Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, n'occupant que quelques minutes dans la discussion budgétaire, la mission « Remboursements et dégrèvements » est pourtant la plus importante mission du projet de loi de finances pour 2008 en termes de crédits ouverts, nonobstant leur caractère évaluatif.
Dans son rapport introductif, ma collègue et amie Marie-France Beaufils a souligné, une fois encore, les limites inhérentes à l'existence de cette mission dont les très importants crédits, au caractère disparate, participent en réalité de politiques publiques retracées dans d'autres missions budgétaires.
Les crédits ouverts dans cette loi de finances au titre de la mission « Remboursements et dégrèvements » sont particulièrement importants, atteignant en effet la somme faramineuse de 83, 16 milliards d'euros, soit plus que les crédits retracés, par exemple, dans les missions « Enseignement scolaire » et « Recherche et enseignement supérieur ». La hausse sur 2007 n'est pas négligeable puisqu'elle atteint 6, 7 milliards d'euros. Elle est due essentiellement à la progression des crédits de TVA, qui augmentent de plus de 3 milliards d'euros, et à celle des allégements d'impôt sur les sociétés, à hauteur de 600 millions d'euros, et de taxe professionnelle, pour 1, 9 milliard d'euros.
Figure également dans ces crédits évaluatifs le coût du bouclier fiscal, dont nous avons dénoncé le caractère inique lors de la discussion de la première partie de ce projet de loi de finances et dont il apparaît clairement, à l'examen de la campagne fiscale de 2007, qu'il est loin d'avoir rencontré le succès que ses promoteurs en attendaient.
Contrairement à une assertion défendue lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2007, le bouclier fiscal ne concerne pas vraiment de petits contribuables, puisque le niveau des remboursements moyens dépasse les 50 000 euros et que moins de 3 % des bénéficiaires annoncés se sont fait connaître des services fiscaux. Le bouclier fiscal est l'illustration parfaite d'une disposition de caractère profondément idéologique, nouveau cadeau fait au pouvoir d'achat des plus riches, loin de l'égalité devant l'impôt, fondement de notre République.
Cependant, pour mieux appréhender les réalités, le caractère évaluatif des crédits de la mission ne peut que nous inciter à examiner les dépenses effectivement réalisées en 2007. En effet, si l'on se réfère au projet de loi de finances rectificative que nous discuterons en fin d'année, les crédits de la mission ont connu une évolution sensible.
Si le niveau de la TVA déductible s'est légèrement contracté - nous sommes loin des attentes de croissance prévues en loi de finances initiale -, si les exonérations liées aux impositions locales s'avèrent finalement légèrement moins importantes elles aussi, il n'en va pas de même de l'un des éléments les plus dynamiques de la mission.
Il s'agit des correctifs apportés par la législation fiscale au rendement de l'impôt sur les sociétés et, notamment, le principe de report en arrière sur les déficits antérieurs ou de remboursement des acomptes trop importants. Pour 2007, cette somme s'élèverait dans le projet de loi de finances rectificative à plus de 12 milliards d'euros, alors même que la mission prévoit, pour 2008, une incidence de cette mesure « limitée » - excusez du peu ! - à 9, 9 milliards d'euros. Manifestement, l'optimisation fiscale est largement en oeuvre dans notre pays !
D'autant que les crédits inscrits ne constituent qu'une partie des sommes que l'État consacre à l'allégement des charges fiscales pesant sur les entreprises. En effet, figurent dans le document d'évaluation des voies et moyens les sommes que nous consacrons chaque année à moult dispositions incitatives, dont le crédit d'impôt recherche, la taxation séparée des plus-values ou le régime des groupes ne sont que quelques illustrations.
Nous devons, à notre sens, nous poser la question de l'existence de cette mission à deux titres.
Premièrement, la cohérence même de cette mission et le fait qu'elle se substitue bien souvent à des politiques publiques placées sous le sceau « naturel » de la dépense budgétaire plaident en faveur de sa suppression.
Que pèsent par exemple les crédits des missions « Développement et régulation économiques », « Pilotage de l'économie française », « Écologie, développement et aménagement durables », « Politique des territoires » et « Relations avec les collectivités territoriales » qui représentent tous ensemble un volume de moins de 16 milliards d'euros, au regard des 44 milliards d'euros prévus pour la seule déductibilité de la TVA ?
Deuxièmement, nous devons clairement nous interroger sur le sens de politiques publiques qui ne cessent de restreindre et de comprimer la dépense publique directe au profit de la dépense fiscale - ici imparfaitement retracée - et du service d'une dette improductive de patrimoine collectif.
Compte tenu de ces observations, le groupe communiste républicain et citoyen ne votera pas les crédits de cette mission.