Intervention de Yves Pozzo di Borgo

Réunion du 1er décembre 2007 à 9h30
Loi de finances pour 2008 — Action extérieure de l'état

Photo de Yves Pozzo di BorgoYves Pozzo di Borgo, rapporteur pour avis :

Monsieur le ministre, il faudrait peut-être retrouver cet état d'esprit dans la situation dans laquelle nous nous trouvons. Cette remarque personnelle n'engage en rien la commission.

De nombreux exemples, tant dans le domaine administratif que dans le secteur privé, démontrent que l'augmentation des moyens financiers et humains n'est pas la condition nécessaire et suffisante du renforcement de l'efficacité et que, parfois même, cette croissance conduit à l'inverse de l'effet recherché.

C'est pourquoi, et alors que le précédent secrétaire général du ministère évoque, devant la commission du Livre blanc diplomatique, un doute des services « sur leur capacité à remplir toutes leurs missions », doute qui porte également sur « l'objet même de ces missions, à l'heure des nouveaux enjeux que constituent les questions migratoires, environnementales et énergétiques », il faut s'interroger sur les voies à suivre pour adapter à la nouvelle donne mondiale notre ministère des affaires étrangères, dont nous sommes légitimement fiers, notamment du fait de sa grande qualité d'expertise et de la compétences de ses collaborateurs. Il faut donc, à l'évidence, en faire évoluer les structures, et particulièrement ses réseaux d'implantations à l'étranger, pour en renforcer les capacités et faciliter leur adaptation aux nouveaux pôles de puissance qui émergent en Amérique latine, en Afrique ou en Asie.

Je ferai juste une parenthèse pour dire que Robert Hue, André Dulait et moi-même avons établi voilà deux ans un rapport d'information sur la situation en Afrique. Nous avons constaté - cette remarque figure dans notre rapport - que les grands pays étaient maintenant le Nigeria, l'Angola et l'Afrique du Sud et qu'il serait peut-être nécessaire que notre réseau diplomatique s'adapte aux évolutions de ces pays.

Notre réseau diplomatique ne doit pas être réduit, ne serait-ce que parce qu'il a été explicitement démontré dès 2005, dans le rapport confié au préfet Raymond Le Bris sur les réseaux français à l'étranger, que la fermeture des dix ou vingt plus petites ambassades françaises produiraient des économies insignifiantes au regard du coût politique qui en découlerait pour l'image de notre pays. Il conviendrait cependant de renforcer les capacités, limitées, de ces petits postes par la création de pôles diplomatiques régionaux, qui seraient chargés de définir les priorités et de constituer des centres d'analyse et d'expertise susceptibles d'appuyer les petites ambassades.

S'agissant de notre réseau consulaire, je livre à votre réflexion l'annonce récente, faite par le Portugal, de la restructuration de son réseau consulaire en France. Le secrétaire d'État aux communautés portugaises à l'étranger, M. Antonio Braga, a déclaré à cette occasion à Paris, le 27 octobre dernier, « qu'il fallait moderniser un réseau conçu il y a plus de trente ans, en France comme ailleurs dans le monde ». Il a également indiqué qu'il s'agissait, « par une profonde réforme de notre administration publique, de fournir un meilleur service aux personnes, par le regroupement des centres consulaires et le développement de consulats virtuels sur Internet, pour permettre à nos ressortissants d'avoir accès, en ligne, à des documents de base sans avoir à se déplacer ».

En prenant conscience que l'Europe à quinze n'est plus une terre totalement étrangère, à la différence de certaines zones du Pérou, du Nigeria ou de l'Inde du Nord, nous pourrions utilement appuyer nos compatriotes dont l'expatriation requiert un soutien fort de la France.

Mais notre sujet majeur de préoccupation tient, vous le savez, au financement de nos contributions internationales obligatoires.

Si notre apport à certaines organisations majeures, appartenant à la galaxie de l'ONU, doit être compté en proportion de la qualité de leur gestion interne, parfois plus axée sur l'autofonctionnement que sur les interventions sur le terrain, nos contributions aux opérations de maintien de la paix sont, elles, soumises à une logique de crédibilité. Comment réclamer la création de nouvelles opérations si nous n'apportons pas la part qui nous incombe à celles qui sont en cours ?

Vos propres services évaluent la différence entre les crédits inscrits au projet de loi de finances pour 2008 pour nos contributions obligatoires et les financements effectivement requis à 70 millions d'euros : 215 millions d'euros seront disponibles alors qu'il en faudrait 285 millions, sans compter les futures opérations devant être déployées au Tchad, puis au Darfour.

Je souhaiterais, pour le Tchad, qui vient d'être à nouveau touché par des combats à sa frontière avec le Soudan, que vous nous précisiez l'état actuel des engagements humains et financiers pris par nos différents partenaires et le calendrier envisagé pour cette action « Eufor Tchad ».

À titre personnel, j'ai participé, avec M. François-Poncet, à une délégation de la commission des affaires étrangères à l'ONU, et nous avons ressenti dans l'ensemble de nos contacts, vous le savez certainement, une certaine inquiétude sur cette opération.

Sous ces réserves, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous recommande d'adopter les crédits affectés à la mission « Action extérieure de l'État » pour 2008.

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