Intervention de Jean-Pierre Caffet

Réunion du 1er décembre 2006 à 15h30
Loi de finances pour 2007 — État b

Photo de Jean-Pierre CaffetJean-Pierre Caffet :

Il me revient de compléter les propos de mes collègues et d'expliquer le vote du groupe socialiste sur les crédits de la mission « Ville et logement » du projet de loi de finances pour l'année 2007.

En tout premier lieu, je souhaite formuler quelques remarques sur le programme « Aide à l'accès au logement » de la mission budgétaire que nous examinons.

La dotation destinée à financer l'APL et l'ALS s'élève à 4, 91 milliards d'euros, soit un recul de 3, 8 % par rapport à la loi de finances pour 2006. Cette baisse s'explique d'abord par le pari que fait le Gouvernement d'un ralentissement des versements de prestations au cours de l'année 2007. Malgré l'entrée en vigueur de l'indice de référence des loyers, il apparaît pourtant peu probable que ce scénario se réalise.

La tendance à l'alourdissement du poids des dépenses de logement dans le budget des ménages se poursuit sans fléchissement depuis dix ans, atteignant aujourd'hui 21 %. De même, la nette augmentation des dépôts de dossiers auprès du Fonds de solidarité logement au cours des deux dernières années laisse à penser que les versements d'aides au logement suivront une évolution similaire.

Par ailleurs, le recul de la dotation destinée à financer les aides au logement s'explique également par le prélèvement de 150 millions d'euros sur les fonds propres des SACI - cette ressource, par définition non pérenne, a déjà été évoquée tout à l'heure - et par le nouvel assujettissement des employeurs publics - État, collectivités territoriales et établissements publics administratifs - à la cotisation destinée à financer le Fonds national d'aide au logement. Jusqu'à présent, seuls les employeurs privés y étaient soumis.

Cette recette supplémentaire permettra de dégager 236 millions d'euros. Nous sommes toutefois surpris de cette initiative, prévue par l'article 62 du projet de loi de finances, qui vise à transférer de l'État aux collectivités territoriales une partie du financement des aides au logement, alors que celles-ci ne sont pas compétentes en la matière. En effet, les 65 millions d'euros que les collectivités territoriales devront acquitter au titre de cette cotisation nouvelle sont autant de crédits en moins à financer pour l'État.

Je veux également aborder la question de la revalorisation des aides au logement. Même si une actualisation de 1, 8 % au 1er janvier 2007 nous est annoncée, je note qu'aucune hausse des aides n'aura été réalisée en 2006. Conjuguée aux augmentations insuffisantes de ces dernières années, cette évolution ne permettra pas de diminuer le taux d'effort des ménages.

En la matière, nous persistons pourtant à croire nécessaire d'inscrire dans la loi le principe selon lequel les aides à la personne doivent suivre les variations de l'indice de référence des loyers. À défaut, si une telle mesure était trop coûteuse, il faudrait prévoir une indexation sur l'inflation.

Tel est l'objet des amendements déposés par les parlementaires socialistes sur cette mission, comme de ceux qu'ils ont présentés avec constance depuis 2004 sur les projets de loi de finances pour 2005 et 2006, ainsi que sur le projet de loi portant engagement national pour le logement et le projet de loi pour l'égalité des chances.

Systématiquement, le Gouvernement et la majorité sénatoriale refusent de les discuter, invoquant l'article 40 de la Constitution, mais nous ne désarmerons pas. Il s'agit en effet de mesures d'urgence sociale rendues impératives par la contraction du pouvoir d'achat de nos concitoyens.

De la même manière, mes collègues et moi-même avons réclamé sans relâche la suppression du mois de carence et du seuil de non-versement des aides personnelles au logement, qui est aujourd'hui de 24 euros. Avec le vote de cet amendement, c'est désormais chose faite ; nous regrettons simplement que cette ressource trouve son origine dans une ponction sur la trésorerie de l'ANAH et nous nous inquiétons de la poursuite des missions de l'Agence.

Cela étant dit, nous nous félicitons de cette évolution. Remarquons tout de même que beaucoup de temps a été perdu : quatre années durant lesquelles environ 120 000 familles ont été exclues des aides au logement et n'ont pu percevoir les 288 euros par an auxquelles elles avaient droit.

Ainsi, au total, les crédits d'aides à la personne tels qu'ils nous sont proposés par le projet de loi de finances pour 2007 ne permettront pas de lutter contre l'érosion du budget des locataires modestes. Je tiens à rappeler que près des trois quarts des bénéficiaires des aides personnelles ont des revenus inférieurs au SMIC.

Une plus grande exposition des milieux populaires à la précarité, une fragilisation des classes moyennes, une insuffisance des aides à la pierre consacrées au logement abordable, un report croissant des politiques publiques du logement sur les collectivités territoriales : autant d'orientations de la mission « Ville et logement », autant de choix du Gouvernement en faveur de villes qui excluent du centre vers la périphérie une part croissante de la population, autant de chemins vers la paupérisation de ceux que la Fondation Abbé Pierre appelle les « mal logés » et les « personnes en situation de réelle fragilité à court ou moyen termes » ; elles sont près de 9 millions aujourd'hui.

Pour toutes ces raisons, les membres du groupe socialiste, qui n'ont eu de cesse de défendre le logement pour tous, voteront contre l'enveloppe et la répartition des crédits de la mission « Ville et logement ».

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