Intervention de Philippe Douste-Blazy

Réunion du 6 décembre 2004 à 9h30
Loi de finances pour 2005 — Ii.- santé famille personnes handicapées et cohésion sociale

Philippe Douste-Blazy, ministre :

Monsieur Paul Blanc, je tiens à vous remercier des différentes appréciations que vous avez portées sur ce budget et de la qualité de votre rapport.

Je laisserai le soin à Mme Montchamp de vous répondre sur les questions nombreuses que vous avez posées sur la politique du handicap.

Vous mentionnez la dette de l'Etat vis-à-vis de la sécurité sociale et plus précisément les 177 millions d'euros dont l'Etat resterait redevable à la branche famille au titre de l'AAH et de l'API.

Je tiens tout d'abord à préciser que le projet de loi de finances rectificative pour 2004, qui sera prochainement débattu, prévoit le financement par l'Etat de 101 millions d'euros au titre du déficit prévisionnel 2004 de la dépense résultant de cette allocation.

Par ailleurs, je précise que, pour les caisses de sécurité sociale, qu'il s'agisse de la branche famille ou de l'assurance maladie que vous avez mentionnées, la comptabilité est tenue en droit constaté.

Ainsi, si les crédits correspondant au déficit prévisionnel de l'API ne sont pas inscrits en loi de finances cette année, le déficit constaté n'aura pas d'incidence sur les comptes mais bien sur la seule trésorerie de la CNAF. Je veillerai à ce qu'en fin d'exercice 2005 les crédits afférents à la dette de l'Etat au titre de l'API puissent être versés à la CNAF.

Monsieur Barbier, je tiens aussi à vous remercier de vos appréciations.

Je voudrais en premier lieu répondre à votre question sur la répartition des crédits dévolus aux politiques publiques que je conduis, aussi bien dans le champ de la santé, de la sécurité sanitaire, de la solidarité et de l'intégration.

Dans la perspective de la mise en oeuvre de la LOLF en 2006, j'ai d'ores et déjà engagé des expérimentations, dont j'ai déjà eu l'occasion de parler.

Le Gouvernement a également produit des documents à destination du Parlement qui sont les avant-projets annuels de performances des programmes.

J'ai pu constater, à cette occasion, les efforts importants que nous devions fournir pour améliorer l'information à destination de la représentation nationale, et j'ai entendu ce que M. Jégou a dit tout à l'heure en commençant son propos.

Vous le savez, pour les politiques que je conduis, les modes de financement se complètent : financement budgétaire de l'Etat, des collectivités locales et des caisses de sécurité sociale.

Ce que vous me demandez finalement est d'améliorer la présentation des différents canaux de financement de ces politiques publiques. Je ne peux que souscrire à cette demande, monsieur le rapporteur pour avis.

Ce principe a d'ailleurs été le mien dans le cadre de l'élaboration de l'avant-projet annuel de performance du programme « Handicap et dépendance », dans lequel vous trouverez, par action, la part de l'intervention de l'Etat dans les six actions de ce programme au regard de la dépense publique globale sur ces politiques.

Dès lors, je m'engage à ce que les prochains documents budgétaires précisent de la même manière la part portée par l'Etat dans le financement public des politiques que je mène.

Vous m'avez également interrogé sur la grippe aviaire.

Parmi les menaces infectieuses auxquelles nous nous préparons, celle d'une pandémie grippale est redoutée. La grippe est une infection virale saisonnière, le plus souvent bénigne, réputée banale bien qu'elle entraîne chaque année plusieurs milliers de décès.

Le XXe siècle a connu trois pandémies grippales. La plus récente est la grippe de Hong-Kong, apparue en 1968, qui provoqua en France plus de 30 000 décès.

La grippe, pour vous, pour moi, n'est pas un sujet d'inquiétude. Pour une personne âgée, malade, affaiblie ou pour un malade grave, c'est tout le contraire.

La plus meurtrière des pandémies fut, en 1918, celle de la grippe espagnole, qui fit plus de vingt millions de morts dans le monde et qui toucha de 20% à 40 % de la population.

Bien qu'il ne soit pas possible de savoir quand se produira la prochaine pandémie, la situation actuelle apparaît préoccupante. Pourquoi ?

Depuis janvier 2004, est apparue, dans plusieurs pays d'Asie, une épizootie de grippe aviaire H5N1, très étendue et incontrôlée. Douze personnes sont mortes en Thaïlande, vingt au Vietnam, après avoir été contaminées directement par des volatiles malades. Il faut savoir que le virus se contracte non par leur ingestion mais à leur contact.

Bien que, à ce jour, aucun cas de transmission interhumaine n'ait été déclaré par l'Organisation mondiale de la santé, l'OMS, la question qui se pose est bien de savoir si une contamination interhumaine est possible.

Aujourd'hui, un seul cas d'une telle contamination est avéré, entre une mère et sa fille. Cependant, il a été estimé qu'il ne s'agissait pas, d'un point de vue épidémiologique, d'une contamination interhumaine efficace. En effet, une contamination interhumaine est dite efficace lorsqu'une personne infectée en contamine au moins 5, 10 ou 15 autres.

Le risque d'adaptation du virus aviaire à l'homme par réassortiment génétique est réel bien qu'impossible à évaluer. Cela dit, arrêtons de faire peur à la population, même si la situation, à un moment donné, en cas de réadaptation génétique du virus, pourrait être dramatique.

A ce titre, je tiens à préciser que le diagnostic de grippe aviaire évoqué chez une personne hospitalisée au centre hospitalier universitaire de Nancy à la suite d'un séjour au Vietnam et au Cambodge est écarté. Les résultats en provenance du centre national de référence, l'Institut Pasteur de Paris, sont négatifs.

Nous sommes mieux armés qu'avant pour faire face à cette menace.

Comme plusieurs autres pays, et en coordination avec l'OMS, la France a entièrement réactualisé, en début d'année, son plan de prévention et de lutte contre la pandémie grippale.

Le plan actuel est en application depuis le début de l'année et le niveau d'alerte a été majoré le 13 août lors de la réapparition de cas humains au Vietnam. Je l'ai présenté en conseil des ministres le 13 octobre dernier.

Un système de veille très efficace nous permet d'identifier immédiatement toute nouvelle souche virale chez l'animal ou chez l'homme, de surveiller ses variations génétiques et d'identifier un risque de nouvelle épidémie de grippe dès les premiers cas humains. L'OMS assure la coordination de cette surveillance et la mobilisation de l'expertise internationale, ce qui lui permet de fixer les niveaux d'alerte.

En France, la surveillance de la grippe repose sur deux centres nationaux de référence, l'Institut Pasteur de Paris et celui de Lyon, et sur deux réseaux de surveillance clinique, le réseau des groupes régionaux d'observation de la grippe, les GROG, et le réseau Sentinelles de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, l'INSERM. Evidemment, l'Institut national de veille sanitaire, l'INVS, y est associé.

Le vaccin constitue l'arme la plus efficace. Cependant, il ne pourra pas être disponible au début de la pandémie ; il ne le sera qu'au bout de quatre à six mois. Des discussions sont en cours avec les principaux producteurs de vaccins pour en déterminer les conditions de développement et de production.

L'autre arme, ce sont les antiviraux. Ils sont efficaces contre le virus de la grippe et contre la plupart des souches virales grippales Ces antiviraux doivent être disponibles en début de pandémie. Leur production mondiale étant limitée, il est donc nécessaire d'en avoir constitué des stocks.

Je fais partie de ceux qui ont demandé tout de suite aux producteurs de médicaments antiviraux que la France soit le premier pays à être prêt. Nous avons en constitué un stock très important, puisque nous avons acquis aujourd'hui près de quatre millions de traitements, dont huit cent mille sont immédiatement utilisables. Trois millions le seront dès avril 2005. Dix autres millions seront la propriété de l'Etat d'ici à la fin de l'année 2005. Nous disposerons à cette date des treize millions de traitements correspondant à l'évaluation de nos besoins.

A titre de comparaison, les Etats-Unis annoncent avoir acheté, fin août, un million de traitements alors qu'ils évaluent leurs besoins à cent fois cette quantité. Aucun autre pays que le nôtre n'a fait un tel effort.

En outre, les personnes voyageant dans les zones à risques sont informées. Une nouvelle série d'affiches, élaborées avec l'Institut national de la promotion et de l'éducation pour la santé, l'INPES, et l'INVS, seront disponibles le 1er janvier 2005 pour les voyageurs se rendant en Asie ou en revenant.

Enfin, les médecins et les infirmières sont également informés de la conduite à tenir. Ils doivent orienter les patients suspects vers les centres 15, qui ont été équipés pour les prendre en charge, en évitant la propagation du virus grâce, notamment, à la mise en place de procédures spécifiques sécurisées et à la mise à disposition de masques.

Monsieur Barbier, vous avez également évoqué les médecins spécialistes, dont les honoraires sont bloqués depuis dix ans. Vous avez aussi parlé des chirurgiens. Il est vrai que leur lettre KCC n'avait pas augmenté depuis quinze ans. Nous nous en sommes occupés en août dernier et nous continuons à le faire.

L'effet de la réforme de l'assurance maladie se fait déjà sentir. En effet, désormais, le directeur de la CNAM et le directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, l'UNCAM, peuvent négocier avec les syndicats. Nous sommes en présence d'un exécutif fort. Nous croyons, pour notre part, au dialogue social. Les différents syndicats représentatifs des médecins spécialistes et généralistes sont en pourparlers avec l'UNCAM et je suis persuadé que, dans l'intérêt général, ils aboutiront très vite à un accord pour le bien de toute la population française.

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