Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits destinés à la politique de la famille représenteront, en 2005, pratiquement 1062 millions d'euros.
Comme l'an dernier, les principales mesures prises en faveur de la famille figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, que nous avons examiné voilà peu, projet de loi bien décevant pour les familles, ainsi que j'ai eu l'occasion de le souligner, surtout pour les familles en difficulté ou en situation de précarité, et pour les adolescents, qui ne verront pas se concrétiser les objectifs, pourtant bien ambitieux, annoncés par les conférences de la famille de 2002 et de 2004.
Ainsi, il est prévu, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, un entretien de santé personnalisé en classe de cinquième. C'est une mesure que j'ai proposé en vain de rendre obligatoire, pour qu'elle trouve sa pleine efficacité.
Il est également prévu, dans ce texte, le doublement de la prime d'adoption. Nous ne bouderons pas cette mesure, même si - nous le savons - le montant de cette aide est insuffisant face au coût d'une adoption à l'étranger.
Demeurent donc à la charge de l'Etat essentiellement des dépenses de transferts, c'est-à-dire principalement l'allocation de parent isolé, l'API.
Elle a pour objet d'aider les personnes, essentiellement des femmes, qui assument seules la charge d'un ou de plusieurs enfants. Elle profite à presque 5 % des bénéficiaires de minima sociaux et concerne principalement des jeunes femmes ayant à charge un seul enfant de moins de trois ans. Cette allocation était versée, en décembre 2003, à environ 188 000 personnes, soit une évolution de 4, 4 %.
En 2004, la réforme de la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, a failli remettre en cause gravement l'API. En effet, l'instauration, à compter du 1er janvier 2004, de la PAJE, lésait les mères isolées les plus pauvres touchant l'API. Ces mères, avec un enfant né après le 1er janvier 2004, auraient pu toucher jusqu'à 1 300 euros de moins que celles qui, se trouvant dans la même situation, avaient un enfant né avant cette date. Ce sont 400 000 jeunes mères qui auraient été lourdement pénalisées.
Sous couvert de réformer l'accueil du jeune enfant, le Gouvernement n'aurait-il pas voulu faire des économies au détriment des mères isolées ?
En ce qui concerne les interventions en faveur de l'enfance à l'échelon central, nous examinerons les crédits destinés au défenseur des enfants, autorité administrative indépendante chargée de défendre et de promouvoir les droits de l'enfant et qui reçoit des réclamations individuelles d'enfants mineurs ou de leurs représentants légaux estimant qu'une personne privée ou publique n'a pas respecté leurs droits.
Le défenseur des enfants a été institué par le législateur le 6 mars 2000. Son rôle est, aujourd'hui, totalement incontestable et pleinement reconnu. Le présent projet de loi prévoit de reconduire en 2005 la dotation de 2004, soit un peu plus de 1, 907 million d'euros.
Les actions en faveur de la famille et de l'enfance à l'échelon déconcentré, qui comprennent, entre autres, la médiation familiale, le soutien à la parentalité et les actions en faveur de la jeunesse, représenteront 18, 19 millions d'euros et diminueront donc de 8, 8 %.
J'aimerais profiter du temps de parole qui m'est imparti aujourd'hui pour évoquer le trentième anniversaire de l'adoption de la loi Veil, qui représenta une réelle avancée historique.
En trente ans, de 1974 à 2004, le droit à l'IVG a incontestablement amorcé un virage idéologique.
Le 29 novembre 1974, au coeur de la nuit, Simone Veil, dont je tiens à saluer le courage politique, défendait avec force et conviction un projet de loi historique dépénalisant l'IVG et le faisait adopter, au terme de débats houleux et d'une rare violence, par une assemblée qui comptait alors neuf femmes sur 490 députés.
L'adoption de la loi Veil venait légaliser une pratique répandue et déjà acceptée par une partie de la société française. Elle mettait fin à des pratiques clandestines estimées à 300 000 par an, pratiques dont l'issue se révélait souvent dramatique pour les femmes.
Il a, cependant, fallu attendre 1982 pour qu'une nouvelle étape cruciale permette à toutes les catégories sociales d'avoir un accès libre et égal à l'IVG : ce fut la loi Roudy, qui instaurait le remboursement de l'IVG par la sécurité sociale.
La loi Aubry de 2001 apporta une pierre de plus à l'édifice, mais son application reste, aujourd'hui encore, difficile : les délais d'attente sont trop longs, les refus de pratiquer l'IVG au-delà de dix semaines de grossesse obligent encore trop de femmes se trouvant hors délais à partir à l'étranger, les réticences pour accueillir les mineures sans autorisation parentale sont trop nombreuses, sans compter de trop grandes disparités régionales.
Il aura fallu batailler et dénoncer la non-publication des textes réglementaires nécessaires à son application, notamment celui qui permet la mise en oeuvre de l'IVG médicamenteuse. Les femmes auront dû attendre trois ans de plus pour pouvoir y recourir hors des structures hospitalières, l'arrêté d'application n'ayant été signé que l'été dernier.
L'IVG par voie médicamenteuse, moins traumatisante et beaucoup plus facile à réaliser, n'est pas pour autant un acte gratuit, même s'il est acquis depuis peu qu'elle est remboursée à 70 % par la sécurité sociale. Son coût pourrait dissuader les adolescentes et les femmes en situation difficile ou qui ne disposent pas de mutuelle. En effet, elles doivent passer cinq consultations médicales.
A quand, monsieur le ministre, une prise en charge totale par l'assurance maladie ?