En définitive, ce projet de loi est inspiré par une certaine vision de l'agriculture, plus soucieuse d'obtenir des performances économiques sur les marchés extérieurs à l'Union européenne que de défendre une agriculture diversifiée et vivante sur l'ensemble du territoire.
Ce texte ne peut faire l'unanimité, car cette conception tend à maintenir la coexistence entre deux agricultures dont l'une serait axée sur le marché mondial et trouverait son aire de croissance privilégiée dans les zones agronomiques les plus favorisées, tandis que l'autre subirait des handicaps naturels, serait fragile et bénéficierait prioritairement des aides publiques.
Ce dualisme a été largement favorisé, avouons-le, par les mécanismes qui ont existé à l'échelon communautaire depuis les débuts de la construction européenne. C'est précisément cet état de choses qu'il fallait modifier, non seulement à Bruxelles, mais aussi à Paris, dans le Massif central et ailleurs. J'avoue cependant que les assises auxquelles j'ai participé voilà plus d'un an et demi ne correspondent en rien au texte que vous nous proposez aujourd'hui, monsieur le ministre. Aucune réelle perspective pour les paysans ne se dégage à la lecture de ce projet de loi !
Pour conclure, je vous poserai une dernière question, monsieur le ministre : l'agriculture n'est-elle destinée qu'à devenir une strate de l'iceberg agroalimentaire, qui serait détenue demain par on ne sait qui ? Et, pour reprendre l'image de la fable Le laboureur et ses enfants que vous avez évoquée, monsieur le ministre, n'oubliez pas que « c'est le fonds qui manque le moins » ! Oui, monsieur le ministre, de grâce ! conservons malgré tout une agriculture humaine.