Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'examen chiffré de la mission « Action extérieure de l'État », des esprits chagrins pourraient relever que la francophonie est le parent pauvre de la loi de finances, que les ressources allouées sont quasi constantes par rapport au budget précédent et qu'une relative réduction des effectifs se poursuit.
Le redéploiement du personnel ne doit se justifier que s'il s'inscrit dans un processus de rationalisation, qui, pour ma part, me semble engagé : le regroupement des services centraux de neuf à deux sites me paraît, de ce point de vue, une très bonne initiative.
Néanmoins, l'essentiel est ailleurs. L'heure est bien à une profonde transformation des interactions entre les États sur la scène internationale et à la prévalence de nouveaux enjeux, deux processus dont la France doit tenir compte afin d'accompagner ces mutations au lieu de les subir. L'examen de la mission « Action extérieure de l'État » est l'occasion de le rappeler.
L'absence d'une autorité centrale, reconnue comme telle par les États, définit notre système international comme une anarchie plus ou moins régulée, fondée depuis l'ère westphalienne sur une coexistence concurrente pacifique. L'opération « Liberté en Irak » de mars 2003 a, semble-t-il, infléchi cette conduite dans le sens d'une radicalisation de la vision de l'autre : le « rival » est désormais reconsidéré comme un « ennemi ». De même, l'existence depuis le 11 septembre 2001 d'une figure nouvelle de l'ennemi invisible et transnational qui vise à la déstabilisation d'un ordre régional nous fait entrer dans cette nouvelle ère « post-westphalienne », évoquée par certains experts.
De surcroît, la crise socio-économique de pays émergents - je pense aux émeutes de la faim en Argentine à l'automne 2001 -, les crises politiques africaines et moyennes orientales, les désastres climatiques n'invitent guère à l'optimisme.
Comment la France doit-elle se situer dans un tel système ?
L'indépendance nationale ne signifie aucunement l'isolement. Et l'on ne peut que soutenir les démarches du Président de la République qui vont en ce sens, notamment dans le cadre d'une action européenne. L'Europe doit parler d'une seule voix.
Je salue l'impulsion donnée par la France dans la rédaction d'un nouveau traité modificatif, recentré sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui sera signé ce mois-ci lors de la prochaine rencontre de Lisbonne. La création d'un Haut responsable pour la politique étrangère de l'Union, acté dans le projet du traité simplifié, permettra que les différences de vues préalables, inéluctables, ne soient plus transformées en manifestations extérieures de dissensions.
Le 17 novembre dernier, à l'issue du séminaire gouvernemental de préparation de la prochaine présidence française de l'Union, le Premier ministre a évoqué la nécessité d'associer les collectivités locales à cette présidence. Le groupe du Rassemblement démocratique et social européen sera soucieux de rappeler au Gouvernement que seul l'enracinement local est apte à légitimer l'Union auprès des citoyens.