Intervention de Richard Yung

Réunion du 12 avril 2011 à 14h30
Immigration intégration et nationalité — Discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Richard YungRichard Yung :

Depuis le déclenchement des mouvements révolutionnaires et populaires dans les pays d’Afrique du Nord, de nombreux responsables politiques, à droite et à l’extrême-droite, agitent, dans un réflexe pavlovien, le chiffon rouge de l’immigration, même si le chiffre évoqué, élevé certes, de 20 000 personnes, n’est pas caractéristique d’une invasion.

Tout le monde reconnaît qu’il y a là un problème. Il touche d’abord l’Italie, qui est géographiquement en première ligne, comme l’était la Grèce par rapport au Moyen-Orient.

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’entre le gouvernement français et le délicat M. Berlusconi, l’image n’a pas été celle d’une franche coopération, avec pour conséquence des ressortissants libyens, somaliens et tunisiens pris en otages, ballotés de réglementations de mauvaise foi en reconduites permanentes.

Je souligne que ces populations viennent dans nos pays, non pas pour y émigrer ou s’y procurer du travail, mais tout simplement pour fuir un danger et se protéger.

Vous le savez aussi bien que moi, 100 000 ressortissants libyens sont partis en Tunisie, 100 000 en Égypte et peut-être 50 000, l’on ne sait précisément, vers le Sud, dans le Sahara ou du côté de Tombouctou.

Il existe une façon simple de faire face à cet afflux de migrants : l’activation de la protection temporaire prévue par la directive européenne de 2001, qui organise en quelque sorte un partage du « fardeau » entre les États membres. Pourtant, lorsque j’ai évoqué cette idée ici même voilà un an, dans le cadre d’une proposition de résolution, on m’a expliqué qu’elle était on ne peut plus saugrenue et que le problème ne se posait pas.

La vérité, c’est que vous n’avez pas de politique d’immigration. Vous naviguez à vue, selon les événements, et le résultat est un échec patent.

Les chiffres que vient de publier le Secrétariat général du Comité interministériel de contrôle de l’immigration sont éloquents. L’immigration de travail ne représente que 15 % des admissions sur le territoire, alors que l’objectif était de 50 % ; l’immigration familiale a baissé de 10 % ces dernières années ; le nombre de bénéficiaires du droit d’asile a chuté de 30 %, malgré l’augmentation du nombre de demandeurs ; le nombre de sans-papiers, de l’ordre de 400 000 – il est naturellement difficile de l’établir de façon exacte –, est resté constant depuis dix ans ; la régularisation des étrangers intégrés se tarit ; enfin, les étrangers sont poursuivis, contrôlés, contraints à des démarches inutiles qui n’en finissent plus.

Pourtant, le résultat des cantonales est clair, me semble-t-il : les Français ne pensent pas que la priorité soit d’organiser des débats bâclés de trois heures sur la laïcité et sur la place de la religion musulmane.

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