Je salue le travail de notre rapporteur, rigoureux dans le bons sens du terme, ainsi que je l’ai déjà souligné, et tentant d’éviter certains excès, certaines dérives.
C’est ainsi que la commission des lois a souhaité revenir sur les dispositions introduites à nouveau par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, monsieur le président de la commission.
Elle a d’abord à nouveau supprimé les dispositions du projet de loi visant à restreindre la possibilité ouverte à des étrangers malades, atteints de pathologies particulièrement lourdes, de bénéficier d’un titre de séjour pendant le temps nécessaire à leur traitement.
Ensuite, concernant le maintien en rétention des étrangers en instance d’éloignement, elle a tenté de trouver une position intermédiaire avec celle de l’Assemblée nationale en prévoyant que l’intervention du juge des libertés et de la détention aurait lieu dans un délai de quatre jours.
Par ailleurs, elle a rétabli le texte voté en première lecture par le Sénat en matière de « mariages gris ».
Enfin, elle a supprimé les dispositions prévoyant l’exonération des employeurs de bonne foi en matière d’infractions à la législation sur l’emploi des salariés étrangers.
De fait, nombre de dispositions de ce texte vont au-delà des obligations imposées par les trois directives communautaires ici transposées ; vous vous êtes déjà exprimé sur ce point, monsieur le ministre, mais je souhaite y revenir.
L’article 23, qui transpose l’interdiction de retour, impose à l’administration de prononcer une telle mesure, alors que, dans la directive Retour, il n’était question que d’une faculté.
Parallèlement, cet article prévoit huit hypothèses fondant le refus de l’administration d’accorder un délai de départ volontaire, alors que la directive entend au contraire limiter la privation de liberté : « Toute rétention est aussi brève que possible […] ».
De la même façon, l’allongement à quarante-cinq jours de la durée de rétention ou la création de zones d’attente flottantes ne correspondent pas aux dispositions communautaires. Les directives précisent que doit systématiquement être appliqué le droit national plus favorable. Or, en l’espèce, l’effet cliquet joue à rebours.
Que penser in fine de tout cela, d’une politique migratoire qui, depuis 2002, est structurée autour d’un discours et d’actes contradictoires ?
Lors de la conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement, tenue à Rabat les 10 et 11 juillet 2006, le futur Président de la République déclarait : « J’ai la conviction profonde que l’immigration africaine, sous certaines conditions, peut être une chance aussi bien pour l’Europe que pour l’Afrique ». Il fixait également des objectifs, que nous aurions pu partager. Verba volant…
Mes chers collègues, nous considérons que les flux d’immigration doivent être régulés, et ce dans l’intérêt également de ceux que l’on accueille. Nous estimons qu’une politique d’immigration ne peut être menée qu’avec responsabilité et humanisme, dans le respect des droits fondamentaux, et ne doit en aucun cas être instrumentalisée pour servir des buts par trop électoralistes.
La Nation, monsieur le ministre, n’a pas de problème d’identité à résoudre avec elle-même ; elle a besoin, et plus encore dans ces moments de crise extérieure et de doute intérieur, d’être rassurée, de ne pas vivre au quotidien dans la rupture et le conflit.
À nos yeux, le présent projet de loi ne remplit pas un tel objectif. C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite purement et simplement à le renvoyer à la commission.