce des sous-hommes, des moins que rien ? Sont-ce des hommes dont l'Europe se lave les mains, des hommes que l'on peut abandonner en plein désert, en espérant que la mort ou la peur auront raison de leur désir d'ailleurs ?
Lorsque j'entends M. de Villepin dire : « L'immigration clandestine prépare une société déchirée, fracturée, ghettoïsée. Elle contribue ainsi à produire la haine et la violence sur le territoire national. Les violences urbaines que nous avons connues il y a quelques semaines en sont une triste illustration », je regrette que les statistiques de ses services ne lui aient pas été communiquées.
On estime en effet à 7, 5 % le nombre d'étrangers arrêtés à la suite de ces évènements, et seule une infime partie de ces personnes étaient en situation irrégulière. Il ne s'agissait ni de clandestins ni d'enfants de clandestins, et vous le savez très bien !
Ce qui est grave ici, c'est que, pour l'un comme pour l'autre de ces responsables politiques, une situation a été sciemment déformée pour justifier un discours extrêmement anxiogène et violent sur l'immigration.
On ne peut accueillir toute la misère du monde ? C'est malheureusement vrai ! Alors, traitons au moins avec respect et justice ceux que nous accueillons. Mais, surtout, réfléchissons à ce que nous voulons faire du monde que nous laisserons à nos enfants.
En laissant le Sud succomber à la misère, à la guerre et à la maladie, l'Occident a massé à sa porte un nombre toujours plus important d'exclus. Les repousser demandera de plus en plus de moyens et réclamera de plus en plus de violence.
Ce sont finalement les valeurs qui ont fait la République que nous finirons par piétiner.
La France, pays des droits de l'homme, c'est tout de même un plus beau slogan que « la France aux Français », n'est-ce pas ?
Il est temps de placer à nouveau la coopération et l'aide au développement au coeur de nos réflexions et de faire preuve en la matière de volontarisme politique. Sans cela, c'est la peur que nous laisserons en héritage à nos enfants : la peur du privilégié face au démuni, la peur du repu face à l'affamé, la peur de celui qui possède face à celui qui désire.
De cette peur, tous les dérapages verbaux de M. Sarkozy sont pétris. Ne laissons pas le virus se répandre. N'ajoutons pas la haine à la misère, la violence à la désespérance et l'humiliation au rejet.