... mais après déclaration d'urgence !
A l'origine, de surcroît, douze de ses trente-cinq articles étaient concernés par le recours aux ordonnances. Certes, vous avez fait marche arrière à l'Assemblée nationale, mais la méthode en dit long sur le rôle dévolu au Parlement !
Cela confirme en tout cas que nous avons affaire à un texte qui n'a d'orientation que le nom. Comme d'autres avant moi, je le qualifierai de projet de loi de modernisation ou, pis encore, d'adaptation temporaire à la réforme de la PAC.
Dans l'optique de la préparation d'une loi d'orientation, il eût été intéressant de réaliser une étude d'impact. A ma connaissance, tel n'a pas été le cas.
Par ailleurs, un projet de loi d'orientation devrait tenir compte des textes antérieurs et s'inscrire notamment dans la dynamique de la loi d'orientation agricole de 1999. Or votre texte ignore cette dernière, ce qui est bien dommage ! Manque également la cohérence avec la loi relative au développement des territoires ruraux, qui aurait permis une approche intégrée du développement rural.
De mon point de vue, les objectifs d'une loi d'orientation sont les suivants : premièrement, redonner des perspectives durables à l'agriculture tout en préservant la diversité des territoires et des productions ; deuxièmement, définir les rapports entre agriculture, territoires et société ; troisièmement, se préoccuper des enjeux des prochaines décennies.
Quels sont ces enjeux ? J'en citerai quelques-uns : la souveraineté alimentaire, la présence d'activités sur l'ensemble du territoire, l'entretien de paysages variés, l'aménagement et la préservation de l'environnement, le développement d'industries agroalimentaires novatrices et dynamiques, le soutien à l'innovation et à la diversification des modes de production et de distribution, la promotion de la recherche et de l'initiative, la production de biocarburants.
Mais une loi d'orientation digne de ce nom doit aussi susciter l'espérance, la confiance en notre avenir. L'agriculture est au coeur des questions de société. Nous savons bien qu'elle prend une part déterminante dans notre santé, notre environnement, nos paysages, notre culture aussi !
Pour établir cela, il faut une vision, une volonté, un contrat. Mon propos est de montrer le manque de perspectives, même si, j'en conviens, on doit tenir compte des évolutions et du cadre réglementaire européen, ainsi que du contexte de la mondialisation des échanges. Cependant, il faut croire en notre agriculture et en ses capacités, comme le préconise le très intéressant rapport du Conseil économique et social.
Nous pouvons y croire si plusieurs conditions sont remplies.
Tout d'abord, nous devons inscrire pleinement notre agriculture dans la ruralité. On ne peut en effet parler d'orientation agricole sans vouloir un tissu rural vivant. S'il n'y a pas de services à la population, il n'y aura pas d'agriculture vivante. De même, il n'y aura pas d'économie rurale sans activité agricole dynamique.
Par ailleurs, nous devons avoir la volonté de maintenir l'agriculture dans sa diversité sur l'ensemble des territoires et, pour cela, il nous faut parler des agricultures possibles.
Il faut oser parler de variété et de beauté des paysages, du charme de nos campagnes...