Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me félicite du respect des engagements pris par le Gouvernement à l'occasion de la loi de programme pour la recherche. Tout n'est pas parfait, mais nous allons dans le bon sens, et nous l'apprécions.
Toutefois, n'oublions pas que le projet de budget que nous examinons concerne aussi bien la recherche que l'enseignement supérieur.
Des 21, 3 milliards d'euros que comptabilise la mission, la moitié est affectée au programme « Formations supérieures et recherche universitaire ». À structure constante, les crédits de ce programme sont en augmentation de 2, 82 %.
Lors de la discussion des deux précédents budgets, j'avais mis en avant la nécessité de rééquilibrer le financement en faveur de l'enseignement supérieur, qui, comparé à celui de nos voisins, apparaît sous-doté. Cette année, je soulignerai les indispensables évolutions qualitatives du système, sans lesquelles tout effort financier aurait une portée limitée en termes d'insertion professionnelle des étudiants.
Deux points majeurs doivent à l'avenir faire l'objet de toute notre attention : d'une part, la nécessité de réussir l'entrée dans les études supérieures ; d'autre part, celle de réviser la gouvernance des universités.
S'agissant de la première année d'études supérieures, l'enjeu, ou plutôt le défi, consiste à faire en sorte que chaque inscription à l'université soit non seulement le résultat d'un choix, mais également l'aboutissement d'une réflexion prenant en compte les acquis scolaires et les perspectives d'insertion professionnelle. Un certain nombre de propositions ont été formulées, que ce soit par vous, monsieur le ministre, avec la possibilité de préinscription, ou dans le cadre de la commission Hetzel. Je m'en félicite.
Il me semble toutefois nécessaire d'aller au-delà et de mettre en place au cours du premier trimestre de l'année de terminale, avant que ne s'effectuent les premiers choix, un module d'enseignement permettant à l'élève de développer sa réflexion et d'élargir ses horizons. Il s'agit donc de promouvoir une approche professionnelle de l'orientation en utilisant les formations dispensées par les professeurs actuels, sans en créer de nouvelles, mais en leur donnant une cohérence propre à éclairer les étudiants et en renforçant cette approche par l'intervention d'établissements supérieurs au cours de ce module, de manière à ouvrir des perspectives de choix.
Monsieur le ministre, nous souhaitons vivement que vous permettiez cette expérimentation, qui, je pense, pourrait faire la démonstration de son efficacité et viendrait compléter heureusement les mesures que vous avez déjà proposées. Cela nous paraît d'autant plus important que l'actuelle absence de choix conduit finalement à ternir l'image de l'université, alors que celle-ci est, je crois, de très bon niveau.
Le second point a trait à la gouvernance des universités. Ma principale inquiétude concerne la capacité des universités, dans le contexte actuel de compétition internationale, à attirer, ou tout simplement à conserver ses enseignants-chercheurs. Sans marge de manoeuvre financière, sans possibilité de s'ajuster à cette compétition internationale, nos établissements, monsieur le ministre, ne seront pas en mesure de garder les meilleurs.
Sans souplesse, il ne nous sera pas possible de recruter les personnels de qualité, aussi bien les enseignants que les personnels de direction, qui soient les plus adaptés aux missions que nous voulons leur confier. Des profils de postes attractifs impliquent un fléchage réduit des crédits, la possibilité de procéder à des choix et à des arbitrages, des responsabilités à exercer.
Dans cette perspective, monsieur le ministre, je souhaiterais que, sur ce point aussi, soit conduite une mission pour que, grâce à une dotation globale renforcée, nous puissions à titre expérimental, dans une université ou deux pour commencer, donner de l'espace aux présidents d'université de façon qu'ils puissent assumer leurs responsabilités, choisir de garder les meilleurs, en ayant peut-être moins de postes, mais en exerçant pleinement leurs responsabilités.
J'ai noté une très nette augmentation des crédits du programme « Vie étudiante ». Je ne reviendrai pas cette année sur les problèmes du logement étudiant, que nous avons déjà largement évoqué, monsieur le ministre, et sur lequel je garde ma position : vous pourriez beaucoup mieux utiliser cet argent, qui vous est indispensable.
En ce qui concerne les bourses, nous souhaiterions que les informations fournies dans le projet annuel de performances soient plus précises, afin notamment que nous puissions connaître la nature des bourses honorées dans les délais. Je rappelle que plus de 490 000 étudiants bénéficient de bourses sur critères sociaux et que 199 000 étudiants perçoivent une bourse échelon 5, c'est-à-dire la plus élevée.
Par ailleurs, si nous nous félicitons de l'accélération qu'a connu cette année le paiement des bourses, il est important que les difficultés de trésorerie qui en résultent soient résolues au plus vite. Nous vous serions reconnaissants, monsieur le ministre, de bien vouloir faire le point à ce sujet.
Par ailleurs, quid de la situation d'un certain nombre d'étudiants qui, ayant obtenu l'essentiel de leurs diplômes, choisissent le statut social d'étudiant, mais ne sont plus vraiment étudiants.
S'agissant des autres programmes dont j'ai la charge et qui comprennent de nombreux opérateurs, je souhaite faire une remarque générale sur l'évaluation des actions conduites.
Tout d'abord, l'évaluation de la performance nécessite une certaine stabilité des indicateurs et de leur méthodologie, afin que les résultats puissent être observés sur plusieurs années. Or l'architecture des programmes a, cette année encore, connu de nombreuses modifications. Nous pouvons le comprendre, mais nous souhaiterions une plus grande stabilité.
En outre, un certain nombre d'indicateurs sont tributaires de la fiabilité des informations recueillies par les opérateurs. Dans cette perspective, la mise en place de systèmes d'information intégrés et l'élaboration systématique de protocoles méthodologiques permettraient d'améliorer la sincérité et l'homogénéité des informations transmises.
De ce point de vue, les projets annuels de performance ne sont pas encore de réels outils d'analyse.
Cela m'amène à souligner, s'agissant du programme « Recherche culturelle et culture scientifique », l'absence d'indicateurs concernant le Palais de la découverte et, plus largement, l'absence d'informations et de justification de la subvention accordée au Palais de la découverte, alors même que la totalité de sa subvention est inscrite sur la présente mission. Nous aurons l'occasion d'en reparler, puisque nous avons déposé un amendement. Le Parlement mérite d'être respecté, ce qui, en l'espèce, n'a pas été le cas.
Enfin, mon ultime remarque sera inspirée des deux premières années de vie de la LOLF. Au cours de l'examen de la loi de finances, nous raisonnons désormais par mission, regroupement cohérent de crédits concourant à la mise en oeuvre d'une politique publique. Toutefois, ce raisonnement apparaît partiel, puisque, s'agissant de l'exercice de régulation budgétaire, le découpage ministériel garde toute sa pertinence. À ce moment-là, nous arrivons à des blocages dont nous aurons l'occasion de nous entretenir puisque mon collègue Jean-Léonce Dupont présentera un amendement concernant l'enseignement supérieur agricole.
Ce budget va dans le bon sens. Au nom de la commission des finances, je vous invite à l'adopter, même si je pense qu'il faudra être rapidement capable d'affecter à la recherche, à la valorisation et à l'innovation des moyens extrêmement plus importants si nous voulons relever les défis face aux sociétés qui vont très vite et très fort en ce domaine.
Monsieur le ministre, je pense que c'est possible. Comme j'ai eu l'occasion de le dire aux syndicalistes de la recherche que j'ai reçus cette semaine, je suis partisan de consacrer beaucoup plus d'argent en la matière. Cette conviction, je la tire d'une comparaison : aujourd'hui, 20 milliards d'euros sont consacrés à l'ensemble de l'enseignement supérieur et de la recherche, contre 11 milliards d'euros pour réparer les dégâts occasionnés par la mise en place des dégâts des 35 heures. Si l'on voulait réfléchir à l'efficacité de la dépense publique, à l'avenir de notre jeunesse, au devenir de l'emploi, les crédits sont largement suffisants pour faire de votre ministère le plus important de notre pays.