Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le rapporteur pour avis des onze programmes de la mission « Recherche et enseignement supérieur » consacrés à la recherche que je suis, Jean-Léonce Dupont étant le rapporteur pour avis des deux programmes concernant l'enseignement supérieur et la vie étudiante, était tenté de commencer son intervention par le mot : « enfin ».
Enfin, en effet, une priorité, que, pour ma part, je réclame depuis vingt-deux ans à cette même tribune, est donnée à la recherche et à l'innovation !
D'abord, conformément à ses engagements et dans la droite ligne de la loi de programme que nous avons votée en avril dernier, le Gouvernement propose de poursuivre l'effort sans précédent engagé en faveur de la recherche et de l'innovation, et ce malgré un contexte de maîtrise accrue des dépenses publiques : il prévoit de mobiliser plus d'un milliard d'euros supplémentaires et de créer 1 000 nouveaux postes pour la recherche.
La commission des affaires culturelles s'en réjouit, comme elle se réjouit de toute une partie de ces programmes que je n'ai pas le temps d'évoquer ici du fait de la brièveté de ce débat, brièveté qui d'ailleurs, me semble-t-il, n'est pas à la mesure de l'importance que ces sujets revêtent. Il est en effet étonnant que les priorités de la nation que sont la recherche et l'enseignement supérieur, ainsi que l'écologie et le développement durable, alors que nous devons nous défendre contre le dérèglement climatique, soient examinées un vendredi soir et un samedi soir, voire dans la nuit !
Enfin tout de même, les programmes de la mission bénéficient non seulement d'une augmentation des crédits, mais aussi d'un pilotage de ces crédits, ce qui, à mon sens, constitue une réforme considérable qui s'apparente à celles qui sont conduites dans la plupart des pays les plus industrialisés.
Nous avons développé des agences, notamment l'Agence nationale de la recherche, l'ANR, renforcé l'OSEO-ANVAR, créé une nouvelle agence, l'Agence de l'innovation industrielle. Je remarque au passage que ces agences ne sont pas sous le contrôle direct du Parlement : elles ne sont même pas budgétisées de façon claire, en particulier en ce qui concerne l'ANR.
Nous avons appris, avec plaisir, que 300 millions d'euros supplémentaires, qui seront gérés par l'ANR, étaient alloués au financement des programmes liés aux réseaux thématiques de recherche avancée, les RTRA, et aux pôles de recherche et d'enseignement supérieur, les PRES.
C'est une raison de plus pour demander avec insistance, comme la commission des finances, qu'à l'avenir l'ANR soit budgétisée.
La commission des affaires culturelles regrette par ailleurs qu'un aspect essentiel fasse défaut au programme « Orientation et pilotage de la recherche », que nous aimerions voir intitulé « Orientation, pilotage et modernisation de la recherche », et que ce programme ait été privé de certains de ses éléments, alors qu'il devrait au contraire être renforcé dès à présent, question que nous évoquerons à l'occasion d'un amendement, notre objectif étant, comme celui de la commission des finances, que le Parlement puisse avoir une vision claire de ces éléments fondamentaux que sont le pilotage, l'orientation et la modernisation de la recherche.
Nous n'avons pas non plus beaucoup d'indications dans le projet de budget sur les « instituts Carnot ». Nous voulons faire des instituts Fraunhofer à la française, mais cette volonté n'apparaît pas dans les crédits.
Il faudra, monsieur le ministre, prendre une décision politique forte pour montrer qu'il existe des instituts Carnot, que vous en avez labellisés un certain nombre et que ces instituts devraient pouvoir se développer, y compris dans des universités qui ne sont pas encore labellisées. Il y a en effet là une dynamique qui incitera à la modernisation de nos universités.
Je voudrais aussi évoquer le système de « bottom-up » dans les appels à projets relevant de l'ANR, qui nous concerne tout particulièrement.
Nous nous interrogeons aussi, monsieur le ministre, sur le fait étonnant que vous n'ayez pas un contrôle sur plusieurs fonds interministériels importants, pilotés essentiellement à l'intérieur de la direction générale des entreprises par le ministère de l'industrie.
Je me réjouis cependant qu'un fonds interministériel ait été mis en place, car cela facilite les choses, même si le fonctionnement des différentes organisations et entreprises ne s'en trouve pas simplifié, chacune d'entre elles ayant développé un système d'expertises, expertises qui sont parfois longues, longueur qui, en matière d'innovation, me paraît parfaitement illusoire.
En effet, les projets sont en principe déjà étudiés. Ceux qui s'engagent financièrement devraient probablement le faire plus fermement dans les appels à projets, mais il me semble que la durée d'étude de ces appels à projets devrait être la plus brève possible, parce que l'innovation n'attend pas et elle est souvent en concurrence avec l'innovation émanant d'autres pays dont la dynamique est beaucoup plus forte.
Le fonds de compétitivité des entreprises disposera désormais, et je m'en réjouis, de 600 millions d'euros grâce à la simplification des procédures, et notamment grâce à la disparition de dispositifs très complexes qui posaient en particulier des problèmes aux pôles de compétitivité et qui auraient conduit à un certain nombre d'anomalies, à des transferts de sièges sociaux plus ou moins fictifs de façon à leur permettre de bénéficier d'avantages sociaux, et non pas fiscaux.
La formule retenue, qui consiste à avantager les PME de façon plus directe, me paraît donc une simplification très utile.
Les pôles de compétitivité ont correspondu à une forte mobilisation des acteurs dans toute la France. C'est une révolution tranquille des mentalités qui manifeste un espoir et un dynamisme retrouvés, mais, encore une fois, monsieur le ministre, je crois que l'ensemble de ces contrôles a priori devraient être renforcés par un contrôle a posteriori beaucoup plus puissant et systématique.
Enfin, nous avons voté avec notre collègue Philippe Adnot un amendement visant à inciter les structures financières à être plus dynamiques en matière de capital-risque. Ce n'est pas le sujet principal de votre ministère, mais vous savez bien, monsieur le ministre, qu'il faut promouvoir un financement massif de la recherche par un capital-risque renouvelé et renforcé.
On pourrait aussi envisager un prélèvement obligatoire sur les contrats d'assurance vie, mesure que le Sénat avait adoptée mais qui n'a pas été mise en place définitivement.
Une telle mesure correspond à une volonté qui commence à se manifester, mais cette volonté est insuffisante si on la compare à la dynamique extraordinaire en matière de transferts de technologie et de développement de l'innovation qui est nécessaire à notre pays.
En conclusion, monsieur le ministre, j'indique que la commission des affaires culturelles a, évidemment, émis un avis favorable à l'adoption des crédits destinés à la recherche dans la mission « Recherche et enseignement supérieur » et elle vous félicite pour la dynamique nouvelle dont, grâce aux programmes de cette mission, notre pays pourra bénéficier, à condition toutefois que l'on veille à leur application.