Intervention de Thierry Breton

Réunion du 20 octobre 2005 à 9h30
Développement et financement des infrastructures de transport — Discussion d'une question orale avec débat

Thierry Breton, ministre :

Ces concessions sont définies de façon contractuelle. Cela n'a rien à voir avec une détention majoritaire ou minoritaire par l'Etat dans le capital.

En revanche, c'est en se donnant les moyens de contrôler efficacement la bonne exécution des contrats de concession avec les entreprises que l'Etat s'assurera, quelle que soit sa part dans le capital, que les objectifs de cette politique publique seront atteints.

Avec Dominique Perben, nous avons justement renforcé ces contrats préalablement à la privatisation des sociétés d'autoroute, pour nous assurer que les missions de service public seront donc bien non seulement préservées, mais aussi renforcées.

Nombre d'entre vous se sont interrogés sur l'intérêt financier d'une telle cession par l'Etat. Là encore, je ne veux pas polémiquer, mais je tiens tout de même à relever certaines incompréhensions.

La valorisation de ces sociétés n'est pas un exercice simple, j'en conviens. Les différentes méthodes possibles, traditionnelles ou classiques, ont été évoquées ici même ce matin : il s'agit, entre autres, de la comparaison avec des sociétés voisines, du suivi de l'évolution des cours de bourse, des taux d'actualisation, notamment celui des cash flows.

Mais, sur ce point, excusez-moi de le dire, les bras m'en tombent ! Pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs siégeant à gauche de cet hémicycle, ne vous êtes-vous pas posé les mêmes questions lorsqu'un gouvernement de même tendance politique que la vôtre a décidé de vendre des actions de France Télécom et d'ASF, cette dernière opération ayant été réalisée en 2002 ? Pourquoi soulevez-vous ces questions aujourd'hui, alors que c'est le gouvernement de M. de Villepin qui agit ?

En fait, vous aviez parfaitement raison de ne pas vous interroger lorsque les actions des sociétés précitées ont été vendues puisque la Commission des participations et des transferts, ex-commission de la privatisation, devait présider à l'évaluation.

L'Etat s'est ainsi donné les moyens de vérifier que les cessions de titres se font dans l'intérêt patrimonial de l'Etat. Et je suis bien placé pour savoir que cette commission est très indépendante. Certains s'en souviennent peut-être au sein de cette assemblée : si j'ai été nommé président de Thomson Multimédia, c'est parce que la commission dite « de privatisation » avait estimé, à l'époque, que l'évaluation qui avait été faite n'était pas compatible avec la préservation des intérêts patrimoniaux de l'Etat.

Je vous rassure tout de suite : comme d'habitude, et comme cela eut lieu lorsque M. Fabius a décidé de vendre 49 % des titres d'ASF, c'est la Commission des participations et des transferts qui a vérifié si le taux d'actualisation était bon ; elle s'est prononcée sur le fait de savoir s'il fallait utiliser la méthode des free cash flows ou des discounted cash flows, si les évaluations effectuées avec d'autres cas de figure comparables étaient adéquates. In fine, c'est elle qui appréciera si le prix retenu est juste.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous pouvez dormir tranquilles : la Commission des participations et des transferts a été inventée par l'Etat précisément pour assumer ces missions.

Elle veillera et, croyez-moi, elle est constituée d'hommes indépendants et de très grande qualité. C'est elle qui dira s'il faut prendre en considération le rapport Lebègue ou d'autres. Elle légitimera la méthode retenue. Le Gouvernement n'a aucun doute quant à l'avis qu'elle donnera au regard de toutes les opérations qu'elle a déjà traitées.

Pourquoi donc, lorsqu'il s'agit de sociétés concessionnaires de services autoroutiers, faudrait-il se placer en dehors du droit ? J'estime qu'il faut, dans tous les cas de figure, respecter le droit. Je le dis une nouvelle fois, sans polémique. Certes, les autoroutes sillonnent le territoire, et je comprends que la cession d'une partie du capital des sociétés qui les gèrent ait une charge affective pour certains. Cependant, je pense qu'il faut s'en tenir aux principes de droit.

J'en viens aux derniers points qui ont été évoqués.

En ce qui concerne la procédure, je tiens à vous réaffirmer que j'entends traiter ce dossier en toute transparence, comme toujours.

Je sais bien qu'il y a eu débat. La question à laquelle a été confronté le Gouvernement était simple : peut-on essayer de faire mieux tout en préservant l'acquis tant pour nos infrastructures que pour l'Etat ? Nous avons essayé d'apporter une réponse positive.

D'aucuns soutiennent qu'il était judicieux de disposer d'un système qui permette de financer ces infrastructures grâce aux importants dividendes versés par les sociétés en question. A ce propos, monsieur Billout, je me réjouis que vous vous soyez fait l'apologiste des gros dividendes. Je constate que le débat a fait progresser les esprits.

Il est vrai qu'il est bon de réaliser de gros dividendes et de les distribuer aux actionnaires, surtout s'ils doivent être utilisés en partie pour assurer le financement. Pourquoi pas, certes, dans la mesure où ces dividendes sont pérennes ? C'est là que le problème se pose.

En effet, les dividendes ne sont pas une rente. Ils correspondent tout simplement à ce qui reste lorsqu'une entreprise fait des profits. Ce n'est pas un acquis, contrairement à ce que certains ont eu l'air de penser au cours de ce débat.

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