Enfin, les auto-entreprises se substituent en partie aux entreprises individuelles classiques, dont les créations ont fortement baissé en 2009. Il faut tenir compte d’un effet de vases communicants entre les différents régimes de l’entreprise individuelle au profit de l’auto-entreprise.
Troisièmement, le succès de l’auto-entreprise s’appuie sur une véritable demande sociale. Les auto-entrepreneurs plébiscitent ainsi le fait que l’auto-entreprise permet de compléter les revenus grâce aux possibilités de cumul entre salariat, retraite et activité indépendante. D’après les sondages à notre disposition, environ une auto-entreprise sur deux aurait été créée pour exploiter ces possibilités de cumul.
L’auto-entreprise est également plébiscitée parce qu’elle permet de tester un projet sans risque financier. C’est ce qu’affirment les deux tiers des auto-entrepreneurs. La moitié d’entre eux reconnaissent même qu’ils n’auraient pas créé leur entreprise sans ce régime.
En outre, au-delà de son caractère rassurant et simple, le régime de l’auto-entreprise est bien accueilli pour une raison quasiment sociétale, à savoir qu’il institue concrètement un « droit à entreprendre ». L’auto-entreprise est en effet le symbole et le moyen d’une certaine autonomie individuelle dans la vie professionnelle. Elle ouvre réellement à tous la liberté d’entreprendre.
Quatrièmement, enfin, un an après ses débuts, l’auto-entreprise suscite encore un certain nombre de questions, sinon d’inquiétudes. Il ne faut ni les nier ni les exagérer, mais il convient de rester attentif pour effectuer les corrections qui pourraient s’avérer utiles.
Ces questions portent principalement sur deux points. Le premier concerne les accusations portées par les organisations représentant les entreprises de l’artisanat sur le thème de la concurrence déloyale. Le second a trait à la concurrence qui pourrait se développer entre le salariat et la sous-traitance auto-entrepreneuriale, des salariés étant de plus en plus remplacés par des sous-traitants auto-entrepreneurs ; une telle substitution est illégale dans un certain nombre de cas et il convient de rappeler que la forme juridique normale d’une relation de subordination est le contrat de travail.
Au-delà des craintes relatives à ces abus, la sous-traitance est une pratique tout à fait licite et l’on peut très bien envisager que les entreprises utilisent en toute légalité le régime de l’auto-entreprise pour externaliser vers des sous-traitants des tâches jusqu’alors réalisées en interne.
Pour l’instant, il n’y a pas de données claires montrant qu’un tel processus soit massivement en cours, mais c’est une question qu’il faut suivre de près.
Pour terminer sur l’auto-entreprise, je me permettrai de formuler trois recommandations.
D’abord, le Gouvernement doit fournir très vite un rapport économique et social sur les auto-entrepreneurs afin que l’on sache vraiment qui ils sont, ce qu’ils font, combien d’emplois et quelle valeur ajoutée sont réellement créés, quel est l’impact sur le monde de l’artisanat, sur les comptes sociaux et sur les pratiques de gestion de la main-d’œuvre des entreprises.