S'agissant des exécutions passées ou en cours, on relèvera que ce budget connaît globalement un très fort taux d'exécution, qui s'élevait à 97, 3 % en 2003. L'exercice 2003 aura été particulièrement difficile en raison de la régulation budgétaire qui a été menée. Il semble toutefois que les opérations de régulation budgétaire opérées en 2004 aient posé moins de difficultés du fait d'une meilleure préparation et de la mise en place d'un plan d'action adapté.
Globalement, le problème de ce budget paraît résider non pas tant dans la consommation des crédits que dans les insuffisances de certaines dotations, qui entraînent la formation de dettes, notamment à l'égard des organismes de sécurité sociale.
Un apurement des dettes de l'Etat aux organismes de sécurité sociale a été engagé en 2003, en particulier grâce à la loi de finances rectificative du 30 décembre 2003, ce qu'il faut saluer. Toutefois, ces dettes se maintiennent à un niveau élevé : le montant total des dettes de l'Etat au titre des dépenses imputées sur la section santé, famille, personnes handicapées et cohésion sociale s'élevait ainsi à 425, 3 millions d'euros au 31 décembre 2003.
Sous réserve d'ajustements en loi de finances rectificative, certaines de ces dettes pourraient au demeurant croître, dans la mesure où les crédits votés en loi de finances initiale pour 2004 se révèlent parfois insuffisants pour couvrir les dépenses constatées. Or, nous observons que cette situation est récurrente.
Ce budget repose essentiellement sur des crédits d'intervention. Les dépenses du titre IV représentent en effet près de 80 % des crédits de cette section budgétaire. On doit relever une forte inertie de certaines dépenses, dont le montant est très élevé et sur l'évolution desquelles les ministères concernés ont une prise assez réduite.
L'allocation aux adultes handicapés, l'AAH, représente près de 4, 85 milliards d'euros en 2005, soit 43, 3 % du budget total, et accuse une hausse de plus de 185 millions d'euros. Le financement des centres d'aide par le travail, les CAT, représente, quant à lui, près de 1, 14 milliard d'euros.
Le remboursement de l'allocation de parent isolé connaît également une hausse de 93 millions d'euros pour atteindre 862 millions d'euros en 2005.
A contrario, la contribution de l'Etat au fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie est en baisse sensible, moins 286 millions d'euros, grâce au transfert du produit de la cotisation sur les alcools de plus de 25 degrés à ce fonds, alors qu'elle était précédemment affectée à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS.
Ces quatre dépenses représentent, à elles seules, plus de 67 % des crédits du fascicule.
On relèvera que ce budget se recentre progressivement : la décentralisation, en 2004, du revenu minimum d'insertion et, en 2005, d'une partie des crédits consacrés à la formation des professions paramédicales et sociales, réduit le périmètre de ce budget de manière significative. Il est ainsi passé de 14, 8 milliards d'euros en 2002 à 11, 18 milliards d'euros en 2005.
On peut se demander si l'évolution ainsi amorcée va se poursuivre. Une clarification des interventions dans le domaine des actions en faveur des personnes handicapées pourrait ainsi être envisagée, alors qu'une Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, a récemment été créée. On notera en effet que, d'après les dispositions de l'article 76 du présent projet de loi de finances rattaché pour son examen aux crédits du travail, les 3 000 nouvelles places de CAT prévues en 2005 seront financées par cette caisse, et non par l'Etat, qui conserve toutefois des dépenses à ce titre.
Dès lors, monsieur le ministre, je voudrais connaître les intentions du Gouvernement en la matière. Quel rôle précis entendez-vous faire jouer à la CNSA ?
Quelle sera l'articulation entre cette caisse et les crédits de l'Etat, d'une part, et de la sécurité sociale, d'autre part ?
En dépit des observations précédentes sur l'inertie de certaines dépenses, le projet de budget pour 2005 de la santé, de la famille, des personnes handicapées et de la cohésion sociale traduit plusieurs priorités.
Premièrement, les crédits consacrés à la santé publique et à la sécurité sanitaire connaissent une augmentation sensible. En particulier, un effort est réalisé en matière de lutte contre le cancer, puisque 22 millions d'euros de mesures nouvelles sont consacrés à cette politique. De même, la mise en oeuvre du plan « Santé-environnement » témoignera d'un effort du ministère des solidarités, de la santé et des familles.
Deuxièmement, la rationalisation du paysage des agences de sécurité sanitaire et de santé est engagée : si le budget pour 2005 est marqué par l'apparition de la Haute Autorité de santé et de l'Agence de la biomédecine, qui font l'objet de mesures nouvelles, je voudrais saluer l'effort de rationalisation qui a été mené, dans la mesure où ces structures viennent non pas s'ajouter aux structures existantes, mais se substituer à certaines d'entre elles.
Le paysage des agences de sécurité sanitaire reste cependant touffu. Je souhaite donc savoir si des rapprochements entre certaines agences sont envisagés à l'avenir.
Troisièmement, la lutte contre les discriminations fait l'objet d'un effort particulier, avec la mise en place d'une nouvelle structure ad hoc, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité.
Quatrièmement, la maîtrise des dépenses de personnel est poursuivie : le budget pour 2005 se caractérise par une nouvelle réduction du nombre de postes budgétaires, soit 122 emplois, après une réduction de 94 emplois en 2004.
Cinquièmement, enfin, un effort de rebasage de certaines dotations est réalisé. Il en va ainsi, notamment, des dotations consacrées au remboursement de l'allocation de parent isolé, au fonds spécial d'invalidité ou au fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations. Il n'est toutefois pas certain que ce rebasage soit dans tous les cas suffisant, notamment s'agissant de l'allocation de parent isolé.
Si ce budget traduit certaines orientations bienvenues, je me dois toutefois de souligner que certaines dépenses ne paraissent pas maîtrisées et que certaines dotations allouées en 2005 ne paraissent pas en mesure de faire face aux besoins.
Trois dépenses peuvent à cet égard, comme l'an passé, être mises en évidence.
Tout d'abord, les dotations de l'aide médicale de l'Etat restent stables à 233, 5 millions d'euros, alors que la dépense constatée laisse présager une tendance de 500 millions d'euros. La dotation fixée paraît d'autant moins adaptée que le Gouvernement n'a pas mis en oeuvre toutes les réformes tendant à la modération de la dépense votées par le Parlement, en particulier l'instauration d'un ticket modérateur.
Ensuite, les frais de justice ne sont pas des dépenses maîtrisées même si ces crédits, régis par l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, sont des crédits évaluatifs.
Enfin, les dépenses liées au dispositif d'accueil d'urgence des demandeurs d'asile, en dépit d'un accroissement de la dotation allouée à cette action en 2005, continuent à croître de manière très importante, comme en témoigne l'ouverture par décret d'avances de 185 millions d'euros en 2004. La croissance de 28, 6 millions d'euros des crédits correspondants inscrits sur le chapitre 46 - 81 ne paraît pas à cet égard être en mesure de couvrir l'intégralité des besoins pour l'année 2005.
Ce constat est d'autant plus regrettable qu'il est récurrent et qu'il risque, de surcroît, de se traduire par une augmentation des dettes de l'Etat.
La commission des finances a longuement débattu de ces sujets et il nous importe d'obtenir certaines précisions du Gouvernement, en particulier s'agissant de l'aide médicale de l'Etat. Il nous paraît en effet anormal que des dispositions votées par le Parlement ne soient pas mises en oeuvre. Je voudrais donc savoir à quelle échéance le Gouvernement entend mettre en place l'ensemble de ces mesures d'économie et où en est l'élaboration du décret instaurant un ticket modérateur.
Par ailleurs, la Cour des comptes, dans son récent rapport relatif à l'accueil des immigrants et à l'intégration des populations issues de l'immigration, relève la difficulté d'apprécier l'ampleur réelle des crédits affectés à cette action.
Elle observe que la situation des dépenses qui en résultent est loin de répondre à l'exigence, renforcée par la loi organique relative aux lois de finances, de recherche d'un meilleur rapport entre coût et efficacité.
Elle met en évidence la multiplication des financements croisés qui complique la lisibilité des crédits consacrés à l'accueil et à l'intégration des immigrants. Quelle suite le Gouvernement entend-il donner aux observations de la Cour des comptes ?
Je voudrais enfin faire le point sur la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances.
Je me contenterai de rappeler que les crédits actuellement inscrits dans la section « Santé, famille, personnes handicapées et cohésion sociale » seront, à l'avenir, répartis en trois missions. Le découpage global proposé est plutôt satisfaisant, la distinction opérée entre les trois missions et entre les différents programmes apparaissant relativement pertinente.
Toutefois, on peut regretter que la maquette définitive n'ait pas tenu compte des remarques formulées par votre commission des finances sur les programmes support et, en particulier, que l'action support du programme « Veille et sécurité sanitaires » ne figure pas au sein de la même mission que ce programme.
Si ce découpage résulte de la structure actuelle des services du ministère de la santé et de la protection sociale et, en particulier, de celle de la direction générale de la santé, qui pilote ce programme, on peut penser que cette répartition pourrait évoluer à l'avenir. Quelle est l'intention du Gouvernement en la matière ?
Quant aux objectifs et aux indicateurs, mon rapport en donne une analyse détaillée et les nouvelles dispositions résultant de la loi organique relative aux lois de finances sont indiquées.
Je relèverai simplement qu'un effort important de réflexion a été fait par vos ministères et qu'il doit être encore dans certains cas poursuivi.
En effet, certains objectifs et indicateurs ne permettent pas d'apprécier réellement la performance. Trop larges ou trop vagues, ils excèdent manifestement la capacité d'action du ministère. D'autres s'apparentent à des indicateurs de moyens ou d'activité qui ne permettent pas de porter un jugement sur la qualité de la dépense.
Je voulais vous dire, au nom de la commission des finances, que nous serons à vos côtés pour vous accompagner dans ce travail de réflexion.
Sous réserve de ces observations et de l'amendement qu'elle vous proposera tout à l'heure, la commission des finances propose d'adopter les crédits de la santé, de la famille, des personnes handicapées et de la cohésion sociale pour 2005.