Enfin, le projet d'Union méditerranéenne suscite beaucoup d'attentes. Monsieur le ministre, comment ferez-vous en sorte qu'il ne creuse pas un nouvel écart entre la France et ses partenaires européens ?
J'en viens au deuxième sujet d'interrogation forte : le sort de notre réseau culturel à l'étranger et les risques de disparition de la DGCID, la Direction générale de la coopération internationale et du développement.
Monsieur le ministre, j'ai la conviction que, parmi les axes stratégiques du ministère des affaires étrangères, la défense de notre langue, l'action de coopération culturelle et scientifique ainsi que la promotion de diversité culturelle sont une composante essentielle, et certainement pas accessoire. C'est à partir de là qu'il faut évaluer les réformes d'organisation administrative que vous envisagez.
Vous avez déjà indiqué que des décisions seraient prises à ce sujet d'ici au mois de mars prochain. S'il est sans doute nécessaire d'envisager une nouvelle évolution de la DGCID, vers quelle réforme se dirige-t-on exactement, du moins quelle réforme souhaitez-vous ? La dernière date de 1998 avec la réunion du ministère de la coopération et du ministère des affaires étrangères, et la création de la Direction générale de la coopération internationale et du développement.
Le monde change vite. Il est légitime de songer à un nouveau départ dix ans plus tard, pour gérer des actions réclamant avant tout de l'imagination, de la souplesse et de la réactivité. Mais va-t-on pour cela poursuivre la « vente à la découpe » de la DGCID, déjà bien amorcée, au bénéfice d'opérateurs spécialisés ? Il se dit, en effet, que se prépare la mise en place de deux grands opérateurs autonomes, l'un pour la culture, l'autre pour la coopération scientifique universitaire, la DGCID devenant une direction beaucoup plus ramassée, chargée seulement de piloter l'ensemble. Certains évoquent même l'hypothèse de son absorption complète dans une grande direction transversale. Je crois, monsieur le ministre, que ce dispositif éclaté nous conduirait à de graves déboires. Le dispositif doit être réformé, mais sans jeter le bébé avec l'eau du bain.
Si la DGCID doit ne plus être paralysée par les contraintes de gestion d'une administration centrale, elle mérite aussi d'être fortifiée, par exemple en devenant une grande agence de coopération culturelle, scientifique et universitaire, dotée de son propre réseau, car c'est le réseau qui fait notre force à l'étranger. Elle aurait tout naturellement sa place auprès des deux agences déjà existantes, l'Agence française de développement, l'AFD, et l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'AEFE, ainsi que des opérateurs chargés de l'audiovisuel extérieur. Le ministère des affaires étrangères pourrait assurer le pilotage stratégique de l'ensemble grâce à une direction transversale, pour peu que celle-ci soit dotée des moyens financiers et humains nécessaires.
Je reviens un instant au réseau culturel, monsieur le ministre. Le montant de la subvention versée aux centres et aux instituts culturels est en diminution constante ces dernières années. Cette dotation est ainsi passée de 68 millions d'euros en 2002 à 61 millions d'euros en 2007. Plus du tiers des centres et des instituts culturels situés en Europe ont été fermés entre 2000 et 2007, avec parfois un coût très élevé, par exemple à Bilbao : 1 million d'euros. On leur demande d'augmenter toujours plus leur taux d'autofinancement. Dès lors, une question s'impose : l'État souhaite-t-il toujours conduire une action culturelle extérieure volontariste ? Nous attendons vraiment du Gouvernement qu'il prouve par ses décisions dans les mois à venir qu'il prend bien la mesure de l'enjeu que constitue l'action culturelle extérieure en tant qu'instrument irremplaçable de notre influence dans le monde.