Le renvoi à la commission est également rendu nécessaire compte tenu des modifications apportées successivement au projet de loi initial. Citons, par exemple, l’introduction en première lecture à l’Assemblée nationale d’un amendement du Gouvernement sur la déchéance de nationalité et les volte-face qui ont suivi. Nous nous réjouissons que cette disposition ait été supprimée au cours de la navette.
Mes collègues et moi-même avions attiré l’attention en première lecture sur un certain nombre de propositions qui nous paraissaient discutables sur le plan constitutionnel. Chers collègues, souvenez-vous de ce qui s’est passé s’agissant de la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite LOPPSI 2 : la décision du Conseil constitutionnel a démontré que nous n’avons pas toujours tort sur les questions de cet ordre…
Le renvoi à la commission se justifie, en outre, par les nombreuses différences d’appréciation que consacrent les textes respectifs de la commission des lois du Sénat et de l’Assemblée nationale.
Les députés sont en grande partie revenus sur les modifications importantes votées par le Sénat, pour la plupart d’entre elles sur proposition de la commission des lois. Cela a notamment été le cas en matière de délivrance du titre de séjour et d’acquisition de la nationalité française par déclaration.
Les députés ont également supprimé l’acquisition automatique de la nationalité française à dix-huit ans pour les enfants nés en France de parents étrangers et ayant leur résidence habituelle en France. Ils ont aussi supprimé la présomption de nationalité française fondée sur la délivrance d’une carte nationale d’identité.
L’Assemblée nationale a rétabli le dispositif réprimant les « mariages gris » qu’elle avait initialement voté. Mais que dire, en droit, de la notion de « fraude au sentiment » ? Je m’étais d’ailleurs exprimé sur le sujet en première lecture. Une telle notion a un caractère flou et son application pratique posera nombre de problèmes, nous n’en doutons pas !
S’agissant des zones d’attente ad hoc, l’Assemblée nationale est revenue au texte qu’elle avait voté en première lecture : elle a ainsi supprimé la condition de durée, rendant de fait ces zones potentiellement pérennes, ce qui constitue une création tout à fait originale. La notion de « meilleur délai » doit s’apprécier, pour le Sénat, « compte tenu du nombre d’agents de l’autorité administrative et d’interprètes disponibles ». Les députés n’en ont fait qu’une raison parmi d’autres en introduisant, monsieur le président de la commission des lois, l’adverbe « notamment ».