Intervention de René Teulade

Réunion du 12 janvier 2010 à 14h30
Pénibilité emploi des seniors âge de la retraite : quelle réforme en 2010 — Débat d'initiative sénatoriale

Photo de René TeuladeRené Teulade :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, quelle réforme sera décidée en 2010 ?

Au cours de la décennie qui vient de s’écouler, tous les responsables politiques, y compris au plus haut niveau, ont affirmé la nécessité de procéder à des réformes pour garantir l’avenir des retraites par répartition, qui est, selon leurs propres termes, l’expression de la solidarité entre les générations et, de ce fait, un facteur de cohésion sociale. Tous ont souligné que, pour être comprises et acceptées par les Français, ces réformes devaient faire l’objet d’une véritable concertation et qu’elles ne devaient pas opposer retraités et cotisants, secteur privé et secteur public et, au sein de celui-ci, les différents régimes. La Haute Assemblée est naturellement convaincue de cette nécessité.

De même, l’allongement de l’espérance de vie est la donnée fondamentale, permanente et structurante à partir de laquelle doit s’articuler toute notre réflexion. Contrairement à ce que l’on peut dire parfois, c’est un progrès considérable pour l’humanité.

Ainsi, loin de se limiter à un simple débat financier, la question des retraites relève d’un choix de société.

Par ailleurs, l’avenir des retraites constitue, comme l’ensemble des problèmes économiques et sociaux, une question vivante et mouvante pour laquelle il n’y a pas de solution définitive, et qui nécessite des adaptations progressives et successives en fonction des réalités du moment.

Si l’on veut éviter de privilégier les deux instruments immédiatement utilisables que sont la baisse du niveau des retraites et la hausse des prélèvements obligatoires, dans une réflexion qui ne peut dépasser dix ans, d’autres éléments doivent entrer en ligne de compte tels que l’emploi, l’augmentation des effectifs cotisants, la réduction du temps de travail, le taux de croissance et le partage de ses fruits, les politiques salariales, l’assiette des cotisations ou la place que notre société entend faire aux retraités.

En effet, après la période de formation et celle de l’activité professionnelle, vient de façon plus ou moins progressive, selon les situations individuelles, le temps de la « troisième vie ». Il permet aux aînés de jouer dans la société un rôle actif sur le plan social et économique.

Faut-il rappeler que 30 % des maires ont plus de soixante ans ou que les seniors ayant cessé leur activité professionnelle prennent une part souvent importante dans la vie de proximité ou au sein des associations et des syndicats ?

Dans une société où le temps fait souvent défaut aux actifs, les jeunes retraités soutiennent fréquemment leurs parents, notamment lorsque ces derniers sont confrontés au handicap, ainsi que, sur le plan financier, leurs enfants et leurs petits-enfants.

La fin de l’activité professionnelle n’est pas la fin de l’activité économique et sociale.

Renverser l’attitude à l’égard des fins de carrière afin de faire mieux coïncider cette interruption avec la durée allongée des cotisations nécessite une évolution des comportements des entreprises et des salariés, mais aussi une adaptation des dispositifs existants.

La cessation brutale et anticipée de l’activité constitue un gaspillage d’expérience et de savoir. Elle se traduit souvent par des problèmes de santé liés à la rupture des rythmes de vie acquis et à un sentiment d’inutilité sociale.

Il conviendrait de mettre en œuvre au sein des entreprises une politique nouvelle concertée et négociée de gestion des âges, notamment lors des deuxièmes parties de carrières professionnelles, lorsque les métiers sont éprouvants et ne peuvent être poursuivis au-delà de soixante ans.

Le problème des retraites et de leur avenir est un problème dont les enjeux sociaux et économiques sont considérables. Le choix fait il y a soixante ans d’un système fondé sur la répartition, nous le disons avec force, n’est pas négociable, car il a permis au plus grand nombre d’accéder, par une retraite décente, à la dignité dans cette troisième partie de la vie.

Quelles que soient les évolutions démographiques, dont personne ne néglige l’impact, ce sont l’emploi, la croissance, la répartition des richesses et, en fin de compte, la notion de politique économique et sociale qui déterminent la capacité de nos systèmes de retraite à tenir les engagements de ce contrat de solidarité entre les générations et qui permettent de maintenir, mes chers collègues, la cohésion de notre société. Il s’agit de facteurs importants à respecter si nous ne voulons pas, après la lutte des classes, connaître la lutte des générations.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion