Intervention de Roger Madec

Réunion du 2 décembre 2005 à 22h30
Loi de finances pour 2006 — Santé

Photo de Roger MadecRoger Madec :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m'attarderai tout d'abord quelques instants sur les centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogues, comme l'a fait à l'instant M. Fischer.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 organise le transfert de leur financement à l'assurance maladie pour 15 millions d'euros. Cela tend à prouver que ces centres créés par la récente loi de santé publique verront effectivement le jour, mais cela ne dissipe pas pour autant les incertitudes auxquelles sont confrontées les deux cent soixante-dix structures participant à l'action de réduction des risques.

Ce transfert ne peut manquer de susciter des réflexions légitimes concernant la compétence régalienne de l'État en matière de prévention et de réduction des addictions, donc sur ce qui devrait normalement relever de son budget !

Ainsi, le programme « Drogue et toxicomanie », doté de 37, 3 millions d'euros, est en baisse à cause du transfert des crédits des injonctions thérapeutiques vers le programme « Conduites et soutien des politiques sanitaires et sociales ».

Ce programme ne concentre toutefois pas la totalité des moyens de l'État dédiés à la lutte contre la toxicomanie, puisque 13 millions d'euros sont prévus à cette même fin par l'action « Déterminants de santé » dans le programme « Santé publique et prévention ».

Je me contenterai de souligner que les soins et la réduction des risques en matière de drogue et de toxicomanie demeurent les parents les plus pauvres de la politique de santé publique.

Les moyens consacrés à la coordination interministérielle et à l'expérimentation de nouveaux dispositifs sont, malheureusement, en chute libre. Sur l'exercice précédent, 3 millions d'euros étaient initialement attribués à la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, la MILDT.

De plus, le Gouvernement envisage de supprimer le fonds de concours de 1, 2 million d'euros que la MILDT répartit traditionnellement entre les ministères concernés pour le financement des actions de lutte contre la drogue.

Le rattachement direct, au ministère des finances, du produit des saisies de biens et de numéraires des trafiquants risque de faire perdre de vue son utilisation pour la seule lutte contre la drogue.

En outre, à la lecture du « bleu » budgétaire, il apparaît que la mise en oeuvre du programme « Drogue et toxicomanie » s'appuie sur quatre opérateurs, financés sur les crédits de l'action « Coordination interministérielle des volets préventif, sanitaire et répressif » pour un total de 9 millions d'euros en 2006.

Pour une meilleure efficacité de ces outils de prévention, il me semble nécessaire d'intégrer l'ensemble de ces opérateurs dans la MILDT.

Alors que la consommation de cannabis augmente dans notre pays, les campagnes de prévention ne me paraissent pas être à la hauteur du problème. En effet, la consommation de ce stupéfiant est en recrudescence continue et devient de plus en plus précoce : à dix-huit ans, plus de 50 % des adolescents en ont fait l'expérience ; parmi eux, 24 % des garçons et 9 % des filles en font un usage régulier.

De plus, selon une nouvelle étude scientifique, de nombreux conducteurs impliqués dans un accident avaient consommé ce stupéfiant dans les heures précédant l'accident. Ainsi, près de 40 % des jeunes morts au volant avaient fumé du cannabis.

En ce qui concerne l'alcool, vous me permettrez, monsieur le ministre, de revenir sur l'adoption par le Parlement d'une disposition modifiant la composition du Conseil de modération et de prévention.

Les experts de santé publique dénoncent la modification apportée par l'article 21 A du projet de loi d'orientation agricole à la composition du Conseil de modération et de prévention, créé pourtant par décret en octobre 2005.

Cette modification donne une place importante aux professionnels des filières viticoles et prévoit leur consultation systématique à propos de tout projet de communication ou de tout texte normatif relevant de la compétence du Conseil.

Afin que la mise en oeuvre de la politique de prévention ne soit pas freinée, il est nécessaire, monsieur le ministre, que vous fassiez rétablir la configuration initiale de ce conseil. En effet, il n'est pas acceptable que des initiatives concernant la santé soient prises à l'occasion de l'élaboration de textes n'ayant a priori aucun lien avec la santé publique, échappant ainsi à votre contrôle.

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